37603.fb2 Consuelo - читать онлайн бесплатно полную версию книги . Страница 311

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autre est heureux, et qu'il faut que je parte. Je partirai la mort dans

l'âme, et le reste de ma vie est dévoué aux furies! Mais ne me chasse pas

sans m'avoir dit un mot de pitié, un mot d'adieu. Si tu n'y consens pas,

je partirai dès la pointe du jour, et ce sera fait de moi pour jamais!

--Ne dites pas cela, Anzoleto. Nous devons nous quitter ici, nous dire un

éternel adieu. Je vous pardonne, et je vous souhaite....

--Un bon voyage! reprit-il avec ironie; puis, reprenant aussitôt son ton

hypocrite: Tu es impitoyable, Consuelo. Tu veux que je sois perdu, qu'il

ne reste pas en moi un bon sentiment, un bon souvenir. Que crains-tu?

Ne t'ai-je pas prouvé mille fois mon respect et la pureté de mon amour?

Quand on aime éperdument, n'est-on pas esclave, et ne sais-tu pas qu'un

mot de toi me dompte et m'enchaîne? Au nom du ciel, si tu n'es pas la

maîtresse de cet homme que tu vas épouser, s'il n'est pas le maître de ton

appartement et le compagnon inévitable de toutes tes nuits...

--Il ne l'est pas, il ne le fut jamais,» dit Consuelo avec l'accent de la

fière innocence.

Elle eût mieux fait de réprimer ce mouvement d'un orgueil bien fondé, mais

trop sincère en cette occasion. Anzoleto n'était pas poltron; mais il

aimait la vie, et s'il eût cru trouver dans la chambre de Consuelo un

gardien déterminé, il fût resté fort paisiblement dans la sienne. L'accent

de vérité qui accompagna la réponse de la jeune fille l'enhardit tout à

fait.

«En ce cas, dit-il, je ne compromets pas ton avenir. Je serai si prudent,

si adroit, je marcherai si légèrement, je te parlerai si bas, que ta

réputation ne sera pas ternie. D'ailleurs, ne suis-je pas ton frère?

Devant partir à l'aube du jour, qu'y aurait-il d'extraordinaire à ce que

j'aille te dire adieu?

--Non! non! ne venez pas! dit Consuelo épouvantée. L'appartement du

comte Albert n'est pas éloigné; peut-être a-t-il tout deviné... Anzoleto,

si vous vous exposez... je ne réponds pas de votre vie. Je vous parle

sérieusement, et mon sang se glace dans mes veines!»

Anzoleto sentit en effet sa main, qu'il avait prise dans la sienne,

devenir plus froide que le marbre.

«Si tu discutes, si tu parlementes à ta porte, tu exposes mes jours,

dit-il en souriant; mais si ta porte est ouverte, si nos baisers sont

muets, nous ne risquons rien. Rappelle-toi que nous avons passé des nuits

ensemble sans éveiller un seul des nombreux voisins de la Corte-Minelli.

Quant à moi, s'il n'y a pas d'autre obstacle que la jalousie du comte, et

pas d'autre danger que la mort....»

Consuelo vit en cet instant le regard du comte Albert, ordinairement si

vague, redevenir clair et profond en s'attachant sur Anzoleto. Il ne

pouvait entendre; mais il semblait qu'il entendit avec les yeux. Elle

retira sa main de celle d'Anzoleto, en lui disant d'une voix étouffée:

«Ah! si tu m'aimes, ne brave pas cet homme terrible!

--Est-ce pour toi que tu crains dit Anzoleto rapidement.

--Non, mais pour tout ce qui m'approche et me menace.

--Et pour tout ce qui t'adore, sans doute? Eh bien, soit. Mourir à tes

yeux, mourir à tes pieds; oh! je ne demande que cela. J'y serai à minuit;

résiste, et tu ne feras que hâter ma perte.

--Vous partez demain, et vous ne prenez congé de personne? dit Consuelo en