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ANNEXES

Discours d’Égletons (Corrèze), le 3 octobre 1976

Au-delà de nos préoccupations immédiates, au-delà des soucis qui sont les nôtres, il y a les Français qui s’interrogent, il y a la France, aux prises avec ses difficultés sociales, économiques, politiques. Ces difficultés, j’ai lutté de toutes mes forces pour les surmonter. Ces problèmes, j’ai mis depuis deux ans, tout mon cœur, toute mon énergie pour leur trouver une solution. Et le jour où j’ai considéré que, dans le cadre qui m’était fixé, avec les moyens dont je disposais, je n’avais plus de chance sérieuse de réussir, j’ai estimé de mon devoir de remettre la démission de mon Gouvernement au Président de la République.

J’ai servi en toute loyauté le Chef de l’État. Mais je suis de ceux qui croient que la loyauté implique la franchise. J’ai donc été conduit à tirer les conclusions de la situation telle que je l’appréciais.

Certains aujourd’hui voudraient m’opposer au Président de la République. Ils perdent leur temps. Ma conception du service de l’État, mon attachement à la Ve République sont trop rigoureux pour que je sois jamais tenté de le faire. Il est le garant de nos Institutions, élu du peuple français, et nul n’a le droit de contester sa légitimité, sa primauté et ses pouvoirs, si ce n’est le peuple lui-même quand il est normalement consulté. Ma position, à cet égard, est claire. Je n’y reviendrai pas. J’espère avoir été compris.

C’est dans ce cadre que j’entends aujourd’hui poursuivre ma tâche au service du pays : défendre l’indépendance nationale, affermir les institutions de la République, renforcer la liberté.

Ces grandes options, présentées au peuple français et adoptées par lui lors des élections présidentielles demeurent la charte de mon action politique.

Sur tous ces problèmes, j’aurai l’occasion, dans les deux mois qui viennent, de préciser ma pensée et, ensemble, nous en délibérerons lors de nos prochaines Assises. Je ne voudrais aujourd’hui qu’évoquer brièvement quelques points parmi les plus importants.

La défense des principes de notre démocratie c’est d’abord bien entendu, celle de l’indépendance nationale. Comme personne ne met en cause aujourd’hui cette affirmation, nous avons tendance à croire que la cause est entendue et peut-être avons-nous commis l’erreur de laisser à nos adversaires le soin de tirer parti d’un mot d’ordre qui appartient à tous, mais sans doute et d’abord à nous les gaullistes qui l’avons restaurée. Or, l’indépendance n’est pas un mot ; elle n’est pas une profession de foi ou le thème de discours ou de programmes électoraux. Elle s’affirme. Elle suppose qu’un effort permanent soit effectué pour que notre pays soit doté d’une défense nationale moderne, forte et efficace. Elle exige que notre action extérieure sache persévérer dans le refus des allégeances et nous maintenir hors des blocs antagonistes. Il faut donc dénoncer les procès de tendance qui évoquent absurdement notre retour à l’OTAN. Il faut éviter que certains textes, certaines déclarations, puissent créer une équivoque quant à notre volonté de demeurer indépendants, non seulement selon les textes mais selon l’esprit et dans les faits. Il faut que le monde comprenne que cette œuvre ne sera pas interrompue et que les meilleurs garants de la continuité dans ce domaine sont les hommes de la majorité qui a permis de l’assurer jusqu’ici.

Mais le ressort de l’indépendance extérieure, il faut aussi le trouver en nous-mêmes, dans la stabilité intérieure et la liberté des citoyens.

Les institutions politiques stables et démocratiques que le peuple français s’est données à l’appel du Général de Gaulle ont fait la preuve de leur efficacité au cours des dernières années parfois mouvementées, souvent difficiles que nous avons vécues. Pourtant les signataires du programme commun socialo-communiste veulent les remettre en cause par le biais de retouches, de réformes ou de modifications plus ou moins hypocrites. Nous ne le permettrons pas. Notre régime politique serait irrémédiablement détruit et nous reviendrons d’abord à la faiblesse d’autrefois, aussitôt suivie par l’autoritarisme et la dictature.

