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CONCLUSION (S)

Eh bien, oui ! Il y en a une à cette extraordinaire enquête.

Que dis-je : il y en a plusieurs.

On se les prend dans l'ordre, mes fils ?

Ce matin, on est lundi. Ça n'a rien d'étonnant, vu que la chose se reproduit toutes les semaines, de préférence entre le dimanche et le mardi. J'arrive au burlingue assez tôt, frais comme une rose à peine éclose. Je mijote d'aller faire un viron boulevard de Port-Royal pour repêcher le coup avec cette Natacha dont le souvenir se tortille dans ma mémoire.

En voilà une qui aura droit à un régime de faveur, moi je vous le dis : Parce que je ne sais pas si vous l'avez observé, avec votre vue basse et votre air gland, mais je ne me suis pas tassé de mousmée au cours de cette triple enquête. En arrivant, je bute sur Martinet et Laplume, aussi souriants et frémissants l'un que l'autre.

— Monsieur le commissaire, m'annonce le premier, j'ai du nouveau…

— Encore ! me pâmé-je.

— Oui. Figurez-vous qu'après une enquête serrée, j'ai découvert qu'Achille Lendoffé avait rendez-vous chez la pétasse de Bellecombe au moment où il est mort. Il s'apprêtait à la rejoindre, c'est pourquoi il n'a pas arrêté sa bagnole…

Me voici débarrassé d'une arrière-pensée qui voltigeait dans ma tête. Donc, j'avais raison sur toute la ligne.

— Bravo, mon gars. Voilà du beau travail de complément. Je m'en souviendrai.

Je me tourne vers Laplume.

— Et toi, tu as des choses à m'apprendre ?

— Oui, m'sieur le commissaire, mais ça n'a rien à voir avec le service.

— Dis quand-même.

— Ça concerne Natacha Bannet. Vous savez ? Mon palpitant commence à se trémousser.

— Bien sûr, que je sais. Alors ?

— Eh ben, ça y est !

— Qu'est-ce qui y est ?

— Je me la suis dégringolée. Pas sans mal, mais j'y suis arrivé. C'est une fille qui a eu beaucoup de déceptions.

Il rougit et murmure en baissant le ton :

— Entre nous, elle a décidé de se rattraper vous parlez d'un volcan !

Je fais un effort pour planquer ma déception.

— Tant mieux, mon gars, tant mieux…

Je frappe l'épaule de ce nouvel Haroun Terzieff.

— Bonne bourre ! Quand tu n'en voudras plus, la jette pas : elle pourra peut-être resservir.

Un peu pincé dans la région prostatique je monte jusque chez le Dabe.

Depuis mon triomphe bellecombais, il me passe une pommade à côté de laquelle l'onguent gris n'est que fumée.

Au moment où je frappe à sa lourde capitonnée, des éclats de voix me parviennent.

— Entrez ! hurle le Vioque.

Je pénètre dans le bureau directorial. J'y découvre Bérurier, assis dans un fauteuil, les jambes croisées, la braguette pas boutonnée et le chapeau neuf négligemment posé sous ses fesses ravageuses.

— C'est un ultimatum, tenez-le-vous pour dit ! lui balance le Rasé.

Ça n'a pas l'air de l'émouvoir, Béru. Il parait heureux. Tout le monde, excepté le Dabe, a l'air joyce, ce matin.

Comme je suis responsable de lui par-devant mes supérieurs, je m'informe de ses nouvelles incartades.

— Tenez ! dit le patron en me brandissant un journal sous le pif, lisez !

Sur deux colonnes, à la 2, je découvre, coché au crayon rouge le titre suivant.

En Seine-et-Eure, l'inspecteur principal Bérurier est élu à 99 % de majorité.

On a beau dire, mais ça fait un drôle d'effet, mes canards.

— C'est pas possible ! exhalé-je.

