37603.fb2 Consuelo - читать онлайн бесплатно полную версию книги . Страница 455

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seront envolés!

--Je ne te quitterai jamais, je serai toujours ta fille et ta servante,»

dit Consuelo en lui jetant ses bras autour du cou.

Le Porpora enfonça sa tête chauve dans son cahier et fondit en larmes.

Consuelo et Joseph pleuraient aussi, et Keller, que la passion de la

musique avait retenu jusque-là, et qui, pour motiver sa présence,

s'occupait à arranger la perruque du maître dans l'antichambre, voyant,

par la porte entr'ouverte, le tableau respectable et déchirant de sa

douleur, la piété filiale de Consuelo, et l'enthousiasme qui commençait

à faire battre le coeur de Joseph pour l'illustre vieillard, laissa tomber

son peigne, et prenant la perruque du Porpora pour un mouchoir, il la porta

à ses yeux, plongé qu'il était dans une sainte distraction.

Pendant quelques jours Consuelo fut retenue à la maison par un rhume. Elle

avait bravé, pendant ce long et aventureux voyage, toutes les intempéries

de l'air, tous les caprices de l'automne, tantôt brûlant, tantôt pluvieux

et froid, suivant les régions diverses qu'elle avait traversées. Vêtue à

la légère, coiffée d'un chapeau de paille, n'ayant ni manteau ni habits de

rechange lorsqu'elle était mouillée, elle n'avait pourtant pas eu le plus

léger enrouement. A peine fut-elle claquemurée dans ce logement sombre,

humide et mal aéré du Porpora, qu'elle sentit le froid et le malaise

paralyser son énergie et sa voix. Le Porpora eut beaucoup d'humeur de

ce contretemps. Il savait que pour obtenir à son élève un engagement au

théâtre Italien, il fallait se hâter; car madame Tesi, qui avait désiré

se rendre à Dresde, paraissait hésiter, séduite par les instances de

Caffariello et les brillantes propositions de Holzbaüer, jaloux d'attacher

au théâtre impérial une cantatrice aussi célèbre. D'un autre côté, la

Corilla, encore retenue au lit par les suites de son accouchement, faisait

intriguer auprès des directeurs ceux de ses amis qu'elle avait retrouvés à

Vienne, et se faisait fort de débuter dans huit jours si on avait besoin

d'elle. Le Porpora désirait ardemment que Consuelo fût engagée, et pour

elle-même, et pour le succès de l'opéra qu'il espérait faire accepter avec

elle.

Consuelo, pour sa part, ne savait à quoi se résoudre. Prendre un

engagement, c'était reculer le moment possible de sa réunion avec Albert;

c'était porter l'épouvante et la consternation chez les Rudolstadt, qui ne

s'attendaient certes pas à ce qu'elle reparût sur la scène; c'était, dans

leur opinion, renoncer à l'honneur de leur appartenir, et signifier au

jeune comte qu'elle lui préférait la gloire et la liberté. D'un autre

côté, refuser cet engagement, c'était détruire les dernières espérances

du Porpora; c'était lui montrer, à son tour, cette ingratitude qui avait

fait le désespoir et le malheur de sa vie; c'était enfin lui porter un coup

de poignard. Consuelo, effrayée de se trouver dans cette alternative, et

voyant qu'elle allait frapper un coup mortel, quelque parti qu'elle pût

prendre, tomba dans un morne chagrin. Sa robuste constitution la préserva

d'une indisposition sérieuse; mais durant ces quelques jours d'angoisse

et d'effroi, en proie à des frissons fébriles, à une pénible langueur,

accroupie auprès d'un maigre feu, ou se traînant d'une chambre à l'autre

pour vaquer aux soins du ménage, elle désira et espéra tristement qu'une

maladie grave vînt la soustraire aux devoirs et aux anxiétés de sa

situation.