Le respect scrupuleux du texte de nos institutions constitue pour nous un dogme sur lequel il ne nous est pas possible de transiger.

Enfin, la liberté, en France, comme dans un grand nombre d’autres pays, est, elle aussi, menacée.

Elle l’est parfois de notre faute. Alors que les Français dans leur grande majorité sont attachés à la société démocratique et libérale, trop nombreux sont ceux qui, peut-être parce qu’ils doutent de notre capacité à la défendre, refusent les disciplines nécessaires et préfèrent aux efforts le renoncement et la facilité.

Elle l’est surtout par nos adversaires ; s’ils venaient au pouvoir, ils auraient tôt fait de créer, que certains d’entre eux le veuillent ou non, une société de contrainte où l’autorité bureaucratique d’un État proliférant rendrait rapidement insupportable la vie de nos concitoyens.

Contrairement à ce que pensent un grand nombre de jeunes, peut-être parce qu’ils n’en ont jamais été privés, la liberté n’est pas un merveilleux privilège que l’on a une fois pour toutes. C’est un bien difficile à conquérir, une plante fragile et menacée qu’il faut perpétuellement protéger et défendre.

La liberté peut être détruite aussi bien par une trop grande emprise de l’État que par la démission de l’autorité.

Elle s’évanouit et meurt là où l’État n’est plus capable d’assurer à tous les citoyens la sécurité dans leur vie quotidienne face aux violences, aux agressions du monde moderne, aux excès des minorités destructrices.

Nos concitoyens aspirent à la sécurité, ils veulent être protégés, ils veulent voir renforcée et plus perpétuellement contestée l’autorité d’un État qui tient sa légitimité du suffrage universel, ils veulent que cesse la complaisance envers la licence et le renoncement.

Mais au-delà de ces principes permanents qui concernent l’organisation de la société, il y a les hommes et les femmes qui la composent. Il y a leurs problèmes, toujours nouveaux, toujours plus complexes, et qu’il faut résoudre.

Le devoir de l’homme politique n’est pas de rêver pour les autres, mais de les écouter, de démêler avec eux le possible du souhaitable et d’en tirer des règles pour son action.

Que veulent donc les hommes et les femmes de ce pays ? Leur attente, telle que je la perçois, est à la fois simple et très ambitieuse :

un monde juste,

une vie quotidienne qu’ils maîtrisent davantage et dont ils assument eux-mêmes plus directement la responsabilité.

La justice, bien sûr, tout le monde la veut. Mais comme la liberté, elle a ses disciplines.

La justice n’est pas l’égalitarisme : la diversité, la différence entre les hommes sont un droit autant qu’un fait.

La France de demain ne saurait être une société d’assistés où chacun recevrait d’une bureaucratie tentaculaire la même portion congrue de la pénurie collective. Certaines inégalités en revanche sont intolérables : toutes celles qui résultent de rentes de situation où le mérite personnel n’a que faire, toutes celles que sécrète le jeu de certains mécanismes économiques quand l’État ne maintient pas la mesure.

Réduire ces inégalités, voilà ce que doit être, concrètement, notre action de justice.

La deuxième discipline de la justice, c’est la solidarité.

L’excès des revendications, la relative facilité avec laquelle celles-ci sont satisfaites, l’acharnement croissant avec lequel chacun s’en remet à l’État pour satisfaire tous ses besoins et toutes ses exigences créent un climat d’inflation psychologique non moins dangereux que l’inflation elle-même et non moins générateur d’angoisse.

