37603.fb2 Consuelo - читать онлайн бесплатно полную версию книги . Страница 32

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apercevoir, Anzoleto, retenu d'ailleurs par sa paresse, était devenu en

musique un étrange composé de savoir et d'ignorance, d'inspiration et de

frivolité, de puissance et de gaucherie, d'audace et de faiblesse, qui

avait plongé, à la dernière audition, le Porpora dans un dédale de

méditations et de conjectures. Ce maître ne savait point le secret de

toutes ces richesses dérobées à Consuelo; car ayant une fois sévèrement

grondé la petite de son intimité avec ce grand vaurien, il ne les avait

jamais revus ensemble. Consuelo, qui tenait à conserver les bonnes

grâces de son professeur, avait eu soin de ne jamais se montrer devant

lui en compagnie d'Anzoleto, et du plus loin qu'elle l'apercevait dans

la rue, si Anzoleto était avec elle, leste comme un jeune chat, elle se

cachait derrière une colonne ou se blottissait dans une gondole.

Ces précautions continuèrent lorsque Consuelo, devenue garde-malade, et

Anzoleto ne pouvant plus supporter son absence, sentant la vie,

l'espoir, l'inspiration et jusqu'au souffle lui manquer, revint partager

sa vie sédentaire, et affronter avec elle tous les soirs les âcretés et

les emportements de la moribonde. Quelques mois avant d'en finir, cette

malheureuse femme perdit l'énergie de ses souffrances, et, vaincue par

la piété de sa fille, sentit son âme s'ouvrir à de plus douces émotions.

Elle s'habitua à recevoir les soins d'Anzoleto, qui, malgré son peu de

vocation pour ce rôle de dévouement, s'habitua de son côté à une sorte

de zèle enjoué et de douceur complaisante envers la faiblesse et la

souffrance. Anzoleto avait le caractère égal et les manières

bienveillantes. Sa persévérance auprès d'elle et de Consuelo gagna enfin

son coeur, et, à son heure dernière, elle leur fit jurer de ne se

quitter jamais. Anzoleto le promit, et même il éprouva en cet instant

solennel une sorte d'attendrissement sérieux qu'il ne connaissait pas

encore. La mourante lui rendit cet engagement plus facile en lui disant:

Qu'elle soit ton amie, ta soeur, ta maîtresse ou ta femme, puisqu'elle ne

connaît que toi et n'a jamais voulu écouter que toi, ne l'abandonne pas.

--Puis, croyant donner à sa fille un conseil bien habile et bien

salutaire, sans trop songer s'il était réalisable ou non, elle lui avait

fait jurer en particulier, ainsi qu'on l'a vu déjà, de ne jamais

s'abandonner à son amant avant la consécration religieuse du mariage.

Consuelo l'avait juré, sans prévoir les obstacles que le caractère

indépendant et irréligieux d'Anzoleto pourrait apporter à ce projet.

Devenue orpheline, Consuelo avait continué de travailler à l'aiguille

pour vivre dans le présent, et d'étudier la musique pour s'associer à

l'avenir d'Anzoleto. Depuis deux ans qu'elle vivait seule dans son

grenier, il avait continué à la voir tous les jours, sans éprouver pour

elle aucune passion, et sans pouvoir en éprouver pour d'autres femmes,

tant la douceur de son intimité et l'_agrément de vivre auprès d'elle_

lui semblaient préférables à tout.

Sans se rendre compte des hautes facultés de sa compagne, il avait

acquis désormais assez de goût et de discernement pour savoir qu'elle

avait plus de science et de moyens qu'aucune des cantatrices de

San-Samuel et que la Corilla elle-même. À son affection d'habitude

s'était donc joint l'espoir et presque la certitude d'une association

d'intérêts, qui rendrait leur existence profitable et brillante avec le

temps. Consuelo n'avait guère coutume de penser à l'avenir. La