39205.fb2 N?fertiti dans un champ de canne ? sucre - читать онлайн бесплатно полную версию книги . Страница 5

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«En règle générale, il convient de respecter quelques principes élémentaires lors d'un premier accouplement entre deux personnes. En particulier si la femme est impressionnante. Une légende veut que cela ne se passe jamais très bien. Elle n'est pas réellement fondée, mais l'homme devra cependant s'en souvenir quand viendra le moment du bilan, et en faire part à la femme d'un air dégagé si l'affaire ne s'est pas déroulée de manière satisfaisante – non pas pour la réconforter, bien entendu (car il serait mufle et honteusement maladroit de sous-entendre qu'elle n'a pas fourni une prestation correcte), mais pour se disculper si lui-même n'a pas su se montrer suffisamment efficace. C'est une soupape rassurante, mais en observant les règles suivantes, fort simples, on n'en arrivera pas là.

«L'homme ne connaît pas la femme. Or on sait qu'aucune ne se comporte comme une autre. Ou presque. L'une appréciera la douceur et le romantisme voluptueux, l'autre la violence et la vulgarité lubrique. C'est comme ça.

«Sur un hippodrome ou dans un casino, il est amusant de prendre des risques: on ne peut y perdre que de l'argent. Dans un lit avec une inconnue, c'est tentant, mais (une femme pouvant toujours servir, on ne le dira jamais assez) on joue plus gros. S'il fait exactement l'inverse de ce qu'elle aime, elle bondira hors du lit (l'impulsive) ou, dans le meilleur des cas, elle se raidira – ce qui nuira grandement au plaisir du parieur malchanceux -, attendra que ça passe et se jurera d'aller voir ailleurs au plus vite (la fataliste). C'est pourquoi il est nécessaire de se montrer diplomate et fin stratège, d'adopter la méthode de l'homme politique ou du producteur d'émission en prime time en se figurant, dans un premier temps du moins, que l'on fait l'amour à une sorte de femme moyenne, la ménagère ou plutôt la partenaire de moins de cinquante ans (ou de moins de quarante ans, voire la ménagère de moins de trente ans pour les puristes), et de faire par conséquent son possible pour plaire au plus grand nombre. Certes, l'homme s'expose ainsi à certaines critiques ("Trop tiède", "Ordinaire", "Pas assez audacieux") mais il pourra toujours se régler en cours d'exercice – c'est d'ailleurs tout l'art du technicien.

«Dans un premier temps, l'homme doit se déshabiller. Par la suite, il découvrira peut-être que la femme ne refuse pas, à l'occasion, de se faire grimper dessus à la hussarde pour se donner des émotions, mais si, lors de leur première entrevue, il se contente de baisser son pantalon à mi-cuisses pour se soulager sans perte de temps inutile, elle peut mal le prendre. Lorsqu'il est nu (il est bon que la femme se soit elle-même chargée de lui ôter ses vêtements, afin qu'il n'ait pas l'air, en se dévêtant lui-même devant elle, de l'ouvrier qui retrousse ses manches avant l'boulot), lorsqu'il est nu il ne doit en aucun cas avoir honte de son corps. L'être humain (et notamment la femme qu'on a réussi à guider jusqu'à son lit en deux temps, trois mouvements et quatre mots bien choisis à la sortie d'un restaurant) est influençable par nature. Si elle constate qu'il se cache, se tortille et joue de la couette comme une jeune Normande du siècle dernier le soir de ses noces, la femme n'ira pas chercher midi à minuit. Par empathie, elle pensera: "Bon, il a un gros bide ou une petite bite, c'est bien ma chance. Enfin, puisque je suis là…" En revanche, si l'homme se montre sans complexes, assumant sa nudité comme on assume sa calvitie, une éventuelle exubérance abdominale ou carence génitale ne passera peut-être pas inaperçue mais sera considérée comme sereinement acceptée par le principal intéressé, et donc acceptable car il ne faut pas être plus royaliste que le roi.