Car, je vous le demande, quand nos entreprises et nos syndicats se laissent entraîner dans une course échevelée des salaires et des profits, où sont les bénéficiaires ? Où sont les victimes ? De tous côtés : chômeurs frustrés de leur dignité de citoyen à part entière, entrepreneurs épuisés de dettes, personnes âgées désemparées par le coût de la vie, mal-logés accablés par l’alourdissement des charges locatives, petits agriculteurs que la terre ne nourrit pas, épargnants aux revenus non indexés, tous se retrouvent au bout du compte dans le malheur, le désespoir ou la révolte.

Il est urgent que les partenaires privilégiés de notre système social prennent conscience de la solidarité nouvelle que la crise a fait surgir entre tous.

Certes, la société d’hommes responsables pour laquelle nous nous rassemblons ne saurait être fondée sur l’assistance. Mais la solidarité n’est pas l’assistance. Elle permet au contraire de concilier le goût de l’initiative personnelle et la sécurité à laquelle nous aspirons légitimement.

Pour mettre en œuvre cette solidarité, il faut, bien sûr, des réformes. Et quoi qu’on en ait dit, je le crois profondément. Je rappelle que personne, dans l’histoire de notre République, n’a plus que le Général de Gaulle, transformé notre société. Je continuerai, pour ma part, et à ma place, dans cette voie.

Des réformes donc ! Mais lesquelles et comment ?

Je voudrais tout d’abord dire que mon expérience gouvernementale m’a enseigné que l’évolution nécessaire des choses devait être recherchée de façon différente selon leur nature.

Il y a des domaines où l’on peut et où il faut apporter des améliorations progressives.

C’est le cas de la famille, cellule de base de notre société, lien privilégié où la très grande majorité des hommes et des femmes de notre pays ont choisi de faire leur bonheur. Il faut la préserver et l’aider davantage non seulement sur le plan matériel mais aussi sur le plan moral.

C’est le cas de la commune qui doit bénéficier d’une beaucoup plus grande autonomie de permettre à tous les citoyens qui la composent de participer directement aux responsabilités de sa gestion.

C’est le cas de la libre association des hommes pour l’organisation de ce qui touche au cadre de vie : urbanisme, équipements collectifs, écologie. Le seul moyen en effet d’éviter la répétition de certaines erreurs consiste à substituer aux actions administratives forcément arbitraires et systématiques, les initiatives de ceux qui vivent sur le terrain. La qualité de la vie, ne l’oublions pas, est le domaine privilégié de la différence parce qu’elle est l’expression renaissante de la culture.

Et je pense d’ailleurs que trop souvent la mainmise des partis politiques sur ces associations empêche les citoyens d’y exercer pleinement leurs responsabilités.

C’est le cas de l’emploi des deniers publics. Compte tenu de l’importance de plus en plus grande des interventions publiques dans l’économie et du poids croissant des charges sociales de la Nation, l’État doit avoir pour souci constant de veiller de façon permanente au bon emploi de l’argent public et de donner l’exemple d’une gestion rigoureuse éliminant peu à peu le gaspillage, les abus et les dépenses inutiles.

C’est le cas enfin, pour ne prendre que quelques exemples, de la concertation indispensable avec les organisations syndicales et professionnelles, non pas pour leur transférer un pouvoir de décision qui n’appartient qu’à la puissance publique, mais pour élaborer réellement et honnêtement avec les solutions les mieux adaptées aux problèmes qui se posent à nos concitoyens. Un État sûr de son autorité ne craint pas en effet la concertation véritable. L’autoritarisme est le masque de la faiblesse.

Mais il y a des domaines où les améliorations partielles aussi justifiées soient-elles, ne font qu’ajouter à la confusion. Dans ce cas, la réforme ne consiste pas à amender et à améliorer, il faut procéder à une refonte complète d’un système.

C’est le cas maintenant, j’en ai acquis la conviction, de notre système fiscal, reconnaissons-le, trop complexe, insuffisant et injuste. La fiscalité de demain devra bien sûr, permettre une plus juste appréciation des revenus mais elle devra être assise non seulement sur la dépense et les revenus mais aussi sur le capital.

