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mon départ. »
Sa mère, en effet, ne
dormait pas.
Aussitôt Suzanne sortie de
sa chambre, Mme Walter était
restée en face de son mari.
Elle demanda, éperdue, atterrée :
« Mon Dieu ! Qu’est-ce que cela veut dire ? »
Walter cria, furieux :
« Ça veut dire que cet intrigant l’a enjôlée. C’est lui qui a fait refuser Cazolles. Il trouve la dot bonne, parbleu ! »
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Il se mit à marcher avec rage à travers l’appartement et reprit :
« Tu l’attirais sans cesse, aussi, toi, tu le flattais, tu le cajolais, tu n’avais pas assez de chatteries pour lui.
C’était Bel-Ami par-ci, Bel-Ami par-là, du matin au soir. Te voilà payée. »
Elle murmura, livide :
« Moi ?… je l’attirais ! »
Il lui vociféra dans le nez :
« Oui, toi ! Vous êtes toutes folles de lui, la Marelle, Suzanne et les autres. Crois-tu que je ne voyais pas que tu ne pouvais point rester deux jours sans le faire venir ici ? »
Elle se dressa, tragique :
« Je ne vous permettrai pas de me parler ainsi. Vous oubliez que je n’ai pas été élevée, comme vous, dans une boutique. »
Il demeura d’abord immobile et stupéfait, puis il lâcha un
« Nom de Dieu « furibond, et il sortit en tapant la porte.
Dès qu’elle fut seule, elle alla, par instinct, vers la glace pour se regarder, comme pour voir si rien n’était changé en elle, tant ce qui arrivait lui paraissait impossible, monstrueux. Suzanne était amoureuse de Bel-Ami ! et Bel-Ami voulait épouser Suzanne ! Non ! elle s’était trompée, ce n’était pas vrai. La fillette avait eu une toquade bien naturelle pour ce beau garçon, elle avait espéré qu’on le lui donnerait pour mari ; elle avait fait
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son petit coup de tête ! Mais lui ? lui ne pouvait pas être complice de ça ! Elle réfléchissait, troublée comme on l’est devant les grandes catastrophes. Non, Bel-Ami ne devait rien savoir de l’escapade de Suzanne.
Et elle songea longtemps à la perfidie et à l’innocence possibles de cet homme. Quel misérable, s’il avait préparé le coup ! Et qu’arriverait-il ? Que de dangers et de tourments elle prévoyait !
S’il ne savait rien, tout pouvait s’arranger encore. On ferait un voyage avec Suzanne pendant six mois, et ce serait fini. Mais comment pourrait-elle le revoir, elle, ensuite ? Car elle l’aimait toujours. Cette passion était entrée en elle à la façon de ces pointes de flèche qu’on ne peut plus arracher.
Vivre sans lui était impossible. Autant mourir. Sa pensée s’égarait dans ces angoisses et dans ces incertitudes. Une douleur commençait à poindre dans sa tête ; ses idées devenaient pénibles, troubles, lui faisaient mal. Elle s’énervait à chercher, s’exaspérait de ne pas savoir. Elle regarda sa pendule, il était une heure passée. Elle se dit : « Je ne veux pas rester ainsi, je deviens folle. Il faut que je sache. Je vais réveiller Suzanne pour l’interroger. »
Et elle s’en alla, déchaussée, pour ne pas faire de bruit, une bougie à la main, vers la chambre de sa fille. Elle l’ouvrit bien doucement, entra, regarda le lit. Il n’était pas défait. Elle ne comprit point d’abord, et pensa que la fillette discutait encore avec son père. Mais aussitôt un soupçon horrible l’effleura et elle courut chez son mari. Elle y arriva d’un élan ; blême et haletante. Il était couché et lisait encore.
Il demanda effaré :
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« Eh bien ! quoi ? Qu’est-ce que tu as ? »
Elle balbutiait :
« As-tu vu Suzanne ?
– Moi ? Non. Pourquoi ?
– Elle est… elle est… partie. Elle n’est pas dans sa chambre. »
Il sauta d’un bond sur le tapis, chaussa ses pantoufles et, sans caleçon, la chemise au vent, il se précipita à son tour vers l’appartement de sa fille.
Dès qu’il l’eut vu, il ne conserva point de doute. Elle s’était enfuie.
Il tomba sur un fauteuil et posa sa lampe par terre devant lui.
Sa femme l’avait rejoint. Elle bégaya :
« Eh bien ? »
Il n’avait plus la force de répondre ; il n’avait plus de colère, il gémit :
« C’est fait, il la tient. Nous sommes perdus. »
Elle ne comprenait pas :
« Comment perdus ?
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– Eh ! oui, parbleu. Il faut bien qu’il l’épouse maintenant. »
Elle poussa une sorte de cri de bête :
« Lui ! jamais ! Tu es donc fou ? »