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chose de son fils. L'abbé resta seul à me faire des compliments qui
m'irritèrent encore plus que l'indifférence des autres.
«--Il paraît, lui dis-je, que mon cousin n'aime pas la musique.
«--Il l'aime beaucoup, au contraire, répondit-il; mais c'est selon ...
«--C'est selon la manière dont on chante? lui dis-je en l'interrompant.
«--C'est, reprit-il sans se déconcerter, selon la disposition de son
âme; quelquefois la musique lui fait du bien, et quelquefois du mal.
Vous l'aurez ému, j'en suis certain, au point qu'il aura craint de ne
pouvoir se contenir. Cette fuite est plus flatteuse pour vous que les
plus grands éloges.»
«Les adulations de ce jésuite avaient quelque chose de sournois et de
railleur qui me le faisait détester. Mais j'en fus bientôt délivrée,
comme vous allez l'apprendre tout à l'heure.»
XXVIII.
«Le lendemain, ma tante, qui ne parle guère lorsque son coeur n'est pas
vivement ému, eut la malheureuse idée de s'engager dans une conversation
avec l'abbé et le chapelain. Et comme, en dehors de ses affections de
famille, qui l'absorbent presque entièrement, il n'y a pour elle au
monde qu'une distraction possible, laquelle est son orgueil de famille,
elle ne manqua pas de s'y livrer en dissertant sur sa généalogie, et en
prouvant à ces deux prêtres que notre race était la plus pure, la plus
illustre, et la plus excellente de toutes les familles de l'Allemagne,
du côté des femmes particulièrement. L'abbé l'écoutait avec patience et
notre chapelain avec révérence, lorsque Albert, qui ne paraissait pas
l'écouter du tout, l'interrompit avec un peu de vivacité:
«--Il me semble, ma bonne tante, lui dit-il, que vous vous faites
quelques illusions sur la prééminence de notre famille. Il est vrai que
la noblesse et les titres de nos ancêtres remontent assez haut dans le
passé; mais une famille qui perd son nom, qui l'abjure en quelque sorte,
pour prendre celui d'une femme de race et de religion étrangère, renonce
au droit de se faire valoir comme antique en vertu et fidèle à la gloire
de son pays.
«Cette remarque contraria beaucoup la chanoinesse; mais, comme l'abbé
avait paru ouvrir l'oreille, elle crut devoir y répondre.
«--Je ne suis pas de votre avis, mon cher enfant, dit-elle. On a vu bien
souvent d'illustres maisons se rendre, à bon droit, plus illustres
encore, en joignant à leur nom celui d'une branche maternelle, afin de
ne pas priver leurs hoirs de l'honneur qui leur revenait d'être issus
d'une femme glorieusement apparentée.
«--Mais ce n'est pas ici le cas d'appliquer cette règle, reprit Albert
avec une ténacité à laquelle il n'était point sujet. Je conçois
l'alliance de deux noms illustres. Je trouve fort légitime qu'une femme
transmette à ses enfants son nom accolé à celui de son époux. Mais
l'effacement complet de ce dernier nom me paraît un outrage de la part
de celle qui l'exige, une lâcheté de la part de celui qui s'y soumet.
«--Vous rappelez des choses bien anciennes, Albert, dit la chanoinesse
avec un profond soupir, et vous appliquez la règle plus mal à propos que
moi. Monsieur l'abbé pourrait croire, en vous entendant, que quelque
mâle, dans notre ascendance, aurait été capable d'une lâcheté; et