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la chanoinesse, dont les oreilles s'ouvraient d'heure en heure, le soin
de les enregistrer, de les commenter, et d'y trouver une lumière
terrible.
FIN DU PREMIER VOLUME.
CONSUELO
PAR
GEORGE SAND
TOME DEUXIÈME
1856
XL.
Cependant, en se voyant surveillée par Wenceslawa comme elle ne l'avait
jamais été, Consuelo craignit d'être contrariée par un zèle malentendu,
et se composa un maintien plus froid, grâce auquel il lui fut possible,
dans la journées, d'échapper à son attention, et de prendre, d'un pied
léger, la route du Schreckenstein. Elle n'avait pas d'autre idée dans ce
moment que de rencontrer Zdenko, de l'amener à une explication, et de
savoir définitivement s'il voulait la conduire auprès d'Albert. Elle le
trouva assez près du château, sur le sentier qui menait au Schreckenstein.
Il semblait venir à sa rencontre, et lui adressa la parole en bohémien
avec beaucoup de volubilité.
«Hélas! je ne te comprends pas, lui dit Consuelo lorsqu'elle put placer
un mot; je sais à peine l'allemand, cette dure langue que tu hais comme
l'esclavage et qui est triste pour moi comme l'exil. Mais, puisque nous
ne pouvons nous entendre autrement, consens à la parler avec moi; nous
la parlons aussi mal l'un que l'autre: je te promets d'apprendre le
bohémien, si tu veux me l'enseigner.»
A ces paroles qui lui étaient sympathiques, Zdenko devint sérieux, et
tendant à Consuelo une main sèche et calleuse qu'elle n'hésita point à
serrer dans la sienne:
«Bonne fille de Dieu, lui dit-il en allemand, je t'apprendrai ma langue
et toutes mes chansons. Laquelle veux-tu que je te dise pour commencer?»
Consuelo pensa devoir se prêter à sa fantaisie en se servant des mêmes
figures pour l'interroger.
«Je veux que tu me chantes, lui dit-elle, la ballade du comte Albert.
--Il y a, répondit-il, plus de deux cent mille ballades sur mon frère
Albert. Je ne puis pas te les apprendre; tu ne les comprendrais pas.
J'en fais tous les jours de nouvelles, qui ne ressemblent jamais aux
anciennes. Demande-moi toute autre chose.
--Pourquoi ne te comprendrais-je pas? Je suis la consolation. Je me nomme
Consuelo pour toi, entends-tu? et pour le comte Albert qui seul ici me
connaît.
--Toi, Consuelo? dit Zdenko avec un rire moqueur. Oh! tu ne sais ce que
tu dis. _La délivrance est enchaînée...._
--Je sais cela. _La consolation est impitoyable_. Mais toi, tu ne
sais rien, Zdenko. La délivrance a rompu ses chaînes, la consolation a
brisé ses fers.
--Mensonge, mensonge! folies, paroles allemandes! reprit Zdenko en
réprimant ses rires et ses gambades. Tu ne sais pas chanter.
--Si fait, je sais chanter, repartit Consuelo. Tiens, écoute.»