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la fenêtre à l'instant même.»

Consuelo essaya de le dissuader de ces préventions; mais elle les trouva

si obstinées, qu'elle y renonça, et, se penchant un peu à la fenêtre,

dans un moment où son maître avait le dos tourné, elle fit avec ses doigts

un premier signe, et puis un second. Joseph, qui rôdait dans la rue en

attendant ce signal convenu, comprit que le premier mouvement des doigts

lui disait de renoncer à tout espoir d'être admis comme élève auprès du

Porpora; le second l'avertissait de ne pas paraître avant une demi-heure.

Consuelo parla d'autre chose, pour faire oublier au Porpora ce qu'elle

venait de lui dire; et, la demi-heure écoulée, Joseph frappa à la porte.

Consuelo alla lui ouvrir, feignit de ne pas le connaître, et revint

annoncer au maestro que c'était un domestique qui se présentait pour

entrer à son service.

«Voyons ta figure! cria le Porpora au jeune homme tremblant; approche!

Qui t'a dit que j'eusse besoin d'un domestique? Je n'en ai aucun besoin.

--Si vous n'avez pas besoin de domestique, répondit Joseph éperdu, mais

faisant bonne contenance comme Consuelo le lui avait recommandé, c'est bien

malheureux pour moi, Monsieur; car j'ai bien besoin de trouver un maître.

--On dirait qu'il n'y a que moi qui puisse te faire gagner ta vie! Répliqua

le Porpora. Tiens, regarde mon appartement et mon mobilier; crois-tu que

j'aie besoin d'un laquais pour arranger tout cela?

--Eh! vraiment oui, Monsieur, vous en auriez besoin, reprit Haydn en

affectant une confiante simplicité; car tout cela est fort mal en ordre.»

En parlant ainsi, il se mit tout de suite à la besogne, et commença à

ranger la chambre avec une symétrie et un sang-froid apparent qui donnèrent

envie de rire au Porpora. Joseph jouait le tout pour le tout; car si son

zèle n'eût diverti le maître, il eût fort risqué d'être payé à coups de

canne.

Voilà un drôle de corps, qui veut me servir malgré moi, dit le Porpora en

le regardant faire. Je te dis, idiot, que je n'ai pas le moyen de payer un

domestique. Continueras-tu à faire l'empressé?

--Qu'à cela ne tienne, Monsieur! Pourvu que vous me donniez vos vieux

habits, et un morceau de pain tous les jours, je m'en contenterai. Je suis

si misérable, que je me trouverai fort heureux de ne pas mendier mon pain.

--Mais pourquoi n'entres-tu pas dans une maison riche?

--Impossible, Monsieur; on me trouve trop petit et trop laid. D'ailleurs,

je n'entends rien à la musique, et vous savez que tous les grands seigneurs

d'aujourd'hui veulent que leurs laquais sachent faire une petite partie de

viole ou de flûte pour la musique de chambre. Moi, je n'ai jamais pu me

fourrer une note de musique dans la tête.

--Ah! ah! tu n'entends rien à la musique. Eh bien, tu es l'homme qu'il

me faut. Si tu te contentes de la nourriture et des vieux habits, je te

prends; car, aussi bien, voilà ma fille qui aura besoin d'un garçon

diligent pour faire ses commissions. Voyons! que sais-tu faire? Brosser

les habits, cirer les souliers, balayer, ouvrir et fermer la porte?

--Oui, Monsieur, je sais faire tout cela.

--Eh bien, commence. Prépare-moi l'habit que tu vois étendu sur mon lit,

car je vais dans une heure chez l'ambassadeur. Tu m'accompagneras,

Consuelo. Je veux te présenter à monsignor Corner, que tu connais déjà,

et qui vient d'arriver des eaux avec la signora. Il y a là-bas une petite