37603.fb2 Consuelo - читать онлайн бесплатно полную версию книги . Страница 11

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l'innocence.»

Le comte et le maestro s'égayèrent quelques moments de la candeur, et

des reparties de ce jeune couple; puis, ayant donné rendez-vous à

Anzoleto pour qu'il fît entendre sa voix au professeur le lendemain, ils

s'éloignèrent, le laissant à ses graves occupations.

«Comment trouvez-vous cette petite fille? dit le professeur à

Zustiniani.

--Je l'avais vue déjà, il n'y a qu'un instant, et je la trouve assez

laide pour justifier l'axiome qui dit: Aux yeux d'un homme de dix-huit

ans, toute femme semble belle.

--C'est bon, répondit le professeur; maintenant je puis donc vous dire

que votre divine cantatrice, votre sirène, votre mystérieuse beauté,

c'était Consuelo.

--Elle! ce sale enfant? cette noire et maigre sauterelle? impossible,

maestro!

--Elle-même, seigneur comte. Ne ferait-elle pas une _prima donna_ bien

séduisante?»

Le comte s'arrêta, se retourna, examina encore de loin Consuelo, et

joignant les mains avec un désespoir assez comique:

«Juste ciel! s'écria-t-il, peux-tu faire de semblables méprises, et

verser le feu du génie dans des têtes si mal ébauchées!

--Ainsi, vous renoncez à vos projets coupables? Dit le professeur.

--Bien certainement.

--Vous me le promettez? ajouta le Porpora.

--Oh! je vous le jure, répondit le comte.»

III.

Éclos sous le ciel de l'Italie, élevé par hasard comme un oiseau des

rivages, pauvre, orphelin abandonné, et cependant heureux dans le

présent et confiant dans l'avenir comme un enfant de l'amour qu'il était

sans doute, Anzoleto, ce beau garçon de dix-neuf ans, qui passait tous

ses jours auprès de la petite Consuelo, dans la plus complète liberté,

sur le pavé de Venise, n'en était pas, comme on peut le croire, à ses

premières amours. Initié aux voluptés faciles qui s'étaient offertes à

lui plus d'une fois, il eût été usé déjà et corrompu peut-être, s'il eût

vécu dans nos tristes climats, et si la nature l'eût doué d'une

organisation moins riche. Mais, développé de bonne heure et destiné à

une longue et puissante virilité, il avait encore le coeur pur et les

sens contenus par la volonté. Le hasard lui avait fait rencontrer la

petite Espagnole devant les Madoriettes, chantant des cantiques par

dévotion; et lui, pour le plaisir d'exercer sa voix, il avait chanté

avec elle aux étoiles durant des soirées entières. Et puis ils s'étaient

rencontrés sur les sables du Lido, ramassant des coquillages, lui pour

les manger, elle pour en faire des chapelets et des ornements. Et puis

encore ils s'étaient rencontrés à l'église, elle priant le bon Dieu de

tout son coeur, lui regardant les belles dames de tous ses yeux. Et dans

toutes ces rencontres, Consuelo lui avait semblé si bonne, si douce, si

obligeante, si gaie, qu'il s'était fait son ami et son compagnon

inséparable, sans trop savoir pourquoi ni comment. Anzoleto ne

connaissait encore de l'amour que le plaisir. Il éprouva de l'amitié

pour Consuelo; et comme il était d'un pays et d'un peuple où les