37603.fb2 Consuelo - читать онлайн бесплатно полную версию книги . Страница 549

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version polie et décisive. Consuelo ne pouvait pas soupçonner son maître

d'une dissimulation si soutenue. Il faut croire, pour l'honneur du vieux

professeur, qu'il ne s'en tira pas merveilleusement; mais il en fallait

peu pour persuader un esprit aussi candide que celui de Consuelo. Elle

finit par croire que la lettre avait servi à allumer la pipe du Porpora

dans un moment de distraction; et, après être rentrée dans sa chambre

pour faire sa prière, et jurer sur le cyprès une éternelle amitié au

comte Albert _quand même_, elle revint tranquillement signer un

engagement de deux mois avec le théâtre de Berlin, exécutable à la fin

de celui où l'on venait d'entrer. C'était le temps plus que nécessaire

pour les préparatifs du départ et pour le voyage. Quand Porpora vit

l'encre fraîche sur le papier, il embrassa son élève, et la salua

solennellement du titre d'artiste.

«Ceci est ton jour de confirmation, lui dit-il, et s'il était en mon

pouvoir de te faire prononcer des voeux, je te dicterais celui de renoncer

pour toujours à l'amour et au mariage; car te voilà prêtresse du dieu de

l'harmonie; les Muses sont vierges, et celle qui se consacre à Apollon

devrait faire le serment des vestales.

--Je ne dois pas faire le serment de ne pas me marier, répondit Consuelo,

quoiqu'il me semble en ce moment-ci que rien ne me serait plus facile

à promettre et à tenir. Mais je puis changer d'avis, et j'aurais à me

repentir alors d'un engagement que je ne saurais pas rompre.

--Tu es donc esclave de ta parole, toi? Oui, il me semble que tu diffères

en cela du reste de l'espèce humaine, et que si tu avais fait dans ta vie

une promesse solennelle, tu l'aurais tenue.

--Maître, je crois avoir déjà fait mes preuves, car depuis que j'existe,

j'ai toujours été sous l'empire de quelque voeu. Ma mère m'avait donné le

précepte et l'exemple de cette sorte de religion qu'elle poussait jusqu'au

fanatisme. Quand nous voyagions ensemble, elle avait coutume de me dire,

aux approches des grandes villes: Consuelita, si je fais ici de bonnes

affaires, je te prends à témoin que je fais voeu d'aller pieds nus prier

pendant deux heures à la chapelle le plus en réputation de sainteté dans

le pays. Et quand elle avait fait ce qu'elle appelait de bonnes affaires,

la pauvre âme! c'est-à-dire quand elle avait gagné quelques écus avec ses

chansons, nous ne manquions jamais d'accomplir notre pèlerinage, quelque

temps qu'il fit, et à quelque distance que fût la chapelle en vogue.

Ce n'était pas de la dévotion bien éclairée ni bien sublime; mais enfin,

je regardais ces voeux comme sacrés; et quand ma mère, à son lit de mort,

me fit jurer de n'appartenir jamais à Anzoleto qu'en légitime mariage,

elle savait bien qu'elle pouvait mourir tranquille sur la foi de mon

serment. Plus tard, j'avais fait aussi, au comte Albert, la promesse de ne

point songer à un autre qu'à lui, et d'employer toutes les forces de mon

coeur à l'aimer comme il le voulait. Je n'ai pas manqué à ma parole, et

s'il ne m'en dégageait lui-même aujourd'hui, j'aurais bien pu lui rester

fidèle toute ma vie.

--Laisse là ton comte Albert, auquel tu ne dois plus songer; et puisqu'il

faut que tu sois sous l'empire de quelque voeu, dis-moi par lequel tu vas

t'engager envers moi.

--Oh! maître, fie-toi à ma raison, à mes bonnes moeurs et à mon dévouement

pour toi! ne me demande pas de serments; car c'est un joug effrayant qu'on