38114.fb2 Ensemble, c’est tout - читать онлайн бесплатно полную версию книги . Страница 33

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— Parfaitement. Une soupe poireaux pommes de terre de chez Liebig...

— C'est de la merde. En plus tu l'as laissée brûler, ça va être dégueulasse... T'as rajouté quoi là-dedans ? ajouta-t-il horrifié, en soulevant le couvercle.

— Euh... de la Vache Qui Rit et des morceaux de pain de mie...

— Pourquoi t'as fait ça ? s'inquiéta-t-il.

— C'est le médecin... Il m'a demandé de la retaper...

— Eh ben, si elle se retape avec ce truc-là, chapeau ! À mon avis, tu vas plutôt la faire caner, oui...

Sur ce, il attrapa une bière dans le Frigidaire et alla s'enfermer dans sa chambre.

Quand Philibert rejoignit sa protégée, elle était encore un peu décontenancée :

— C'est lui ?

— Oui, murmura-t-il en posant son grand plateau sur un carton.

— Il n'enlève jamais son casque ?

— Si, mais quand il rentre le lundi soir, il est toujours exécrable... En général, j'évite de le croiser ce jour-là...

— C'est parce qu'il a trop de travail ?

— Non justement, il ne travaille pas le lundi... Je ne sais pas ce qu'il fait... Il part assez tôt le matin et revient toujours dans une humeur de dogue... Problèmes familiaux, je crois... Tenez, servez-vous pendant que c'est chaud...

— Euh... Qu'est-ce que c'est ?

— Une soupe.

— Ah ? fit Camille en essayant de touiller l'étrange brouet.

— Une soupe à ma façon... Une espèce de bortsch si vous préférez...

— Aaah... Parfait... répéta-t-elle en riant.

Cette fois encore, c'était nerveux.

DEUXIÈME PARTIE

1

— T'as deux minutes, là ? Faut qu'on se parle...

Philibert prenait toujours du chocolat au petit déjeuner et son plaisir, c'était d'éteindre le gaz juste avant que le lait déborde. Plus qu'un rite ou une manie, c'était sa petite victoire quotidienne. Son exploit, son invisible triomphe. Le lait retombait et la journée pouvait commencer : il maîtrisait la situation.

Mais ce matin-là, déconcerté, agressé même, par le ton de son colocataire, il tourna le mauvais brûleur. Le lait se carapata et une odeur déplaisante envahit soudain la pièce.

— Pardon ?

— Je dis : il faut qu'on se parle.

— Parlons, répondit calmement Philibert en mettant sa casserole à tremper, je t'écoute...

— Elle est là pour combien de temps ?

— Plaît-il ?

— Oh, ne fais pas ton malin, hein ? Ta souris ? Elle est là pour combien de temps ?

— Aussi longtemps qu'elle le souhaitera...

— T'en pinces pour elle, c'est ça ?

— Non.

— Menteur. Je le vois bien ton petit manège... Tes belles manières, tes airs de châtelain et tout ça...

— Tu es jaloux ?

— Putain, non ! Manquerait plus que ça ! Moi, jaloux d'un tas d'os ? Hé, y a pas marqué L'abbé Pierre, là ! fit-il en désignant son front.

— Pas jaloux de moi, jaloux d'elle. Peut-être que tu te sens un peu à l'étroit ici et que tu n'as pas envie de pousser ton verre à dents de quelques centimètres sur la droite ?

— Alors, là, tout de suite... Les grandes phrases... À chaque fois que t'ouvres le bec, c'est comme si tes mots devaient rester écrits quelque part tellement qu'y sonnent bien...

— ...

— Attends, je le sais que t'es chez toi, je le sais bien, va... C'est pas ça le problème. T'invites qui tu veux, t'héberges qui tu veux, tu fais même les restos du cœur si ça te chante, mais merde, je sais pas moi... On faisait une bonne petite équipe tous les deux, non ?

— Tu trouves ?

— Ouais je trouve. D'accord j'ai mon caractère et toi t'as toutes tes obsessions débiles, tes trucs là, tes TOC, mais dans l'ensemble, ça roulait bien jusqu'à aujourd'hui...

— Et pourquoi les choses changeraient-elles ?

— Pfff... On voit bien que tu connais pas les nanas, toi... Attention, je dis pas ça pour te blesser, hein ? Mais c'est vrai, quoi... Tu mets une fille quelque part et tout de suite c'est le bordel, vieux... Tout se complique, tout devient chiant et même les meilleurs potes finissent par se faire la gueule, tu sais... Pourquoi tu ricanes, là ?

— Parce que tu t'exprimes comme... Comme un cow-boy... Je ne savais pas que j'étais ton... ton pote.

— OK, je laisse tomber. Je pense juste que t'aurais pu m'en parler avant, c'est tout.

— J'allais t'en parler.

— Quand ?

— Là, maintenant, au-dessus de mon bol, si tu m'avais laissé le temps de me le préparer...

— Je m'excuse... Enfin non, merde, je peux pas m'excuser tout seul, c'est ça ?

— Tout à fait.