«Ensuite, il s'agit d'entamer le rapport proprement dit. L'homme ne doit escamoter les préliminaires sous aucun prétexte: c'est une tradition millénaire, on ne peut se permettre de la balayer d'un revers de main. De plus, il est de notoriété publique qu'une majorité de femmes les considèrent comme indispensables – elles ne sont peut-être pas toutes sincères dans les sondages, mais peu importe: ce qui compte dans ces étreintes initiales, c'est l'image qu'elles veulent donner, et de ce fait, peu d'entre elles oseront se plaindre. Si par hasard la femme choisie préfère réellement l'assaut viril au détriment des préliminaires (cela arrive mais il ne faut pas s'en soucier: même sur un hippodrome, on aura toujours plus de chances de gagner en jouant les favoris), l'homme commet certes une légère bourde mais elle ne portera pas à conséquence: personne ne peut s'offusquer du respect d'un usage si répandu (on peut ne pas aimer les huîtres, mais il serait déplacé de fulminer d'indignation si l'on en trouve chez sa tante au réveillon de Noël).

«Comme dans toute entreprise d'exploration, il est nécessaire de se montrer prudent et sobre. Ainsi, l'homme qui vient de se glisser dans le lit évitera de saisir aussitôt sa partenaire par les cheveux pour lui enfourner derechef son désir au fond de la gorge. Lui-même ne plongera pas non plus la tête entre ses jambes comme un épagneul affamé qui tombe sur cent grammes de Pal. (Bien entendu, dans certains cas, on peut ne pas tenir compte de ces deux recommandations: si la femme a ses ardeurs et se jette avidement, luette visible et frémissante, sur l'objet de sa convoitise, ou bien si elle plaque, d'un coup de reins gymnaste, sa féminité ruisselante sur la bouche entrouverte de l'homme, il serait absurde de se démener rageusement pour la repousser dans l'espoir de paraître subtil en amour.)

«Après quelques baisers savamment fougueux, l'homme caressera les seins de sa partenaire (sans pincer ni malaxer, sans effleurer non plus, mais comme on caresse la tête d'un chat – et cela va de soi, en précisant le geste (modulation de la pression, localisation de la cible) en fonction de la réponse corporelle et vocale de la femme), puis il fera glisser sa main sur le ventre, s'attardera un court instant sur l'endroit où il suppose que se trouvent grosso modo les ovaires (points assez sensibles, trop souvent ignorés car invisibles et méconnus de l'homme, celui-ci n'ayant pas tellement d'ovaires), et arrivera enfin là où il voulait en venir, entre les jambes. Ici, attention! Délicatesse et circonspection sont de mise, car la femme, en état d'alerte maximale, est prête à sanctionner mentalement la moindre faute. Celui qui s'acharnera sur le clitoris comme s'il tentait de le faire entrer à l'intérieur du corps, ou celui qui plantera trois ou quatre doigts conquérants dans une terre certes accueillante mais peut-être pas encore suffisamment meuble, perdra sans nul doute de nombreux points. La mesure et la capacité d'adaptation sont deux éléments clés pour ouvrir la femme. Après quelques instants de flânerie attentive dans cette province au climat tropical, et dans le but de préparer une expédition future, l'homme pourra aventurer un doigt vers une région plus sombre et d'accès plus difficile, le trou du cul. Mais durant cette première incursion, il devra surveiller, avec une extrême vigilance, la tête de la femme – directement reliée aux récepteurs sensoriels de cette partie du corps. Au moindre signe de douleur ou d'agacement, il devra rebrousser chemin.

«Durant toute cette manipulation, il ne cessera d'embrasser la femme. Et pas uniquement ses lèvres: ses joues, ses yeux, ses oreilles, son cou, ses épaules ou ses seins font aussi l'affaire. N'importe quel support est bon du moment qu'il occupe la bouche. Car si le visage de l'homme reste inactif, le regard dans le vide, il aura l'air du type à genoux qui fouille consciencieusement sous une commode pour récupérer un truc.

«La visite terminée (lorsque les sons émis par la femme perdent en intensité), l'homme lui touchera de nouveau les seins, le ventre ou les cheveux pour lui prouver qu'il n'est pas obnubilé par sa vulve. Il en profitera pour remarquer, éventuellement, qu'elle s'est mise en devoir de flatter sa virilité (tout à son travail, il a pu ne pas s'en apercevoir tout de suite). Le cas échéant, c'est bon signe.

