37603.fb2 Consuelo - читать онлайн бесплатно полную версию книги . Страница 426

Consuelo - читать онлайн бесплатно полную версию книги . Страница 426

A quoi servirait donc une vie de sagesse et de dignité, si elle n'assurait

pas le calme de la conscience et la liberté des bonnes actions? Voyez, cet

enfant vous est confié, mon révérend. S'il est mal soigné loin de vos yeux,

s'il languit, s'il meurt, vous vous le reprocherez éternellement!

--Que dis-tu là, que cet enfant m'est confié? en ai-je accepté le dépôt?

et le caprice ou la fourberie d'autrui nous imposent-ils de pareils

devoirs? Tu t'exaltes, mon enfant, et tu déraisonnes.

--Non, mon cher monsieur le chanoine, reprit Consuelo en s'animant de plus

en plus; je ne déraisonne pas. La méchante mère qui abandonne ici son

enfant n'a aucun droit et ne peut rien vous imposer. Mais celui qui a droit

de vous commander, celui qui dispose des destinées de l'enfant naissant,

celui envers qui vous serez éternellement responsable, c'est Dieu. Oui,

c'est Dieu qui a eu des vues particulières de miséricorde sur cette

innocente petite créature en inspirant à sa mère la pensée hardie de vous

le confier. C'est lui qui, par un bizarre concours de circonstances, le

fait entrer dans votre maison malgré vous, et le pousse dans vos bras en

dépit de toute votre prudence. Ah! monsieur le chanoine, rappelez-vous

l'exemple de saint Vincent de Paul, qui allait ramassant sur les marches

des maisons les pauvres orphelins abandonnés, et ne rejetez pas celui

que la Providence apporte dans votre sein. Je crois bien que si vous

le faisiez, cela vous porterait malheur; et le monde, qui a une sorte

d'instinct de justice dans sa méchanceté même, dirait, avec une apparence

de vérité, que vous avez eu des raisons pour l'éloigner de vous. Au lieu

que si vous le gardez, on ne vous en supposera pas d'autres que les

véritables: votre miséricorde et votre charité.

--Tu ne sais pas, dit le chanoine ébranlé et incertain, ce que c'est que

le monde! Tu es un enfant sauvage de droiture et de vertu. Tu ne sais pas

surtout ce que c'est que le clergé, et Brigide, la méchante Brigide, savait

bien ce qu'elle disait hier, en prétendant que certaines gens étaient

jaloux de ma position, et travaillaient à me la faire perdre. Je tiens mes

bénéfices de la protection de feu l'empereur Charles, qui a bien voulu me

servir de patron pour me les faire obtenir. L'impératrice Marie-Thérèse

m'a protégé aussi pour me faire passer jubilaire avant l'âge. Eh bien, ce

que nous croyons tenir de l'Église ne nous est jamais assuré absolument.

Au-dessus de nous, au-dessus des souverains qui nous favorisent, nous avons

toujours un maître, c'est l'Église. Comme elle nous déclare _capables_

quand il lui plaît, alors même que nous ne le sommes pas, elle nous

déclare _incapables_ quand il lui convient, alors même que nous lui avons

rendu les plus grands services. _L'ordinaire_, c'est-à-dire l'évêque

diocésain, et son conseil, si on les indispose et si on les irrite contre

nous, peuvent nous accuser, nous traduire à leur barre, nous juger et

nous dépouiller, sous prétexte d'inconduite, d'irrégularité de moeurs ou

d'exemples scandaleux, afin de reporter sur de nouvelles créatures les dons

qu'ils s'étaient laissé arracher pour nous. Le ciel m'est témoin que ma vie

est aussi pure que celle de cet enfant qui est né hier. Eh bien, sans une

extrême prudence dans toutes mes relations, ma vertu n'eût pas suffi à me

défendre des mauvaises interprétations. Je ne suis pas très-courtisan

envers les prélats; mon indolence, et un peu l'orgueil de ma naissance

peut-être, m'en ont toujours empêché. J'ai des envieux dans le chapitre...

--Mais vous avez pour vous Marie-Thérèse, qui est une grande âme, une noble