38857.fb2 Le Robert des noms propres - читать онлайн бесплатно полную версию книги . Страница 2

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– Tu devrais lui dire de chercher un boulot. Il va être père.

– Nous avons dix-neuf ans. C'est les parents Qui paient. – Ils ne vont pas payer éternellement.

– Pourquoi viens-tu m'embêter avec ces histoires? – C'est important, quand même.

– Il faut toujours que tu viennes gâcher mon bonheur!

– Qu'est-ce que tu racontes?

– Et maintenant, tu vas me dire qu'il faut être raisonnable, et gnagnagna!

– Tu es folle! Je n'ai pas dit ça!

– Ça y est! Je suis folle! Je l'attendais, celle-là! Tu es jalouse de moi! Tu veux me détruire!

– Enfin, Lucette…

– Sors! hurla-t-elle.

La grande sœur s'en alla, atterrée. Elle avait toujours su que la petite dernière était fragile, mais là, cela prenait des proportions inquiétantes.

Désormais, quand elle lui téléphonait, Lu-cette raccrochait lorsqu'elle entendait sa voix.

«J'ai assez de problèmes comme ça», pensait la cadette.

En vérité, sans se l'avouer, elle sentait qu'elle était sur une voie de garage et que sa grande sœur le savait. Comment gagneraient-ils leur vie un jour? Fabien ne s'intéressait qu'aux armes à feu et elle, elle n'était bonne à rien. Elle n'allait quand même pas devenir caissière dans un supermarché. D'ailleurs, elle n'en serait sûrement pas capable.

Elle enfonçait un oreiller sur sa tête pour ne plus y penser.

Cette nuit-là, donc, le bébé avait le hoquet dans le ventre de Lucette.

On n'imagine pas l'influence du hoquet d'un fœtus sur une fillette enceinte à fleur de peau.

Fabien, lui, dormait comme un bienheureux. Elle, elle en était à sa huitième heure d'insomnie, et à son huitième mois de grossesse. Son ventre énorme lui donnait l'impression de contenir une bombe à retardement.

Chaque hoquètement lui semblait correspondre au tic-tac qui la rapprochait du moment de l'explosion. Le fantasme devint réalité: il y eut bel et bien déflagration – dans la tête de Lucette.

Elle se leva, mue par une conviction soudaine qui lui ouvrit grands les yeux.

Elle alla chercher le revolver là où Fabien le cachait. Elle revint près du lit où le garçon dormait. Elle regarda son beau visage en visant sa tempe et murmura:

– Je t'aime, mais je dois protéger le bébé contre toi.

Elle approcha le canon et tira jusqu'à vider le chargeur.

Elle regarda le sang sur le mur. Ensuite, très calme, elle téléphona à la police:

– Je viens de tuer mon mari. Venez.

Quand les policiers arrivèrent, ils furent accueillis par une enfant enceinte jusqu'aux yeux qui tenait un revolver dans sa main droite.

– Posez cette arme! dirent-ils en la menaçant.

– Oh, elle n'est plus chargée, répondit-elle en obéissant.

Elle conduisit les policiers jusqu'au lit conjugal pour montrer son œuvre.

– On l'emmène au commissariat ou à l'hôpital?

– Pourquoi à l'hôpital? Je ne suis pas malade.

– Nous ne savons pas. Mais vous êtes enceinte.

– Je ne suis pas sur le point d'accoucher. Emmenez-moi au commissariat, exigea-t-elle, comme si c'était un droit.

Quand ce fut chose faite, on lui dit qu'elle pouvait appeler un avocat. Elle dit que ce n'était pas nécessaire. Un homme dans un bureau lui posa des questions à n'en plus finir, au nombre desquelles figurait:

– Pourquoi avez-vous tué votre mari?

– Dans mon ventre, le petit avait le hoquet.

– Oui, et ensuite?

– Rien. J'ai tué Fabien.

– Vous l'avez tué parce que le petit avait le hoquet?

Elle parut interloquée avant de répondre:

– Non. Ce n'est pas si simple. Cela dit, le petit n'a plus le hoquet.

– Vous avez tué votre mari pour faire passer le hoquet du petit?

Elle eut un rire déplacé:

– Non, enfin, c'est ridicule!

– Pourquoi avez-vous tué votre mari?

– Pour protéger mon bébé, affirma-t-elle, cette fois avec un sérieux tragique.

– Ah. Votre mari l'avait menacé?

– Oui.

– II fallait le dire tout de suite.

– Oui.