37603.fb2 Consuelo - читать онлайн бесплатно полную версию книги . Страница 339

Consuelo - читать онлайн бесплатно полную версию книги . Страница 339

mais, n'ayant personne pour me guider dans la prononciation, je n'ose pas

articuler un seul mot devant vous. Cependant je comprends ce que je lis, et

si, pendant notre voyage, vous étiez assez bonne pour me forcer à secouer

ma mauvaise honte, et pour me reprendre à chaque syllabe, il me semble que

j'aurais l'oreille assez musicale pour que votre peine ne fût pas perdue.

--Oh! de tout mon coeur, répondit Consuelo. J'aime qu'on ne perde pas

un seul des précieux instants de la vie pour s'instruire; et comme on

s'instruit soi-même en enseignant, il ne peut être que très-bon pour nous

deux de nous exercer à bien prononcer la langue musicale par excellence.

Vous me croyez Italienne, et je ne le suis pas, quoique j'aie très-peu

d'accent dans cette langue. Mais je ne la prononce vraiment bien qu'en

chantant; et quand je voudrai vous faire saisir l'harmonie des sons

italiens, je chanterai les mots qui vous présenteront des difficultés.

Je suis persuadée qu'on ne prononce mal que parce qu'on entend mal. Si

votre oreille perçoit complètement les nuances, ce ne sera plus pour vous

qu'une affaire de mémoire de les bien répéter.

--Ce sera donc à la fois une leçon d'italien et une leçon de chant! s'écria

Joseph.--Et une leçon qui durera cinquante lieues! pensa-t-il dans son

ravissement. Ah! ma foi, vive l'art! le moins dangereux, le moins ingrat

de tous les amours!»

La leçon commença sur l'heure, et Consuelo, qui eut d'abord de la peine

A ne pas éclater de rire à chaque mot que Joseph disait en italien,

s'émerveilla bientôt de la facilité et de la justesse avec lesquelles il

se corrigeait. Cependant le jeune musicien, qui souhaitait avec ardeur

d'entendre la voix de la cantatrice, et qui n'en voyait pas venir

l'occasion assez vite, la fit naître par une petite ruse. Il feignit

d'être embarrassé de donner à l'_à_ italien la franchise et la netteté

convenables, et il chanta une phrase de Leo où le mot _felicità_ se

trouvait répété plusieurs fois. Aussitôt Consuelo, sans s'arrêter, et sans

être plus essoufflée que si elle eût été assise à son piano, lui chanta

la phrase à plusieurs reprises. A cet accent si généreux et si pénétrant

qu'aucun autre ne pouvait, à cette époque, lui être comparé dans le monde,

Joseph sentit un frisson passer dans tout son corps, et froissa ses mains

l'une contre l'autre avec un mouvement convulsif et une exclamation

passionnée.

«A votre tour, essayez donc,» dit Consuelo sans s'apercevoir de ses

transports.

Haydn essaya la phrase et la dit si bien que son jeune professeur battit

des mains.

«C'est à merveille, lui dit-elle avec un accent de franchise et de bonté.

Vous apprenez vite, et vous avez une voix magnifique.

--Vous pouvez me dire là-dessus tout ce qu'il vous plaira, répondit Joseph;

mais moi je sens que je ne pourrai jamais vous rien dire de vous-même.

--Et pourquoi donc?» dit Consuelo.

Mais, en se retournant vers lui, elle vit qu'il avait les yeux gros

de larmes, et qu'il serrait encore ses mains, en faisant craquer les

phalanges, comme un enfant folâtre et comme un homme enthousiaste.

«Ne chantons plus, lui dit-elle. Voici des cavaliers qui viennent à notre

rencontre.

--Ah! mon Dieu, oui, taisez-vous! s'écria Joseph tout hors de lui. Qu'ils