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les catholiques. Et puis, ses souvenirs parurent se confondre, et il

ajouta mille choses incompréhensibles sur la vie éternelle et

perpétuelle, sur la réapparition des hommes sur la terre, se fondant sur

cet article de la croyance hussitique, que Jean Huss devait revenir en

Bohême cent ans après sa mort, et compléter son oeuvre; prédiction qui

s'était accomplie, puisque, selon lui, Luther était Jean Huss

ressuscité. Enfin ses discours furent un mélange d'hérésie, de

superstition, de métaphysique obscure, de délire poétique; et tout cela

fut débité avec une telle apparence de conviction, avec des souvenirs si

détaillés, si précis, et si intéressants, de ce qu'il prétendait avoir

vu, non-seulement dans la personne de Wratislaw, mais encore dans celle

de Jean Ziska, et de je ne sais combien d'autres morts qu'il soutenait

avoir été ses propres apparitions dans la vie du passé, que nous

restâmes tous béants à l'écouter, sans qu'aucun de nous eût la force de

l'interrompre ou de le contredire. Mon oncle et ma tante, qui

souffraient horriblement de cette démence, impie selon eux, voulaient du

moins la connaître à fond; car c'était la première fois qu'elle se

manifestait ouvertement, et il fallait bien en savoir la source pour

tâcher ensuite de la combattre. L'abbé s'efforçait de tourner la chose

en plaisanterie, et de nous faire croire que le comte Albert était un

esprit fort plaisant et fort malicieux, qui prenait plaisir à nous

mystifier par son incroyable érudition.

«--II a tant lu, nous disait-il, qu'il pourrait nous raconter ainsi

l'histoire de tous les siècles, chapitre par chapitre, avec assez de

détails et de précision pour faire accroire à des esprits un peu portés

au merveilleux, qu'il a véritablement assisté aux scènes qu'il raconte.»

«La chanoinesse, qui, dans sa dévotion ardente, n'est pas très-éloignée

de la superstition, et qui commençait à croire son neveu sur parole,

prit très-mal les insinuations de l'abbé, et lui conseilla de garder ses

explications badines pour une occasion plus gaie; puis elle fit un grand

effort pour amener Albert à rétracter les erreurs dont il avait la tête

remplie.

«--Prenez garde, ma tante; s'écria Albert avec impatience, que je ne

vous dise qui vous êtes. Jusqu'ici je n'ai pas voulu le savoir; mais

quelque chose m'avertit en ce moment que la Saxonne Ulrique est auprès

de moi.

«--Eh quoi, mon pauvre enfant, répondit-elle, cette aïeule prudente et

dévouée qui sut conserver à ses enfants la vie, et à ses descendants

l'indépendance, les biens et les honneurs dont ils jouissent, vous

pensez qu'elle revit en moi? Eh bien, Albert, je vous aime tant, que

pour vous je ferais plus encore: je sacrifierais ma vie, si je pouvais,

à ce prix, calmer votre esprit égaré.»

«Albert la regarda quelques instants avec des yeux à la fois sévères et

attendris.

«--Non, non, dit-il enfin en s'approchant d'elle, et en s'agenouillant à

ses pieds, vous êtes un ange, et vous avez communié jadis dans la coupe

de bois des Hussites. Mais la Saxonne est ici, cependant, et sa voix a

frappé mon oreille aujourd'hui à plusieurs reprises.

«--Prenez que c'est moi, Albert, lui dis-je en m'efforçant de l'égayer,

et ne m'en veuillez pas trop de ne pas vous avoir livré aux bourreaux en