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cérémonie ne demandera pas de longs préparatifs. J'ai ma robe d'indienne
que je n'ai pas encore mise. Tiens, mon ami, en la faisant, je me
disais: Je n'aurai plus d'argent pour acheter ma robe de noces; et si
mon ami se décidait à m'épouser un de ces jours, je serais forcée de
porter à l'église la même qui aurait déjà été étrennée. Cela parte
malheur, à ce qu'on dit. Aussi, quand ma mère est venue en rêve me la
retirer pour la remettre dans l'armoire, elle savait bien ce qu'elle
faisait, la pauvre âme! Ainsi donc tout est prêt; demain, au lever du
soleil, nous nous jurerons fidélité. Tu attendais pour cela, méchant,
d'être sûr que je n'étais pas laide?
--Oh! Consuelo, s'écria Anzoleto avec angoisse, tu es un enfant, un
véritable enfant! Nous ne pouvons nous marier ainsi du jour au lendemain
sans qu'on le sache; car le comte et le Porpora, dont la protection nous
est encore si nécessaire, seraient fort irrités contre nous, si nous
prenions cette détermination sans les consulter, sans même les avertir.
Ton vieux maître ne m'aime pas trop, et te comte, je le sais de bonne
part, n'aime pas les cantatrices mariées. Il faudra donc que nous
gagnions du temps pour les amener à consentir à notre mariage; ou bien
il faut au moins quelques jours, si nous nous marions en secret, pour
préparer mystérieusement cette affaire délicate. Nous ne pouvons pas
courir à San-Samuel, où tout le monde nous connaît, et où il ne faudra
que la présence d'une vieille bonne femme pour que toute la paroisse en
soit avertie au bout d'une heure.
--Je n'avais pas songé à tout cela, dit Consuelo. Eh bien, de quoi me
parlais-tu donc tout à l'heure? Pourquoi, méchant, me disais-tu «Sois ma
femme» puisque tu savais que cela n'était pas encore possible? Ce n'est
pas moi qui t'en ai parlé la première, Anzoleto! Quoique j'aie pensé
bien souvent que nous étions en âge de nous marier, et que je n'eusse
jamais songé aux obstacles dont tu parles, je m'étais fait un devoir de
laisser cette décision à ta prudence, et, faut-il te le dire? à ton
inspiration; car je voyais bien, que tu n'étais pas trop pressé de
m'appeler ta femme, et je ne t'en voulais pas. Tu m'as souvent dit
qu'avant de s'établir, il fallait assurer le sort de sa famille future,
en s'assurant soi-même de quelques ressources. Ma mère le disait aussi,
et je trouve cela raisonnable. Ainsi, tout bien considéré, ce serait
encore trop tôt. Il faut que notre engagement à tous deux avec le
théâtre soit signé, n'est-ce pas? Il faut même que la faveur du public
nous soit assurée. Nous reparlerons de cela après nos débuts. Pourquoi
pâlis-tu? mon Dieu, pourquoi serres-tu ainsi les poings, Anzoleto? Ne
sommes-nous pas bien heureux? Avons-nous besoin d'être liés par un
serment pour nous aimer, et compter l'un sur l'autre?
--O Consuelo, que tu es calme, que tu es pure, et que tu es froide!
soeécria Anzoleto avec une sorte de rage.
--Moi! je suis froide! s'écria la jeune Espagnole stupéfaite et
vermeille d'indignation.
--Hélas! je t'aime comme on peut aimer une femme, et tu m'écoutes et tu
me réponds comme un enfant. Tu ne connais que l'amitié, tu ne comprends
pas l'amour. Je souffre, je brûle, je meurs à tes pieds, et tu me parles
de prêtre, de robe et de théâtre?»