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mon oncle au sujet dé son fils, il n'y eut jamais que des éloges de son
extérieur et des félicitations sur les avantages de sa personne. Albert
n'a laissé nulle part la réputation d'un malade ou d'un insensé. Quoi
qu'il en soit, sa vie intérieure durant ces huit ans d'absence est
restée pour nous un secret impénétrable. L'abbé, voyant, au bout de
trois jours, qu'il ne reparaissait pas, et craignant que ses propres
affaires ne fussent gâtées par cet incident, se mit en campagne,
soi-disant pour le chercher à Prague, où l'envie de chercher quelque
livre rare pouvait, selon lui, l'avoir poussé.»
«--II est, disait-il, comme les savants qui s'abîment dans leurs
recherches, et qui oublient le monde entier pour satisfaire leur
innocente passion.»
«Là-dessus l'abbé partit, et ne revint pas.»
«Au bout de sept jours d'angoisses mortelles, et comme nous commencions
à désespérer, ma tante, passant vers le soir devant la chambre d'Albert,
vit la porte ouverte, et Albert assis dans son fauteuil, caressant son
chien qui l'avait suivi dans son mystérieux voyage. Ses vêtements
n'étaient ni salis ni déchirés; seulement la dorure en était noircie,
comme s'il fût sorti d'un lieu humide, ou comme s'il eût passé les nuits
à la belle étoile. Sa chaussure n'annonçait pas qu'il eût beaucoup
marché; mais sa barbe et ses cheveux témoignaient d'un long oubli des
soins de sa personne. Depuis ce jour-là, il a constamment refusé de se
raser et de se poudrer comme les autres hommes; c'est pourquoi vous lui
avez trouvé l'aspect d'un revenant.»
«Ma tante s'élança vers lui en faisant un grand cri.»
«--Qu'avez-vous donc, ma chère tante? dit-il en lui baisant la main. On
dirait que vous ne m'avez pas vu depuis un siècle!»
«--Mais, malheureux enfant! s'écria-t-elle; il y a sept jours que tu
nous as quittés sans nous rien dire; sept mortels jours, sept affreuses
nuits, que nous te cherchons, que nous te pleurons, et que nous prions
pour toi!»
«--Sept jours? dit Albert en la regardant avec surprise. II faut que
vous ayez voulu dire sept heures, ma chère tante; car je suis sorti ce
matin pour me promener, et je rentre à temps pour souper avec vous.
Comment ai-je pu vous causer une pareille inquiétude par une si courte
absence?»
«--Sans doute, dit-elle, craignant d'aggraver son mal en le lui
révélant, la langue m'a tourné; j'ai voulu dire sept heures. Je me suis
inquiétée parce que tu n'as pas l'habitude de faire d'aussi longues
promenades, et puis j'avais fait cette nuit un mauvais rêve: j'étais
folle.»
«--Bonne tante, excellente amie! dit Albert en couvrant ses mains de
baisers, vous m'aimez comme un petit enfant. Mon père n'a pas partagé
votre inquiétude, j'espère?»
«--Nullement. Il t'attend pour souper. Tu dois avoir bien faim?
«--Fort peu. J'ai très-bien dîné.»
«--Où donc, et quand donc, Albert?»
«--Ici, ce matin, avec vous, ma bonne tante. Vous n'êtes pas encore
revenue à vous-même, je le vois. Oh! que je suis malheureux de vous