«Par souci de galanterie, et pour ne pas donner l'impression d'imposer quoi que ce soit, c'est l'homme qui entamera les réjouissances bucco-génitales – sans trop d'appréhension car on trouve autant de femmes qui s'y opposent que de beurre en broche. Il repart donc bille en tête vers les contrées enchanteresses de la Vallée de la Joie – comme l'appelait Ronsard, grand poète malheureusement décédé. Il devra suivre avec la bouche les mêmes principes que lors du parcours manuel: ne pas se focaliser obstinément sur le clitoris, mordiller plutôt que mordre, ne pas trop chercher à frayer un chemin à sa langue avec ses doigts, au risque de ressembler à un scientifique myope, éviter si possible les bruits de bouche ou de nez, au risque de ressembler cette fois à un cochon truffier, et surtout, là encore, enregistrer la moindre réaction de la femme afin d'orienter son effort selon ses besoins. Tout cela n'est pas sorcier.

«C'est ensuite qu'il faut faire preuve de tact, au moment où l'homme peut espérer la réciproque, misant sur le fair-play de sa partenaire. Il existe quelques astuces pour éviter l'incident diplomatique. La première consiste à remonter comme précédemment, en léchant le ventre, puis les seins. Tandis que la langue vaillante s'attarde sur les mamelons en émoi, l'homme pose négligemment un ou deux doigts sur la bouche de la femme, comme s'il voulait juste lui caresser tendrement les lèvres. C'est là qu'intervient le génie de Léonard de Vinci (car c'est lui qui a inventé ce test infaillible). Inconsciemment, la femme qui suce va prendre le doigt dans sa bouche. Cela peut sembler simpliste, mais c'est ainsi: si elle lèche ou, mieux, engloutit le doigt, l’homme peut se détendre. Il n'a plus qu'à changer de position pour lui présenter la chose. Si elle n'a pas touché au doigt, cela ne signifie pas pour autant qu'elle fera la fine bouche plus tard (on peut imaginer une foule de raisons: elle aime tout bonnement se faire caresser les lèvres, le doigt sent le tabac ou l'ail, elle a de nombreux plombages et craint de les exposer, etc.). Pour se faire une idée plus précise, l'homme peut alors utiliser la deuxième astuce, moins savante: tout en continuant à embrasser les seins, le cou ou la bouche de la femme, il change de position – simplement, dirait-on, pour être plus confortablement installé et se consacrer tout entier au plaisir de sa partenaire, dans les meilleures conditions possibles. Il se met à genoux près d'elle, à peu près au niveau de son épaule et, penché sur elle, continue son oeuvre altruiste. La femme qui suce, lorsqu'elle aperçoit un membre disponible à quelques centimètres de sa bouche, ne peut se retenir – surtout lorsqu'on vient de la lécher courtoisement et sans arrière-pensée. C'est un réflexe.

«Si aucune de ces astuces n'a donné de résultat, il est préférable de s'en tenir là et de passer directement à l'étape suivante. En effet, il serait assez malvenu de saisir la tête de la femme et de la pousser d'autorité vers son devoir, après lui avoir si ostensiblement tendu la perche, si on peut dire. Ce serait prendre un risque inutile – celui de créer une sensation de malaise dans le couple – pour peu de chose: le meilleur reste à venir.

«Il est à noter que ces précisions et conseils sont plus théoriques qu'autre chose, car en pratique ïe problème se pose rarement: la plupart des femmes sucent.

«Quoi qu'il en soit, qu'elle ait fait preuve de bonne volonté ou non, il convient à présent d'honorer sa partenaire. Il n'existe qu'une règle d'or: l'efficacité. En d'autres termes, cette règle d'or peut se décomposer en trois points: il faut réussir à "bander", comme on dit dans le jargon; il faut éviter d'éjaculer après juste quelques secondes passées à l'intérieur de la femme; il faut enfin essayer de la faire jouir (toutefois, ce n'est pas indispensable).

