37603.fb2 Consuelo - читать онлайн бесплатно полную версию книги . Страница 293

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jugement. Maintenant que vous m'avez tout confié avec un si noble

abandon....

--Pardon, monseigneur, dit Consuelo; je ne vous ai pas dit tout ce qui

me concerne, car vous ne me l'avez pas demandé. J'ignore le motif de

l'intérêt que vous daignez prendre aujourd'hui à mon existence. Je présume

que quelqu'un a parlé de moi ici d'une manière plus ou moins défavorable,

et que vous voulez savoir si ma présence ne déshonore pas votre maison.

Jusqu'ici, comme vous ne m'aviez interrogée que sur des choses

très-superficielles, j'aurais cru manquer à la modestie qui convient

à mon rôle en vous entretenant de moi sans votre permission; mais

puisque vous paraissez vouloir me connaître à fond, je dois vous dire

une circonstance qui me fera peut-être du tort dans votre esprit.

Non-seulement il serait possible, comme vous l'avez souvent présumé (et

quoique je n'en aie nulle envie maintenant), que je vinsse à embrasser

la carrière du théâtre; mais encore il est avéré que j'ai débuté à Venise,

à la saison dernière, sous le nom de Consuelo ... On m'avait surnommée la

Zingarella, et tout Venise connaît ma figure et ma voix.

--Attendez donc! s'écria le comte, tout étourdi de cette nouvelle

révélation. Vous seriez cette merveille dont on a fait tant de bruit à

Venise l'an dernier, et dont les gazettes italiennes ont fait mention

Plusieurs fois avec de si pompeux éloges? La plus belle voix, le plus beau

talent qui, de mémoire d'homme, se soit révélé....

--Sur le théâtre de San-Samuel, monseigneur. Ces éloges sont sans doute

bien exagérés; mais il est un fait incontestable, c'est que je suis cette

même Consuelo, que j'ai chanté dans plusieurs opéras, que je suis actrice,

en un mot, ou, comme on dit plus poliment, cantatrice. Voyez maintenant si

je mérite de conserver votre bienveillance.

Voilà des choses bien extraordinaires et un destin bizarre! dit le comte

absorbé dans ses réflexions. Avez-vous dit tout cela ici à ... à quelque

autre que moi, mon enfant?

--J'ai à peu près tout dit au comte votre fils, monseigneur, quoique je ne

sois pas entrée dans les détails que vous venez d'entendre.

--Ainsi, Albert connaît votre extraction, votre ancien amour, votre

profession?

--Oui, monseigneur.

--C'est bien, ma chère signora. Je ne puis trop vous remercier de

l'admirable loyauté de votre conduite à notre égard, et je vous promets

que vous n'aurez pas lieu de vous en repentir. Maintenant, Consuelo...

(oui, je me souviens que c'est le nom qu'Albert vous a donné dès le

commencement, lorsqu'il vous parlait espagnol), permettez-moi de me

recueillir un peu. Je me sens fort ému. Nous avons encore bien des choses

à nous dire, mon enfant, et il faut que vous me pardonniez un peu de

trouble à l'approche d'une décision aussi grave. Faites-moi la grâce de

m'attendre ici un instant.»

Il sortit, et Consuelo, le suivant des yeux, le vit, à travers les portes

dorées garnies de glaces, entrer dans son oratoire et s'y agenouiller avec

ferveur.

En proie à une vive agitation, elle se perdait en conjectures sur la suite

d'un entretien qui s'annonçait avec tant de solennité. D'abord, elle avait

pensé qu'en l'attendant, Anzoleto, dans son dépit, avait déjà fait ce dont