C’est le cas également des rapports entre l’homme et l’État, entre l’administré et l’Administration. Le progrès, aujourd’hui consiste à donner à chaque citoyen une maîtrise accrue sur sa vie quotidienne. Les peuples en marche vers la démocratie se sont d’abord débarrassés des barons et des princes qui monopolisaient le pouvoir. Par l’élection, expression périodique de la démocratie, ils ont obtenu de choisir les représentants qui exercent ce pouvoir en leur nom. Le moment est désormais venu où cette forme de démocratie apparaît à son tour insuffisante. Les citoyens veulent aujourd’hui passer de l’exercice périodique de la démocratie à des formes originales de démocratie du quotidien. Vous sentez bien autour de vous cette aspiration de plus en plus pressante de chacun à choisir sa vie, sa maison, sa rue et le paysage de sa rue, son travail et l’organisation de son travail.

La démocratie que nous devons inventer doit permettre l’exercice continu de la responsabilité individuelle, ce qui suppose une transformation profonde de l’Administration, de ses méthodes, de ses structures.

C’est le cas enfin, et pour prendre un dernier exemple, de la participation. Vous savez combien cette idée nous est chère. Pour être effective, la participation suppose non seulement un droit à l’information, l’accès aux responsabilités, mais également une meilleure diffusion de la propriété par l’association de tous au capital. Voilà les bases de la véritable et nécessaire réforme de l’entreprise.

Je reste persuadé qu’il existe dans le pays une majorité pour appuyer une telle politique. Pour la mener à bien, j’aurais souhaité que l’occasion soit donnée à cette majorité de s’affirmer rapidement et sans équivoque. Il n’en a pas été ainsi.

Reste, bien entendu, les problèmes conjoncturels, et Dieu sait qu’ils sont nombreux et importants. Aujourd’hui, mon successeur a reçu certaines assurances, notamment pour engager la lutte contre l’inflation, problème qui, de tous, est celui qui m’a le plus préoccupé. Il dispose pour ce faire du Ministère des Finances. Je ne doute pas de sa volonté et je connais sa compétence. Je souhaite de tout cœur qu’il réussisse.

Mais dans le domaine politique, il est à craindre que la combinaison à têtes multiples et à autorité diffuse, échafaudée sur les partis, n’ait ni la force ni l’élan nécessaires pour mener notre majorité à la victoire. Il ne faudrait pas que renaissent ces coalitions que nous avons connues et qui n’ont pour but que de s’approprier le pouvoir, pour ciment que l’intérêt électoral et qui tendent désespérément de s’élargir dans le vain espoir de tenir debout.

Alors viendrait le temps des déboires et des désillusions !

Déjà le doute s’insinue dans bien des esprits.

Il y a ceux qui disent : tout est perdu, il faut se résigner à l’inévitable expérience collectiviste.

Il y a ceux qui disent : nous n’avons pas les moyens de gagner, il faut pactiser avec nos adversaires.

Il y a ceux qui disent : quel malheur, la France est coupée en deux, il faut trouver un compromis quitte à perdre notre moitié majoritaire et nous contenter de l’autre.

Eh bien ! Non ! Je n’accepterai jamais que les Français qui nous ont fait confiance pour promouvoir une société de justice et de liberté soient contraints, sous de fallacieux prétextes à de continuelles reculades. Je n’accepterai jamais de voir chaque concession de notre part accueillie par un redoublement d’impudence et d’audace de la part de ceux qui nous combattent depuis près de vingt ans.

Il ne s’agit pas bien sûr d’entrer prématurément en campagne électorale. Mais l’action politique, la plus noble des actions puisqu’elle conditionne le destin des hommes, est une action permanente.