«Si par hasard l'homme est amené à revoir plusieurs fois la même femme, il pourra par la suite se permettre de négliger l'une ou l'autre de ces bases. On lui pardonnera aisément, sachant qu'il n'est pas coutumier du fait et que "ça arrive a tout le monde". Mais lors d'une première confrontation, il ne faut pas plaisanter avec ça. Il existe de nombreux hommes sur terre et la femme n'a pas de temps à perdre. À moins qu'elle ne soit amoureuse de lui (mais comment pourrait-elle tomber amoureuse de quelqu'un qu'elle connaît si peu qu'elle n'a même pas encore couché avec lui?), son jugement sera vite fait. (Il faut être bien indulgent ou bien bête pour retourner dans un restaurant où l'on a très peu et mal mangé – il y a beaucoup de restaurants.) Et même si elle consent à laisser une deuxième chance à l'homme (par charité chrétienne ou paresse de chercher ailleurs), celui-ci se retrouvera le dos au mur, écrasé par une pression terrible, et entrera malgré lui, le malheureux, dans la fameuse et redoutable spirale de la performance. Au lieu d'un cuisant revers, il en essuiera deux. En résumé: dès la première fois, il faut que ça fonctionne.

«Pour "bander", c'est très simple: il suffit que l'homme oublie qu'il a quelque chose entre les jambes – car c'est en concentrant toute son attention sur cette plus ou moins infime partie de son corps, en exigeant d'elle, à la manière d'un maître sévère et impressionnant, un comportement de premier ordre, qu'il lui fait peur. Il faut donc penser à tout autre chose, comme par exemple au corps de la femme. L'homme ne la connaissant pas, il ne lui est pas difficile de s'y intéresser, car toute découverte peut présenter certains attraits pourvu qu'on ait l'esprit curieux. D'autre part, il ne doit en aucun cas se laisser impressionner par sa partenaire: c’est souvent l'une des principales causes de défaillance (celui qui se sent tout petit ne peut guère espérer une abrogation soudaine et miraculeuse des lois de la proportion). Même si c'est tout à fait regrettable, il doit donc se résoudre à considérer la femme qui est en train d'écarter les jambes devant lui comme une prostituée sans désir, qui n'attend rien de lui. C'est révoltant, mais l'heure n'est pas aux sentiments. Et comme, encore une fois, il ne connaît pas la femme, il pourra aisément éviter les problèmes de conscience.

«Lorsque la jonction des corps est faite, il ne faut pas jouir tout de suite. Ce serait encore pire que de ne pas pouvoir "bander" (car on ne pourrait invoquer aucune excuse). Pour passer le cap délicat des premières étreintes des muqueuses et atteindre bon an mal an le quart d'heure fixé par les conventions, il est préférable, si l'homme se sait fort émotif, qu'il ait songé à boire quelques verres avant de se lancer dans la bataille – l'alcool est certainement l'atout le plus précieux de l'expéditif. Mais s'il n'en a pas eu l'occasion, ou si deux whiskies le terrassent, il devra se défendre seul. Pour cela, il lui faudra impérativement oublier que la femme est un être capable de jouir. Car c'est par crainte de ne pas être en mesure de faire jouir sa partenaire que l'homme s'affole, perd la tête, panique, se met à vibrer, explose. De nouveau, malheureusement, il est obligé de se figurer qu'il a affaire à une sorte de créature sans âme qui n'est là que pour lui donner du plaisir. (En prison, certains détenus ont mis au point un système ingénieux: lorsqu'on leur sert des pâtes dans la cellule, notamment des coquillettes ou des nouilles, ils en gardent la moitié et les fourrent, quand elles sont tièdes, dans le thermos qu'ils utilisent pour le café. Ils se fabriquent ainsi une sorte de "vaginette" des plus réalistes, paraît-il, si l'on ferme les yeux. Dans le cas qui nous intéresse, il s'agit de se comporter de manière inverse: fermer les yeux et se représenter la femme comme un thermos rempli de nouilles tièdes.) Avec un rien d'imagination, il lui devient donc inutile, voire incongru, de chercher à procurer un orgasme à sa partenaire: elle s'en fiche et n'attend aucune prouesse particulière de sa part. Cette pression supprimée, il ne pense plus qu'à lui et se défoule en toute quiétude. Le problème, c'est que la femme se met souvent à gémir de plus en plus bruyamment, occasionnant ainsi des interférences pénibles: il devient presque impossible à l'homme de continuer à croire qu'elle n'a pas l'intention de prendre du plaisir. Et cette fois, l'orgasme de la dame semblant tout proche, il serait vraiment dommage d'échouer si près du but. Pourvu que… Oh non.

