38114.fb2 Ensemble, c’est tout - читать онлайн бесплатно полную версию книги . Страница 140

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Tu sais c'qu'y faudrait ? Y faudrait te purger la tête comme on vide un poulet et te sortir toute la merde que t'as là-dedans une bonne fois pour toutes. Y sera fortiche, le mec qu'arrivera à te déplier... Pas sûr qu'il existe d'ailleurs... Philou me dit que c'est parce que t'es comme ça que tu dessines bien, eh ben putain, c'est cher payé...

— Alors mon Franck ? le secouait Philibert, tu as l'air tout chose à présent...

— Fatigué...

— Allez... C'est bientôt les vacances...

— Pff... Encore tout le mois de juillet à tirer... D'ailleurs je vais aller me coucher parce que je me lève tôt demain : je mets ces dames au vert...

Aller passer l'été à la campagne... C'était une idée de Camille et Paulette n'y voyait pas d'inconvénients... Pas plus excitée que ça, la mémé... Mais partante. Partante pour tout du moment qu'on ne la forçait à rien...

Quand elle lui annonça son plan, Franck commença enfin à se faire une raison.

Elle pouvait vivre loin de lui. Elle n'était pas amoureuse et ne le serait jamais. Elle l'avait prévenu en plus : « Merci Franck. Moi non plus. » Après c'était son problème s'il s'était cru plus fort qu'elle et plus fort que le monde entier. Eh, non, mon gars, t'es pas le plus fort... Eh non... C'est pas faute de te l'avoir fait comprendre pourtant, hein ? Mais t'es tellement têtu, tellement faraud...

T'étais pas encore né que c'était déjà du n'importe quoi ta vie alors pourquoi ça changerait maintenant ?

Qu'est-ce que tu croyais ? Que parce que tu la sautais de tout ton cœur et que t'étais gentil avec elle, ça te tomberait tout cuit dans le bec, le bonheur... Pff... Quelle pitié... Regarde-le un peu, tu l'as vu ton jeu ? Où tu comptais aller avec ça, dis-moi ? Où tu comptais aller ? Franchement ?

Elle posa son sac et la valise de Paulette dans l'entrée et vint le rejoindre dans la cuisine.

— J'ai soif.

- ...

— Tu fais la gueule ? Ça t'ennuie qu'on parte ?

— Pas du tout ! Je vais pouvoir m'amuser un peu...

Elle se leva et le prit par la main :

— Allez, viens...

— Où ça ?

— Te coucher.

— Avec toi ?

— Ben oui !

— Non.

— Pourquoi ?

— J'ai pu envie... T'es tendre que si t'as un coup dans le nez... Tu fais que tricher avec moi, j'en ai marre...

— Bon...

— Tu souffles le chaud et le froid....C'est dégueulasse comme façon de faire...

- ...

— C'est dégueulasse...

— Mais moi je suis bien avec toi...

— « Mais moi je suis bien avec toi... » reprit-il d'une voix niaiseuse. J'en ai rien à foutre que tu sois bien avec moi. Moi je voulais que tu sois avec moi, point. Le reste, là... Tes nuances, ton flou artistique, tes petits arrangements avec ton cul et ta conscience, tu te les gardes pour un autre nigaud. Cui-ci, il a tout rendu. T'en tireras rien de plus à présent et tu peux laisser tomber l'affaire, princesse...

— T'es tombé amoureux, c'est ça ?

— Oh, tu fais chier, Camille ! C'est ça ! Parle-moi comme si j'étais un grand malade maintenant ! Putain un peu de pudeur, merde ! Un peu de décence ! Je mérite pas ça'quand même ! Allez... Tu vas te barrer et ça va me faire du bien... Qu'est-ce que je fous aussi à me laisser emmerder par une nana qui mouille à l'idée de passer deux mois dans un trou paumé toute seule avec une vioque ? T'es pas normale comme fille et si t'étais un minimum honnête, t'irais te faire soigner avant d'agripper le premier couillon qui passe.

— Paulette a raison. C'est incroyable ce que tu es grossier...

Le trajet, le lendemain matin, parut hum... assez long.

Il leur laissa la voiture et repartit sur sa vieille pétrolette.

— Tu reviendras samedi prochain ?

— Pour quoi faire ?

— Euh... Pour te reposer...

— On verra...

— Je te le demande...

— On verra...

— On s'embrasse pas ?

— Nan. Je viendrai te baiser samedi prochain si j'ai rien de mieux à faire mais je t'embrasse plus.

— Bon.

Il alla dire au revoir à sa grand-mère et disparut au bout du chemin.

Camille retourna à ses gros pots de peinture. Elle donnait dans la décoration intérieure maintenant...

Elle commença à réfléchir et puis non. Sortit ses pinceaux du white-spirit et les essuya longuement. Il avait raison : on verra.

Et leur petite vie reprit. Comme à Paris mais en plus lent encore. Et au soleil.

Camille fit la connaissance d'un couple d'Anglais qui retapaient la maison d'à côté. On s'échangea des trucs, des astuces, des outils et des verres de gin tonic à l'heure où les martinets mènent la danse.

Elles allèrent au musée des Beaux-Arts de Tours, Paulette attendit sous un cèdre immense (trop d'escaliers) pendant que Camille découvrait le jardin, la très jolie femme et le petit-fils du peintre Edouard Debat-Ponsan. Il n'était pas dans le dictionnaire celui-là... Comme Emmanuel Lansyer dont elles avaient visité le musée à Loches quelques jours plus tôt... Camille aimait beaucoup ces peintres qui n'étaient pas dans le dictionnaire... Ces petits maîtres, comme on disait... Les régionaux de l'étape, ceux qui n'avaient pour cimaise que les villes qui les avaient accueillis. Le premier restera à jamais le grand-père d'Olivier Debré et le second l'élève de Corot... Bah... Sans la chape du génie et de la postérité, leurs tableaux se laissaient aimer plus tranquillement. Et plus sincèrement peut-être...