Que fait l’opposition, et avec un certain succès, si ce n’est de mener un combat politique permanent. L’ignorer ou le sous-estimer est dangereux. Telle n’est pas mon intention. J’ai déclaré il y a quelque temps, m’adressant aux élus de notre Mouvement : je vous conduirai à la victoire en 1978. Eh bien ! je déclare aujourd’hui que ma volonté et ma conviction n’ont pas changé.

Je suis en effet résolu à contribuer à notre victoire parce que je me refuse à laisser des millions de citoyens qui nous ont fait confiance attendre dans la résignation que se joue leur sort, parce que des élections cela se prépare, certes grâce à l’action efficace et soutenue d’un gouvernement responsable mais aussi par l’explication sans relâche de ce que nous croyons, de ce que nous voulons. Il faut convaincre les Français que nous sommes véritablement porteurs d’espérances.

Porteurs d’espérances ! C’est une grande ambition mais aussi une lourde charge que d’autres ont assumée avant nous. Comme eux, fidèles à leur exemple, nous ne nous déroberons pas !

Mon rôle au milieu de vous, est de montrer le chemin, et je vais le faire.

Après tout, si l’honneur et le risque m’en reviennent, c’est que d’autres, plus anciens, n’ont pas cru devoir, ou n’ont pas pu, prendre la charge.

Il serait plus agréable que la politique n’obéisse pas à des lois dures et impitoyables. Malheureusement, il n’en est pas ainsi. La politique est et a toujours été un combat, tout est engagé, le présent, l’avenir de nos enfants, celui de la France.

C’est pour cela et non par je ne sais quel goût de la lutte que j’appelle chacune et chacun d’entre nous à engager toutes ses forces et toute son âme dans cette bataille, et sans attendre.

Je m’adresse à tous les Français sans exclusive, aucune, pour que se constitue le vaste mouvement populaire que la France a toujours su tirer de ses profondeurs lorsque le destin paraît hésiter.

Par vous, autour de vous, au-delà de vous, nous allons essayer de créer le Rassemblement de toutes celles et tous ceux qui cherchent, avec obstination, à se faire entendre, à travailler, à préserver leur liberté de choix et d’expression et qui aspirent à plus de justice, à plus de bonheur sans pour autant renier les principes auxquels ils sont attachés.

Cela suppose de notre part de la patience, de la ténacité, de la grandeur, mais le Général de Gaulle et Georges Pompidou nous ont habitués à fréquenter les rudes sentiers qui obligent les Français à se surpasser pour être eux-mêmes dans la victoire.

Le Grand Rassemblement auquel je vous convie, qui devra allier la défense des valeurs essentielles du Gaullisme aux aspirations d’un véritable travaillisme français, et qui permettra à la majorité de se renforcer pour continuer son œuvre, vous allez devoir en délibérer lors des Assisses Nationales Extraordinaires que notre Secrétaire Général, Yves Guéna, réunira à ma demande avant la fin de l’année.

Vous donnerez ainsi l’exemple de l’effort que chaque citoyen devra accomplir pour que ce Rassemblement triomphe.

Cela suppose pour nous des modifications profondes, de nos statuts et de nos structures.

Ne vous y trompez pas, il nous faudra aussi perdre certaines de nos habitudes, changer nos mentalités, renoncer à la facilité de nous retrouver confortablement entre nous pour parler du passé. Il sera un peu pénible, un peu déroutant d’accueillir des nouveaux venus, parfois d’anciens adversaires, mais le bien de la France est à ce prix.

Vous croyez être assez nombreux. Je vous dis : pas assez.

Vous croyez être assez généreux. Je vous dis : pas assez.

Vous croyez être assez forts. Je vous dis : pas assez.

Chacun de vous sent, chacun de vous sait que les prochaines législatives seront décisives pour le pays et rien ne doit être épargné pour les gagner.

Je sais que la grande majorité d’entre vous souhaite ce Rassemblement. Ensemble nous le ferons. Mais il faut m’aider, me suivre, m’encourager par votre soutien sans défaillance.