«Ce qu'il doit prendre en compte, c'est le côté facultatif de la jouissance féminine lors de ce premier contact. L'orgasme de la femme est bien moins "mécanique" que celui de l'homme, il ne suffit pas de l'astiquer un moment pour qu'elle l'atteigne par lien de cause à effet. Bien des femmes ne jouissent que lorsqu'elles sont parfaitement détendues, lorsqu'elles ne pensent à rien d'autre qu'à ce qu'elles sont en train de faire (ou à ce qu'elles pourraient faire dans le même genre avec quelqu'un d'autre), c'est-à-dire, somme toute, assez rarement. (Tandis qu'un homme, et c'est parfois dommage pour lui, peut jouir même s'il s'efforce désespérément de se représenter les fesses blanches et poilues de son coéquipier de rugby sous la douche.) On n'imagine pas le nombre de femmes qui restent deux fois sur frois à la frontière de la terre promise sans pouvoir, pour une raison ou une autre, effectuer le dernier pas. Combien d'entre elles, en plus de cette frustration, sont obligées de pousser de grands cris et de se tortiller à la façon des actrices mélo des années 20 pour ne pas froisser le brave artisan qui s'échine entre leurs jambes? Bref, elles ont l'habitude. En outre, la première fois, elles sont plus tendues que de coutume, comme l'homme, elles pensent avant tout, elles aussi, à plaire à leur partenaire, il est donc tout à fait compréhensible que certaines ne se laissent pas aller jusqu'à l'orgasme. L'homme ne doit pas s'en inquiéter. Justement parce qu'il sait que la femme, même si elle a la bascule facile en d'autres circonstances, ne songera pas elle-même à s'en inquiéter, ni à s'en plaindre.

«Néanmoins, il est primordial de lui donner tout de même un peu de plaisir. C'est la moindre des choses. Pour cela, et pour une fois, l'homme va devoir penser avant tout à elle. (Ce n'est pas simple, mais l'esprit humain est capable de choses étonnantes.) Pour découvrir ce qu'elle aime, il faut se comporter avec elle comme avec un coffre-fort: tourner le bouton, essayer tous les chiffres jusqu'à ce qu'on perçoive un déclic dans le stéthoscope. En l'occurrence, il s'agit par exemple de tester toutes les positions de base jusqu'à ce que la femme entre en vibration. Attention: même si l'on sent que la levrette, disons, la laisse tiède comme un thermos de nouilles, il ne faut pas imiter l'expert en coffres et passer aussitôt à la suivante. Sinon, l'acte d'amour risque de se transformer en tourbillon endiablé, en un mélange de combat de lutte et de rock acrobatique, et la pauvre femme, balancée de tous côtés, soulevée, poussée, pliée, retournée à toute vitesse, se demandera inévitablement ce qu'est en train de faire ce dangereux malade. ("Pourquoi faut-il toujours que ça tombe sur moi?") Non, même si l'homme sent que la position choisie n'obtient qu'un vague succès d'estime, il doit s'y tenir pendant un minimum de trois minutes.

«Lorsqu'il a découvert celle que sa partenaire goûte le plus (elle est aisément identifiable: même si la femme n'est pas foudroyée de plaisir, elle aura à cœur d'indiquer clairement à l'homme que c'est encore ce qu'il y a de plus supportable, en secouant la tête de manière comique et en poussant de petits cris, un peu trop fort), il devra s'employer à régler la puissance et la vitesse de ses va-et-vient. Là encore, la seule méthode convenable est celle du coffre-fort. Inutile de revenir là-dessus, c'est enfantin.

«Ensuite, s'il veut peaufiner son travail (ce qu'on ne saurait trop lui conseiller, pour sortir de la masse), il peut s'attacher (en suivant toujours la méthode dite "du coffre-fort") aux détails, aux condiments. Les gestes accessoires, par exemple – caresser ou tirer les cheveux tandis qu'il la secoue, glisser un doigt dans la bouche ou ailleurs, taper sur les fesses, pincer les mamelons, lécher la bouche ou toucher le clitoris qui commence à se sentir bien seul (à ce propos, l'homme ne doit surtout pas hésiter, mettant sa fierté de côté, à saisir la main de la femme pendant le rapport et à la guider vers son clitoris (certaines n'osent pas le faire d'elles-mêmes): cette main deviendra sa meilleure alliée dans la course à l'orgasme; ou bien les paroles – certaines femmes adorent que l'homme leur parle pendant qu'il les cloue au matelas, d'autres détestent. Pour les gestes comme pour les paroles, il est impératif de commencer au bas de l'échelle et de monter graduellement si l'on sent que ça accroche. Un homme qui, dès les premières poussées à l'intérieur de la femme, se mettrait à lui griffer les seins jusqu'au sang ou à grogner "Tu aimes quand ça tape au fond, hein, chienne?", prendrait de gros risques.

