37603.fb2 Consuelo - читать онлайн бесплатно полную версию книги . Страница 458

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--Après ce que je t'ai raconté du caractère et de la santé d'Albert,

comment peux-tu me faire une pareille question? Lui, qui ne peut supporter

la figure d'un indifférent, comment affronterait-il cette foule de méchants

et de sots qu'on appelle le monde? Et quelle ironie, quel éloignement,

quel mépris, le monde ne prodiguerait-il pas à cet homme saintement

fanatique, qui ne comprend rien à ses lois, à ses moeurs et à ses

habitudes! Tout cela est aussi hasardeux à tenter sur Albert que ce que

j'essaie maintenant en cherchant à me faire oublier de lui.

--Soyez certaine cependant que tous les maux lui paraîtraient plus légers

que votre absence. S'il vous aime véritablement, il supportera tout; et

s'il ne vous aime pas assez pour tout supporter et tout accepter, il vous

oubliera.

--Aussi j'attends et ne décide rien. Donne-moi du courage, Beppo, et reste

près de moi, afin que j'aie du moins un coeur où je puisse répandre ma

peine, et à qui je puisse demander de chercher avec moi l'espérance.

--O ma soeur! sois tranquille; s'écriait Joseph; si je suis assez heureux

pour te donner cette légère consolation, je supporterai tranquillement les

bourrasques du Porpora; je me laisserai même battre par lui, si cela peut

le distraire du besoin de te tourmenter et de t'affliger.

En devisant ainsi avec Joseph, Consuelo travaillait sans cesse, tantôt à

préparer avec lui les repas communs, tantôt à raccommoder les nippes du

Porpora. Elle introduisit, un à un, dans l'appartement, les meubles qui

étaient nécessaires à son maître. Un bon fauteuil bien large et bien bourré

de crin, remplaça la chaise de paille où il reposait ses membres affaissés

par l'âge; et quand il y eut goûté les douceurs d'une sieste, il s'étonna,

et demanda, en fronçant le sourcil, d'où lui venait ce bon siège.

«C'est la maîtresse de la maison qui l'a fait monter ici, répondit

Consuelo; ce vieux meuble l'embarrassait, et j'ai consenti à le placer

dans un coin, jusqu'à ce qu'elle le redemandât.»

Les matelas du Porpora furent changés; et il ne fit, sur la bonté de

son lit, d'autre remarque que de dire qu'il avait retrouvé le sommeil

depuis quelques nuits. Consuelo lui répondit qu'il devait attribuer cette

amélioration au café et à l'abstinence d'eau-de-vie. Un matin, le Porpora,

ayant endossé une excellente robe de chambre, demanda d'un air soucieux à

Joseph où il l'avait retrouvée. Joseph, qui avait le mot, répondit qu'en

rangeant une vieille malle, il l'avait trouvée au fond.

«Je croyais ne l'avoir pas apportée ici, reprit le Porpora. C'est pourtant

bien celle que j'avais à Venise; c'est la même couleur du moins.

--Et quelle autre pourrait-ce être? répondit Consuelo qui avait eu soin

d'assortir la couleur à celle de la défunte robe de chambre de Venise.

--Eh bien, je la croyais plus usée que cela! dit le maestro en regardant

ses coudes.

--Je le crois bien! reprit-elle; j'y ai remis des manches neuves.

--Et avec quoi?

--Avec un morceau de la doublure.

--Ah! les femmes sont étonnantes pour tirer parti de tout!»

Quand l'habit neuf fut introduit, et que le Porpora l'eut porté deux jours,

quoiqu'il fût de la même couleur que le vieux, il s'étonna de le trouver

si frais; et les boutons surtout, qui étaient fort beaux, lui donnèrent

à penser.