Je vous promets quant à moi que je mettrai toutes mes forces, tous mes moyens, tout mon cœur, au service de la France dans le respect de la République et des Institutions.

Discours au Congrès fondateur du RPR,5 décembre 1976

Amis anciens et nouveaux, je vous salue.

Nous voici réunis pour témoigner que le peuple de France, comme il l’a toujours fait dans les heures difficiles, se rassemble et se retrouve.

Notre histoire est celle d’une Nation de la vieille Europe qui a donné au monde moderne l’essentiel de ses valeurs, qui n’a jamais cédé lorsqu’elles étaient menacées, qui a su en faire le patrimoine de chacun d’entre nous.

Sur ces valeurs, nous avons fondé notre prestige, exalté notre unité. Nous avons bâti l’idéal d’une société de liberté, affirmant la dignité et la responsabilité de ses membres. Qui ne reconnaîtra que ces exigences tiennent au cœur de l’immense majorité de nos concitoyens, et qu’elles valent tous les sacrifices, lorsqu’elles sont menacées ? Or, les menaces s’accumulent. Il est temps d’en prendre clairement conscience.

Ce qui menace notre société

La menace tient d’abord à notre propre doute. Une inquiétude confuse commence à se répandre. Le spectacle d’un monde divisé, déséquilibré, déchiré ; celui de son désordre économique, de ses inégalités, de ses injustices ; la rupture d’une croissance exceptionnelle tant par sa durée que par sa vigueur ; l’apparition, dans notre société, de formes nouvelles de désarroi moral ; l’irruption de la violence que les techniques modernes d’information font pénétrer dans chaque foyer : tout cela conduit beaucoup d’entre nous à s’interroger anxieusement sur l’avenir : allons-nous vivre dans l’éphémère, la destruction permanente de toutes les certitudes, le désordre des valeurs ? Chacun sent que la cohésion de la Nation et la fermeté de ses décisions sont d’autant plus nécessaires et que les Français doivent, pour cela, se rassembler.

Mais sachons reconnaître que nous n’avons pas toujours, en tant que citoyens et en tant qu’hommes, défendu avec assez de volonté notre héritage, lutté avec assez de courage pour l’accroître, compris avec assez de cœur qu’il fallait l’adapter à ce que demandent les hommes et les femmes d’aujourd’hui. Tel est bien pourtant le devoir de citoyens responsables : non point céder à la lassitude et se résigner à la politique du pire ; non point participer à la division de la France par des slogans ou des idéologies qui exacerbent l’affrontement et l’intolérance.

Ne laissons ni affaiblir, ni dévoyer les valeurs essentielles dont si peu de pays au monde donnent l’exemple. Il est temps, avant que ne s’engagent les compétitions électorales, que nous nous retrouvions en nous-mêmes afin de compter tous ceux qui veulent, pour la France, dépasser les clivages politiques et apaiser les luttes partisanes.

Oui, le moment est venu de nous ressaisir. En nous abandonnant nous-mêmes, c’est la France que nous abandonnons. Rendons l’espérance à notre pays, proposons à sa jeunesse une cause qui l’enthousiasme, suscitons l’engagement de tous ceux qui croient à la France. Que cet appel soit entendu et qu’il soit épargné aux Français d’être conduits à y souscrire plus tard et dans le drame.

Car la vraie menace est en face de nous. La prétendue alternative que nous propose le programme socialo-communiste est dangereuse. Elle est inefficace. Elle est illusoire. Elle est la plus mauvaise réponse au débat sur les libertés. Ouvrons les yeux : bien peu de pays sont libres dans le monde. La plupart vivent sous la dictature des armes ou des idéologies. Beaucoup chez nous n’ont pas oublié ce que c’est de vivre sans liberté. Les jeunes, eux, n’ont heureusement pas connu cela, mais leur vigilance ne doit pas s’endormir : à défaut de souvenirs, qu’ils aient des pressentiments.