«Une fois que tous ces réglages sont effectués, l'homme n'a plus qu'à attendre sereinement le moment opportun (après, approximativement, un quart d'heure a une heure d'activité (pas trop longtemps non plus, car les muqueuses sont fragiles et la femme peut commencer à éprouver une sensation de détérioration)), et quand il estimera avoir suffisamment payé de sa personne, il pourra enfin donner le meilleur de lui-même.

«Pour conclure (mais on l'a dit des millions de fois depuis les premières copulations préhistoriques, et c'est faire injure à l'homme que de le rappeler), il est formellement déconseillé de tourner le dos à la femme dès qu'on s'est extirpé d'elle, et de s'endormir. L'homme doit la serrer dans ses bras et la caresser, l'embrasser longuement, même si ce n'est pas de gaieté de cœur.

«L'accouplement de deux êtres pose toujours des problèmes au début. Mais, comme on l'a vu, cet animal suprêmement intelligent qu'on appelle l'homme peut les surmonter en ne se fiant qu'à deux mots: modération et jugeote. L'instinct, dans ces cas-là, ne donne jamais rien de bon.»

Allongée magnifique sur le dos, le visage tourné vers moi, un ovale limpide et pâle, les yeux clairs, les yeux lubriques, Olive me regarde.

Il me fait marrer, mon oncle.

Mais je vais tenter de me ressaisir. Les yeux brumeux, je la regarde.

Je vais me déshabiller sans gêne, avec souplesse comme un artiste de cabaret, me coucher naturellement à côté d'elle et la prendre dans mes bras sans lui mettre un coup de coude dans l'œil au passage.

Je lui tourne le dos pour m'asseoir sur le lit et enlever mes chaussures, elle voit ma nuque ployée, mon échine voûtée, de quoi j'ai l'air, un bon bougre qui se prépare dans le vestiaire avant un match de foot, mes chaussettes, je me relève, qu'est-ce que je suis lourd, j'arrive à peine à me remettre sur pied, j'ai trop mangé à l'indien, je me retourne vers elle, un bulldozer qui pivote lentement, et lentement je commence à me déshabiller, elle ne me quitte pas des yeux, clairs et lubriques, il faut que j'évite de forcer sur le côté langoureux, il n'y a pas grand risque, je me demande ce qui m'a pris de choisir ce caleçon miteux ce matin, je l'enlève vite, puis le tee-shirt, vite, je suis nu, mon Dieu, qu'est-ce que c'est que ce ventre?

D'où sort ce ventre?

J'aimerais beaucoup assumer mon corps mais je ne sais plus comment on fait. Pourtant ce serait l'idéal en ce moment critique, je devrais profiter qu'elle me regarde pour lui faire comprendre que je suis serein, moi aussi, et qu'elle peut s'attendre à passer une bonne heure de détente instructive. Mais j'ai beau retourner le problème de tous les côtés, je n'arrive pas à remettre le doigt sur la pensée qui permet de se sentir à l'aise. Impossible. J'ai l'impression d'être nu devant un jury dont tous les membres seraient nageurs ou danseuses au Lido, je suis debout bossu les bras le long du corps, bronzé comme un lavabo d'hôpital, musclé comme un cocker, et ce ventre, il faudrait que je sois vraiment débile pour me sentir à l'aise. Aussi je me ramasse sur moi-même, afin qu'elle ne distingue plus qu'une masse confuse de muscles et de chair tendre, je roule en quelque sorte sur le lit, puis me dénoue et m'allonge. Elle sourit avec indulgence. Qu'est-ce qui me prend? C'est une fille, non?

Il faut que je me dénoue davantage. Physiquement, je suis bien dénoué, là. C'est mentalement, surtout. Allez, je me dénoue, je me dénoue.

