37603.fb2 Consuelo - читать онлайн бесплатно полную версию книги . Страница 418

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d'une femme sans foi et sans entrailles, subissant, avec des imprécations

et des blasphèmes, l'auguste martyre de la maternité. La chaste et pieuse

enfant frissonnait à la vue de ces tortures que rien ne pouvait adoucir,

puisqu'au lieu d'une sainte joie et d'une religieuse espérance, le

déplaisir et la colère remplissaient le coeur de Corilla. Elle ne cessait

de maudire sa destinée, son voyage, le chanoine et sa gouvernante, et

jusqu'à l'enfant qu'elle allait mettre au monde. Elle brutalisait sa

suivante, et achevait de la rendre incapable de tout service intelligent.

Enfin elle s'emporta contre cette pauvre fille, au point de lui dire:

«Va, je te soignerai de même, quand tu passeras par la même épreuve; car

toi aussi tu es grosse, je le sais fort bien, et je t'enverrai accoucher à

l'hôpital. Ote-toi de devant mes yeux: tu me gênes et tu m'irrites.»

La Sofia, furieuse et désolée, s'en alla pleurer dehors; et Consuelo,

restée seule avec la maîtresse d'Anzoleto et de Zustiniani, essaya de la

calmer et de la secourir. Au milieu de ses tourments et de ses fureurs,

la Corilla conservait une sorte de courage brutal et de force sauvage qui

dévoilaient toute l'impiété de sa nature fougueuse et robuste. Lorsqu'elle

éprouvait un instant de répit, elle redevenait stoïque et même enjouée.

«Parbleu! dit-elle tout d'un coup à Consuelo, qu'elle ne reconnaissait

pas du tout, ne l'ayant jamais vue que de loin ou sur la scène dans des

costumes bien différents de celui qu'elle portait en cet instant, voilà

une belle aventure, et bien des gens ne voudront pas me croire quand je

leur dirai que je suis accouchée dans un cabaret avec un médecin de ton

espèce; car tu m'as l'air d'un petit zingaro, toi, avec ta mine brune et

ton grand oeil noir. Qui es-tu? d'où sors-tu? comment te trouves-tu ici,

et pourquoi me sers-tu? Ah! tiens, ne me le dis pas, je ne pourrais pas

t'entendre, je souffre trop. Ah! _misera, me!_ Pourvu que je ne meure

pas! Oh non! je ne mourrai pas! je ne veux pas mourir! Zingaro, tu ne

m'abandonnes pas? reste là, reste là, ne me laisse pas mourir, entends-tu

bien?»

Et les cris recommençaient, entrecoupés de nouveaux blasphèmes.

«Maudit enfant! disait-elle, je voudrais t'arracher de mon flanc, et te

jeter loin de moi!

--Oh! ne dites pas cela! s'écria Consuelo glacée d'épouvante; vous

allez être mère, vous allez être heureuse de voir votre enfant, vous ne

regretterez pas d'avoir souffert!

--Moi? dit la Corilla avec un sang-froid cynique, tu crois que j'aimerai

cet enfant-là! Ah! que tu te trompes! Le beau plaisir que d'être mère,

comme si je ne savais pas ce qui en est! Souffrir pour accoucher,

travailler pour nourrir ces malheureux que leurs pères renient, les

voir souffrir eux-mêmes, ne savoir qu'en faire, souffrir pour les

abandonner... car, après tout, on les aime... mais je n'aimerai pas

celui-là. Oh! je jure Dieu que je ne l'aimerai pas! que je le haïrai comme

je hais son père!...»

Et Corilla, dont l'air froid et amer cachait un délire croissant, s'écria

dans un de ces mouvements exaspérés qu'une souffrance atroce inspire aux

femmes:

«Ah! maudit! trois fois maudit soit le père de cet enfant-là!»

Des cris inarticulés la suffoquèrent, elle mit en pièces le fichu qui

cachait son robuste sein pantelant de douleur et de rage; et, saisissant