Que l’on m’entende bien : je ne mets en cause ni la bonne foi ni la raison d’aucun de nos concitoyens. Je ne dénonce pas des hommes, je dénonce des structures, celles du programme commun, je dénonce la logique de son développement ; il repose, en effet, sur la mise en place d’une bureaucratie qui conduira à supprimer les libertés. Ne vous y trompez pas : les mêmes causes produisent les mêmes effets.

Il n’y aura pas de collectivisme à la française. Quelles qu’aient pu être les illusions ou les ambitions de ceux qui s’y sont prêtés, partout dans le monde où l’on a mis en place les principes socialo-communistes, les libertés ont disparu. Et l’on n’a jamais vu une société devenue collectiviste rétablir ensuite les principes libéraux. Je ne critique pas ici les régimes qui ont estimé que ce type de société convenait à leur peuple. Je dis simplement qu’il ne convient pas à la France.

Et si, au-delà des conséquences politiques du programme commun, j’examine ses propositions économiques, je suis conduit à la même inquiétude. Si les nationalisations ont été justifiées dans le passé, lorsqu’il s’agissait de transférer à la Nation certains secteurs essentiels à son activité, celles que nous promettent aujourd’hui les socialo-communistes concernent des pans entiers de notre économie et ne peuvent avoir pour résultat que de tuer l’initiative, de généraliser l’irresponsabilité et d’engendrer le déficit.

Nous ne voulons pas d’une société où la méfiance vis-à-vis de l’homme, érigée en principe, conduit à transférer à un État de plus en plus puissant et omniprésent ce qui relève de la responsabilité de chacune et de chacun d’entre nous.

Quant à l’autogestion… Elle demeure un mythe. Les rares exemples qu’on en connaisse ont été marqués par l’échec ou par l’anarchie.

Aucune de ces recettes n’est adaptée au dynamisme nécessaire d’une économie moderne. Elles ne peuvent conduire qu’à la récession et ce n’est pas par hasard que tous les pays qui les ont appliquées ont connu et connaissent un développement économique et donc un progrès social inférieurs aux nôtres.

Y a-t-il au moins, dans le programme commun, la réponse à la grande question qui tourmente le cœur des hommes et qui, je le sais, préoccupe plus que jamais peut-être nos concitoyens : la question de l’injustice ? L’expérience montre que le collectivisme ne crée pas une société plus juste. Partout, dans les régimes de ce type, on a substitué aux inégalités d’autres inégalités, aux hiérarchies qu’on voulait abattre d’autres hiérarchies : celle de l’État, celle du parti, celle du syndicat.

Je répète que je ne critique pas ce système dans les pays qui l’ont choisi. Je dis que je n’en veux pas pour la France. Car l’injustice, ce n’est pas par l’idéologie, par la bureaucratie, par leur ordre implacable que nous la réduirons. C’est par d’autres voies.

Voilà les principales raisons du refus que j’entends opposer à la mise en œuvre du programme commun. Nous, nous cherchons autre chose qu’un système qui détruit les libertés, n’apporte pas de solution économique adaptée aux exigences de notre pays, ne donne pas de réponse satisfaisante à l’immense aspiration de nos concitoyens pour plus de justice.

L’espoir pour la France, pour nous-mêmes, pour nous tous et pour ceux qui ont besoin de nous, ne le laissons pas mourir. Ne nous laissons pas tromper. Ne nous faisons aucune illusion sur le processus qu’enclencherait une victoire des partisans du programme commun aux élections législatives. Ce ne serait pas l’alternance démocratique mais un processus irréversible.

Conscients de nos difficultés actuelles, de la nécessité pour la majorité de se ressaisir, convaincus du caractère inefficace et néfaste de ce que nous promet le programme commun, certains que la victoire du collectivisme tue l’espoir, nous devons susciter un élan puissant qui transformera notre combat en victoire.

