37603.fb2 Consuelo - читать онлайн бесплатно полную версию книги . Страница 372

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soigneusement la figure, dont il ne laissa passer qu'un oeil.

«Êtes-vous blessé? dit le comte.

--Non, répondit-il en rabattant son chapeau sur son visage; mais si nous

rencontrons ces prétendus brigands, je ne me soucie pas d'être reconnu.

Je ne suis déjà pas très-bien dans les papiers de mon gracieux souverain:

il ne me manquerait plus que cela!

--Je comprends ce dont il s'agit, reprit le comte; mais soyez sans crainte,

je prends tout sur moi.

--Cela peut sauver ce déserteur des verges et de la potence, mais non pas

moi d'une disgrâce. N'importe! on ne sait pas ce qui peut arriver; il faut

obliger ses semblables à tout risque. Voyons, malheureux! peux-tu tenir sur

tes jambes! Pas trop, à ce que je vois. Tu es blessé?

--J'ai reçu beaucoup de coups, il est vrai, mais je ne les sens plus.

--Enfin, peux-tu déguerpir?

--Oh! oui, monsieur l'aide de camp.

--Ne m'appelle pas ainsi, drôle, tais-toi; va-t'en! Et nous, cher comte,

faisons de même: il me tarde d'avoir quitté ce bois. J'ai abattu un des

recruteurs; si le roi le savait, mon affaire serait bonne!... quoique après

tout, je m'en moque! ajouta-t-il en levant les épaules.

--Hélas, dit Consuelo, tandis que Joseph passait sa gourde au déserteur, si

on l'abandonne ici, il sera bientôt repris. Il a les pieds enflés par les

cordes, et peut à peine se servir de ses mains. Voyez, comme il est pâle

et défait!

--Nous ne l'abandonnerons pas, dit le comte qui avait les yeux attachés

sur Consuelo. Franz, descendez de cheval, dit-il à son domestique; et,

s'adressant au déserteur:--Monte sur cette bête, je te la donne, et ceci

encore, ajouta-t-il en lui jetant sa bourse. As-tu la force de gagner

l'Autriche?

--Oui, oui, Monseigneur!

--Veux-tu aller à Vienne?

--Oui, Monseigneur.

--Veux-tu reprendre du service?

--Oui, Monseigneur, pourvu que ce ne soit pas en Prusse.

--Va-t'en trouver Sa Majesté l'impératrice-reine: elle reçoit tout le monde

un jour par semaine. Dis-lui que c'est le comte Hoditz qui lui fait présent

d'un très-beau grenadier, parfaitement dressé à la prussienne.

--J'y cours, Monseigneur.

--Et n'aie jamais le malheur de nommer M. le baron, ou je te fais prendre

par mes gens, et je te renvoie en Prusse.

--J'aimerais mieux mourir tout de suite. Oh! si les misérables m'avaient

laissé l'usage des mains, je me serais tué quand ils m'ont repris.

--Décampe!

Oui, Monseigneur.»

Il acheva d'avaler le contenu de la gourde, la rendit à Joseph, l'embrassa,

sans savoir qu'il lui devait un service bien plus important, se prosterna

devant le comte et le baron, et, sur un geste d'impatience de celui-ci qui

lui coupa la parole, il fit un grand signe de croix, baisa la terre, et

monta à cheval avec l'aide des domestiques, car il ne pouvait remuer les

pieds; mais à peine fut-il en selle, que, reprenant courage et vigueur, il

piqua des deux et se mit à courir bride abattue sur la route du midi.