37603.fb2 Consuelo - читать онлайн бесплатно полную версию книги . Страница 153

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eux.

«On ne parla plus de cette circonstance à mon cousin. Mais mon oncle,

qui voulait savoir si c'était une inspiration ou un caprice de sa part,

fit faire des fouilles durant la nuit à l'endroit que désigna mon père.

On y trouva les squelettes d'un homme, d'une femme et d'un enfant.

L'homme était couvert d'un de ces énormes boucliers de bois que

portaient les hussites, et qui sont bien reconnaissables à cause du

calice qui est gravé dessus, avec cette devise autour en latin: _O Mort,

que ton souvenir est amer aux méchants! mais que tu laisses calme celui

dont toutes les actions sont justes et dirigées en vue du trépas!_»[1]

[1 _O mors, quam est amara memoria tua hominibus injustis, viro quieta

cujus omnes res flunt ordinate et ad hoc_. C'est une sentence empruntée

à la Bible (_Ecclésiastique_, ch. XLI;, v. 1 et 3). Mais, dans la Bible,

au lieu des méchants, il y a les riches; au lieu des justes, les

indigents.]

«On porta ces ossements dans un endroit plus retiré de la forêt, et

lorsque Albert repassa à plusieurs jours de là au pied du sapin, mon

père remarqua qu'il n'éprouvait aucune répugnance à marcher sur cette

place, qu'on avait cependant recouverte de pierres et de sable, et où

rien ne paraissait changé. Il ne se souvenait pas même de l'émotion

qu'il avait eue en cette occasion, et il eut de la peine à se la

rappeler lorsqu'on lui en parla.

«--II faut, dit-il à mon père, que vous vous trompiez, et que j'aie été

_averti-dans un autre endroit. Je suis certain qu'ici il n'y a rien;

car je ne sens ni froid, ni douleur, ni tremblement dans mon corps.»

«Ma tante était bien portée à attribuer cette puissance divinatoire à

une faveur spéciale de la Providence. Mais Albert est si sombre, si

tourmenté, et si malheureux, qu'on ne conçoit guère pourquoi la

Providence lui aurait fait un don si funeste. Si je croyais au diable,

je trouverais bien plus acceptable la supposition de notre chapelain,

qui lui met toutes les hallucinations d'Albert sur le dos. Mon oncle

Christian, qui est un homme plus sensé et plus ferme dans sa religion

que nous tous, trouve à beaucoup de ces choses-là des éclaircissements

fort vraisemblables. Il pense que malgré tous les soins qu'ont pris les

jésuites de brûler, pendant et après la guerre de trente ans, tous les

hérétiques de la Bohême, et en particulier ceux qui se trouvaient au

château des Géants, malgré l'exploration minutieuse que notre chapelain

a faite dans tous les coins après la mort de ma tante Wanda, il doit

être resté, dans quelque cachette ignorée de tout le monde, des

documents historiques du temps des hussites, et qu'Albert les a

retrouvés. Il pense que la lecture de ces dangereux papiers aura

vivement frappé son imagination malade, et qu'il attribue naïvement à

des souvenirs merveilleux d'une existence antérieure sur la terre

l'impression qu'il a reçue de plusieurs détails ignorés aujourd'hui,

mais consignés et rapportés avec exactitude dans ces manuscrits. Par là

s'expliquent naturellement tous les contes qu'il nous a faits, et ses

disparitions inexplicables durant des journées et des semaines entières;

car il est bon de vous dire que ce fait-là s'est renouvelé plusieurs

fois, et qu'il est impossible de supposer qu'il se soit accompli hors du

château. Toutes les fois qu'il a disparu ainsi, il est resté