Alors que je m'apprête, malgré ma sournoise promesse de chasteté, à entamer sans tarder les merveilleux préliminaires (tu es tombée dans la gueule du loup, petit chaperon rouge (le temps que je me dénoue, et tu vas voir)), elle se tourne vers moi, m'embrasse sur la joue et me prend la bite à pleine main.

En une seconde, je comprends tout. Je deviens génial, j’analyse aussi vite qu'un puissant ordinateur. C'est elle qui a mené la soirée comme elle le désirait, c'est elle qui m'a engourdi au restaurant, qui m'a fait monter ici, qui m'a conduit jusqu'au lit en bâillant. Ah la garce! Enfin non, c'est bien, au contraire. Sauf que… Saperlipopette, malgré mon cerveau très rapide je n'ai plus le temps de réfléchir car elle m'a pris la bite à pleine main et je bande aussitôt comme un jeune homme, c'est toujours ça de gagné mais je ne peux plus penser à rien d'autre. C'est parti pour les préliminaires!

En guise de préliminaires, elle me chevauche, s'écarte la chatte d'une main, oriente fermement ma bite émue de l'autre et s'empale dessus d'un bon coup avant que j'aie pu comprendre ce qu'elle avait l'intention de faire. Je suis plongé dans un tourbillon de miel chaud, instantanément englouti dans un bain de lave bouillante, je me pétrifie et fonds à la fois, pris dans le miel lave, je vois des éclairs multicolores, des flashes, des taches noires, et au loin la silhouette floue d'une femme qui monte et descend au-dessus de moi avec une ardeur animale. Il me semble l'entendre gémir. Elle s'enfonce violemment sur moi, elle m'avale et me brûle (j'ai cette sensation quelque part vers le milieu de mon corps).

Je tente de reprendre mes esprits. Bon, tant pis pour les préliminaires, je crois que nous sommes déjà passés à l'étape suivante. J'y vois plus clair. Elle est à califourchon sur moi, ses deux mains sont posées à plat sur mon torse, elle me griffe, elle s'appuie sur moi, fort, elle se mord les lèvres, elle se cambre légèrement lorsqu'elle monte et arrondit le bas du dos lorsqu'elle redescend pour s'empaler le plus loin possible, ses seins devant moi suivent le mouvement, plutôt petits, fermes et fragiles, de l'ivoire souple. Ses cheveux les caressent. Elle ouvre grands les yeux et les plante dans les miens comme si elle s'en servait pour me maintenir paralysé.

– Tu aimes ça? me demande-t-elle.

– Oui.

Il va bientôt falloir que j'essaie différentes positions pour déterminer habilement celle qu'elle préfère. Le temps que je me ressaisisse. Il ne faudra pas non plus que j'oublie de moduler la vitesse et la puissance de mes coups de reins en fonction de ce qu'elle aime. Quant aux gestes accessoires, je verrai un peu plus tard. Pour l'instant, je ne trouve rien de très utile à faire, je me contente de mettre mes mains sur ses hanches et de laisser mes bras le plus détendus possible afin de ne pas la gêner dans son action. Je commence à songer à ce que je pourrais lui dire comme cochonneries pour ne pas paraître complètement inactif, quand, d'une main experte, elle ôte mon sexe du sien, descend de moi comme d'un cheval et me dit:

– J'adore ce que tu me fais. Viens.

Elle se couche à côté de moi sur le dos, écarte largement les cuisses et se touche distraitement en m'attendant (je ne suis pas très prompt à réagir car, étant donné qu'elle a adoré ce que je lui faisais, je cherche ce que j'ai bien pu lui faire). Je finis par me mettre à genoux entre ses jambes (sans avoir résolu l'énigme) et contemple d'un œil ému l'écrin de soie chaude et humide où je vais venir loger le rubis de mon amour (beurk). Par quoi vais-je débuter, va-et-vient doux et romantiques, comme les vaguelettes sur une plage de l'île Maurice, ou bien puissants coups de boutoir, comme les béliers de la légion romaine contre les portes de Carthage? Je contemple d'un œil ému cette antichambre du bonheur, cette Vallée de la Joie dont parlait Lamartine.

– Viens. Baise-moi. Fort.

Je vais arrêter de réfléchir et d'anticiper, c'est superflu. Si je peux éviter les calculs et les tâtonnements, si elle préfère s'en charger, autant que je me laisse faire (même si ce n'est pas mon habitude), je pourrai ainsi concentrer toute mon énergie, toute mon attention sur ce moment précieux – je ne dois pas oublier que je couche pour la première fois avec Olive Sohn. Moi, celui qu'on appelait Miette. Donc je viens et je la baise, fort.

