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« Pourquoi ça ?
– Parce que…
– Ce n’est pas une raison. Ce logement me convient très bien. J’y suis. J’y reste. »
Il se mit à rire :
« D’ailleurs, il est à mon nom. »
Mais elle refusait toujours :
« Non, non, je ne veux pas…
– Pourquoi ça, enfin ? »
Alors elle chuchota tout bas, tendrement : « Parce que tu y amènerais des femmes, et je ne veux pas. »
Il s’indigna :
« Jamais de la vie, par exemple. Je te le promets.
– Non, tu en amènerais tout de même.
– Je te le jure.
– Bien vrai ?
– Bien vrai. Parole d’honneur. C’est notre maison, ça, rien qu’à nous. »
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Elle l’étreignit dans un élan d’amour :
« Alors je veux bien, mon chéri. Mais tu sais, si tu me trompes une fois, rien qu’une fois, ce sera fini entre nous, fini pour toujours. »
Il jura encore avec des protestations, et il fut convenu qu’il s’installerait le jour même, afin qu’elle pût le voir quand elle passerait devant la porte.
Puis elle lui dit :
« En tout cas, viens dîner dimanche. Mon mari te trouve charmant. »
Il fut flatté :
« Ah ! vraiment ?…
– Oui, tu as fait sa conquête. Et puis écoute, tu m’as dit que tu avais été élevé dans un château à la campagne, n’est-ce pas ?
– Oui, pourquoi ?
– Alors tu dois connaître un peu la culture ?
– Oui.
– Eh bien, parle-lui de jardinage et de récoltes, il aime beaucoup ça.
– Bon. Je n’oublierai pas. »
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Elle le quitta, après l’avoir indéfiniment embrassé, ce duel ayant exaspéré sa tendresse.
Et Duroy pensait, en se rendant au journal : « Quel drôle d’être ça fait ! Quelle tête d’oiseau ! Sait-on ce qu’elle veut et ce qu’elle aime ? Et quel drôle de ménage ! Quel fantaisiste a bien pu préparer l’accouplement de ce vieux et de cette écervelée ?
Quel raisonnement a décidé cet inspecteur à épouser cette étudiante ? Mystère ! Qui sait ? L’amour, peut-être ? »
Puis il conclut : « Enfin, c’est une bien gentille maîtresse. Je serais rudement bête de la lâcher. »
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– VIII –
Son duel avait fait passer Duroy au nombre des chroniqueurs de tête de La Vie Française ; mais, comme il éprouvait une peine infinie à découvrir des idées, il prit la spécialité des déclamations sur la décadence des mœurs, sur l’abaissement des caractères, l’affaissement du patriotisme et l’anémie de l’honneur français. (Il avait trouvé le mot « anémie
« dont il était fier.)
Et quand Mme de Marelle, pleine de cet esprit gouailleur, sceptique et gobeur qu’on appelle l’esprit de Paris, se moquait de ses tirades qu’elle crevait d’une épigramme, il répondait en
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souriant : « Bah ! ça me fait une bonne réputation pour plus tard. »
Il habitait maintenant rue de Constantinople, où il avait transporté sa malle, sa brosse, son rasoir et son savon, ce qui constituait son déménagement. Deux ou trois fois par semaine, la jeune femme arrivait avant qu’il fût levé, se déshabillait en une minute et se glissait dans le lit, toute frémissante du froid du dehors.
Duroy, par contre, dînait tous les jeudis dans le ménage et faisait la cour au mari en lui parlant agriculture ; et comme il aimait lui-même les choses de la terre, ils s’intéressaient parfois tellement tous les deux à la causerie qu’ils oubliaient tout à fait leur femme sommeillant sur le canapé.
Laurine aussi s’endormait, tantôt sur les genoux de son père, tantôt sur les genoux de Bel-Ami.
Et quand le journaliste était parti, M. de Marelle ne manquait point de déclarer avec ce ton doctrinaire dont il disait les moindres choses : « Ce garçon est vraiment fort agréable. Il a l’esprit très cultivé. »
Février touchait à sa fin. On commençait à sentir la violette dans les rues en passant le matin auprès des voitures traînées par les marchandes de fleurs.