38090.fb2 Elle sappelait Sarah - читать онлайн бесплатно полную версию книги . Страница 76

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Mamé. Son visage fatigué et ridé. Elle semblait endormie. Je lui parlais sans être sûre qu'elle m'entendait. Puis je sentis ses doigts serrer mon poignet. Elle s'y accrochait fort. Elle savait que j'étais là.

Derrière moi, la famille Tézac entourait le lit. Bertrand, sa mère, Colette, Édouard, Laure et Cécile. Et dans le couloir, William Rainsferd, qui hésitait à entrer. Bertrand l'avait observé une ou deux fois, intrigué. Il pensait probablement que c'était mon petit ami. En d'autres circonstances, j'aurais trouvé cela amusant. Édouard le dévisageait aussi, avec curiosité et inquiétude, allant de lui à moi avec insistance.

Ce ne fut qu'en sortant de la maison de retraite que je pris le bras de mon beau-père. Le Dr Roche venait de nous annoncer que l'état de Mamé était stable, mais qu'elle restait faible. Il ne se prononçait pas sur l'avenir. Nous devions cependant nous préparer au pire, selon lui. Nous convaincre que la fin était proche.

« Cela me rend si triste, Édouard », murmurai-je.

Il me caressa la joue.

« Ma mère vous aime beaucoup, Julia. Elle vous aime tendrement. »

Bertrand apparut, le visage sombre. En le voyant, je pensai soudain à Amélie. J'avais envie d'être blessante, de le piquer au vif, mais je laissai tomber. Après tout, nous aurions le temps d'en parler plus tard. C'était sans importance maintenant. Seule Mamé comptait, et la haute silhouette qui m'attendait dans le couloir.

« Julia, dit Édouard en regardant par-dessus son épaule, qui est cet homme ?

— C'est le fils de Sarah. »

Intimidé, Édouard le fixa pendant quelques minutes.

« C'est vous qui l'avez appelé ?

— Non. Il a découvert des papiers que son père avait cachés toute sa vie. Un carnet ayant appartenu à Sarah. Il est ici parce qu'il veut connaître toute l'histoire. Il est arrivé aujourd'hui.

— Je voudrais lui parler », dit Édouard.

J'allai chercher William et lui dis que mon beau-père souhaitait le rencontrer. Il me suivit. Il dépassait tout le monde d'une tête, Bertrand, Édouard, Colette et les deux filles.

Édouard Tézac leva les yeux vers lui. Son visage avait un air serein, posé, mais ses yeux étaient humides.

Ils se serrèrent la main. Ce fut un moment fort et silencieux. Tout le monde se tut.

« Le fils de Sarah Starzynski », murmura Édouard.

Je vis Colette, Cécile et Laure le regarder avec une politesse pleine d'incompréhension. Elles ne comprenaient pas ce qui se passait. Seul Bertrand était au courant. Lui seul connaissait toute l'histoire depuis qu'il avait découvert le dossier « Sarah », bien qu'il n'ait jamais voulu en parler avec moi. Même après avoir rencontré les Dufaure dans notre appartement, quelques mois auparavant, il n'avait eu aucune question.

Édouard s'éclaircit la gorge. Les deux hommes se tenaient toujours la main. Il s'adressa à William en anglais. Un anglais correct, mais avec un fort accent français.

« Je suis Édouard Tézac. Je vous rencontre dans un moment difficile. Ma mère est en train de mourir.

— Je suis désolé, dit William.

— Julia vous expliquera. Mais à propos de votre mère, Sarah… »

Édouard s'interrompit. Sa voix se brisait. Sa femme et ses filles le regardaient, étonnées.

« De quoi parle-t-il ? murmura Colette, préoccupée. Qui est cette Sarah ?

— C'est quelque chose qui s'est passé il y a soixante ans », dit Édouard, luttant pour retrouver sa voix.

J'avais beaucoup de mal à me retenir de lui passer un bras autour des épaules. Édouard prit une grande inspiration et, retrouvant quelques couleurs, il adressa à William un petit sourire timide que je ne lui avais jamais vu.

« Je n'oublierai jamais votre mère. Jamais. »

Son visage se contracta et le sourire disparut. La souffrance et la tristesse l'empêchaient de respirer, comme ce jour où il m'avait tout raconté.

Le silence devint lourd, insupportable. Colette et ses filles étaient de plus en plus intriguées.

« C'est un tel soulagement pour moi que de pouvoir vous dire ces choses après tant d'années.

— Je vous remercie, monsieur », dit William à voix basse. Lui aussi était pâle. « J'en sais si peu. Je suis venu ici pour comprendre. Ma mère souffrait et je veux savoir pourquoi.

— Nous avons fait ce que nous pouvions pour elle, dit Édouard. Ça, je peux vous en assurer, Julia vous racontera. Elle vous expliquera, vous dira toute l'histoire de votre mère. Elle vous racontera ce que mon père a fait pour elle. Au revoir. »

Il recula. Il avait soudain l'air d'un vieillard blême et rabougri. Bertrand avait un regard à la fois curieux et détaché. C'était sans doute la première fois qu'il voyait une telle émotion chez son père. Je me demandais ce qu'il ressentait.

Édouard sortit, avec sa femme et ses filles qui le bombardaient de questions. Son fils suivait un peu en arrière, les mains dans les poches, silencieux. Édouard dirait-il la vérité à Colette, à leurs filles ? Probablement. J'imaginais le choc que ce serait pour elles.