Elle se met aussitôt à gémir, plus fiévreusement que lorsqu'elle était sur moi, ouvre les jambes presque en grand écart, empoigne le drap de part et d'autre de sa tête, ses doigts se crispent, je lui défonce la chatte, elle serre les dents, ses yeux paraissent affolés, regardent de tous côtés comme si elle cherchait quelque chose, s'écarquillent encore, elle frappe le matelas, elle gronde, elle crie. De toute évidence, Olive Sohn a envie de jouir. Moi aussi, mais pas tout de suite. Sinon elle va m'en vouloir – elle a l'air très déterminée – et c'est la dernière chose au monde que je souhaiterais. Qu'elle m'en veuille. J'essaie de l'imaginer en thermos plein de pâtes, mais je m'en veux illico (comment puis-je songer à traiter ainsi la fille la plus inattendue que j'aie jamais rencontrée, la seule qui ne ressemble à personne – un thermos plein de pâtes…) et ça calme presto mes pulsions précoces. Je manque même d'en débander de honte (je voudrais me cacher dans un trou de souris). Heureusement, elle ne me laisse pas le temps de me recroqueviller:

– Je veux que tu me prennes à quatre pattes. Encore une fois, elle est prête avant moi (elle est d'une rapidité stupéfiante, elle se téléporte d'un point à un autre, c'est peut-être un fantôme, elle est partout et dans toutes les positions à la fois). Je me redresse péniblement. Par chance, la vue qu'elle m'offre en position de chienne est des plus érectogènes et j'oublie vite le thermos – il faut dire que ça n'a rien à voir. Allez, enchaînons, enchaînons, suivons le guide, je sens qu'elle s'impatiente. Je prends une profonde inspiration, lui saute dessus, lui rentre dedans et «tape au fond», comme elle me le demande avec insistance. S'ensuivent quelques minutes de grande émotion, durant lesquelles je dois m'efforcer de ne pas perdre la cadence qu'elle impose par ses encouragements sataniques («Baise-moi, baise-moi, défonce-moi, plus fort, plus fort, défonce-moi») et me borne, en ce qui concerne les fantaisies annexes, à respecter de mon mieux ses désirs («Frappe-moi les fesses», «Griffe-moi», «Mords-moi», «Tiens-moi par les cheveux, plus fort, tire-moi les cheveux!»). Je ressemble à une marionnette manipulée par un parkinsonien fou, je ressemble à un ouvrier débordé par le rythme effréné de sa machine, je me mélange les pinceaux (je lui tape une fois la tête au lieu des fesses), mais c'est si intense que je ne pense plus à rien et, malgré les apparences peut-être, je prends beaucoup de plaisir. Je n'ai jamais pris autant de plaisir avec une fille – la question ne se pose même pas. Je suis dépassé, submergé. Je suis dans le plaisir.

(À New York, cette fureur charnelle monte d'un cran, à Veules-les-Roses elle se transforme en bain de sang.)

Profitant d'un moment d'accalmie qui m'est absolument indispensable pour éviter la syncope ou la pulvérisation atomique, elle me dit d'une voix haletante mais sur un ton aussi tranquille que si nous discutions à la terrasse d'un bistrot:

– J'aimerais voir ce que tu es en train de me faire. J'aimerais voir ta bite qui entre dans ma chatte. C'est pas juste: vous, vous pouvez. Nous, les filles, jamais vraiment, dans aucune position. Ça m'exciterait, pourtant.

Tant pis pour la syncope probable, je me sens de nouveau d'humeur cavalière. C'est vrai que tu rates quelque chose, Olive. Physiquement je commence à flancher un peu, même si je fais encore illusion, mais moralement ça ne peut pas aller mieux.

Depuis quelques instants, je suis fasciné par son trou du cul. Je n'entends même plus Olive crier, je ne la vois plus se tordre sur le lit, j'oublie de lui donner des claques sur les fesses et de lui tirer la tête en arrière, je plante mes ongles dans ses hanches et continue à la secouer comme un démon, en fixant son trou du cul avec des yeux qui feraient peur à un hibou.