— Textuel, rétorque le Gros. Je suis député de Seine-et-Eure. Pour un succès, c'en est un, non ?

— Je ne veux pas le savoir ! barrit le Vieux. Ou vous vous démettez de votre mandat ou vous quittez la police !

Bérurier se dresse, récupère son bitos, lui redonne tant bien que mal l'apparence d'un chapeau et déclare.

— M'sieur le directeur. Quand c'est qu'on a la chance d'être un nélu du peup' pour défendre ses intérêts à l'Assemblée légitime, on la repousse pas.

— Conclusion, vous demandez votre mise à la retraite anticipée ?

— Puisque c'est vous qui l'exigez et que vous ne me laissez pas d'autre rébarbative, oui !

Il évite mon regard.

— Je regrette, vous savez, murmure-t-il. Mais quoi, une occase pareille ! Faut comprendre…

— Sortez ! tonne le Tondu.

Béru sort.

Comme il s'apprête à franchir le seuil, je dis, tout bas :

— Béru ! Ecoute…

Mais déjà, il est parti.

— C'est insensé ! glapit le Vieux en se massant la coupole. Insensé. Mais le peuple est donc aveugle, ma parole ! Cet abruti élu à presque cent pour cent de majorité ! On croit rêver…

— Pas nous, monsieur le directeur, objecté-je ; c'est le peuple qui rêve. Bérurier a une bonne gueule, le peuple aime qu'on ait une bonne gueule. Il lui a promis la lune ; le peuple rêve de posséder la lune.

Je me racle le gosier. Voilà que je ne suis plus heureux du tout, soudain. Ça me picote dans la gorge, derrière les yeux, partout. Plus de Béru ! On va continuer sans lui.

Je reste un moment à bavarder de l'enquête avec le Vieux. Lui aussi, se sent tout chose.

On toque à la porte. Un planton entre, portant un pli étoilé d'une énorme tache de graisse.

— De la part du principal Bérurier, fait-il en me le remettant. C'est sa lettre de démission, m'a-t-il dit.

— Vous permettez ? fais-je au Boss en ouvrant le pli.

L'enveloppe renferme deux lettres. La première m'est destinée, je lis :

San A. Tu me fais l'effet des pilules Miraton… C'est à toi que je remets la lettre ci-jointe ci-après, biscotte ça me ferait mal aux prunes de la poster de mes propres mains.

Béru.

Je prends l'autre bafouille. Elle est adressée à M. le Président de l'Assemblée nationale. La voici :

Mon Président,

Vous l'aurez pas z'été longtemps vu que moi, Bérurier Alexandre-Benoît, inspecteur principal et député de Seine-et-Eure, je démissionne déjà. C'est pas de gaieté de cœur, croyez bien ! Mais j'ai pas d'autre alternance vu qu'on veut me virer de la police si je remplis mon mandat. Autrement dit, c'est un mandat de virement !

Mes choses étant ce qu'elles sont, comme on dit chez vous, je préfère rester à mon poste. Et pourtant, j'ai l'impression que j'eusse pas été inutile sous le Vélocycle du Palais Bourdon. Quand il s'agit des intérêts de la Patrie, la Voix d'un brave homme c'est une corde vocale de plus à l'arc de la nation.

C'est donc mon adjoint, l'ex-adjudant Paul Morbleut qui va prendre ma place. Popaul, c'est pas le mauvais bougre, seulement il a un défaut : il boit. Je vous le dis pas pour rapporter, c'est pas mon genre, mais pour que vous fassiez gaffe qu'il soye bien à jeun quand vous lui ferez voter une loi.

Peut-être que vous pourriez donner des instructions à ce sujet à la cantine de l'Assemblée ?

Avec mes hommages pour votre dame, je vous prie d'agréger, mon Président, l'espression de mes poignées de mains les plus républicaines : Alexandre-Benoît BERURIER

P-S : Si j'osais, j'ajouterais : Vive la France !

FIN