Les grands objectifs du rassemblement

Pour rassembler les Français, nous devons dissiper leurs doutes en marquant quelques repères solides.

La France, aujourd’hui, n’attend pas un programme de plus. Ce qu’elle attend de nous, c’est que nous lui donnions des objectifs. Gardons-nous, bien sûr, d’un optimisme simpliste. Lequel d’entre nous n’éprouve point, parfois, de la lassitude, voire de l’angoisse devant le cours des choses et la condition des hommes ? Quels hommes serions-nous donc si nous n’entendions pas les questions que l’on pose autour de nous, les questions que l’on nous pose ?

Nous avons aussi le devoir de dire que les forces de l’espoir sont, au bout du compte, plus puissantes que celles de l’abandon. Nous avons la volonté de continuer, non pas pour conserver mais pour progresser, non pas pour durcir dans l’égoïsme et dans la nostalgie, mais pour porter l’espérance des Françaises et des Français.

Dans notre action, nous tiendrons ferme sur quelques valeurs essentielles : la liberté, la responsabilité, l’abolition des privilèges, l’épanouissement de la démocratie dans la vie quotidienne.

Il faut d’abord défendre la liberté

Nous nous le devons à nous-mêmes, nous le devons aussi à tous les peuples du monde pour qui notre terre est la terre de la liberté.

Mais si l’accord est unanime sur l’objectif, certains répugnent à prendre les moyens de l’atteindre. Pour que les Français restent libres, nous savons, nous, que la France doit préserver son indépendance. C’est-à-dire le pouvoir de se déterminer elle-même, selon ce qu’elle croit être son intérêt ou sa mission, sans avoir à rechercher à l’extérieur approbation ou consignes.

Or, l’indépendance n’est qu’un leurre si ses deux fondements essentiels ne sont pas assurés :

Pas d’indépendance sans une économie forte et équilibrée. Dans le désordre monétaire international que nous subissons, au milieu des bouleversements profonds et durables qu’entraîne la hausse continue du prix de l’énergie et des matières premières, l’État doit, plus que jamais, fixer par un plan national les objectifs et les disciplines du développement économique. Pour maintenir la valeur du franc, la gestion des fonds publics et des fonds sociaux doit être plus rigoureuse. Pour assurer les bases du progrès de demain, notre puissance industrielle doit être renforcée de même que la recherche scientifique et les technologies de pointe doivent être fermement soutenues.

Pas d’indépendance non plus sans une défense efficace, fondée sur la dissuasion nucléaire, relevant des seules autorités de la République. La Nation doit consacrer des ressources accrues à l’équipement de son armée dont la modernisation va probablement exiger que, progressivement, le volontariat se substitue à la conscription.

Sur ces bases, nous pourrons continuer à conduire une politique étrangère sans allégeance aucune et notamment aux superpuissances.

Il y va bien sûr de notre intérêt. Mais il y va aussi de l’intérêt de la communauté internationale à laquelle une France indépendante, cohérente dans ses choix, déterminée dans ses actions, apporte des conceptions originales et généreuses. Prenons-y garde : l’extraordinaire capital d’amitié que nous conservons dans le monde peut s’effriter très vite s’il n’est pas consolidé par une politique de coopération à la fois généreuse et sans complaisance.

Quant à l’Europe, si nous voulons un avenir qui ne soit pas fait de bruit et de fureur, si nous voulons maintenir les principes d’une société, les principes d’une démocratie que nous avons en commun, il faudra nous entendre. Certes, la tâche n’est pas facile. Nous devons participer avec réalisme et activement à l’édification d’un ensemble uni et fort, respectueux de notre souveraineté et de celle de chacune des nations qui la composent.

Nous ferons l’Europe sans défaire la France. Nous en avons la volonté politique.

Dans un pays dont l’indépendance sera ainsi préservée, les Français pourront renforcer leurs libertés. Encore ne suffit-il pas d’énumérer ces libertés comme trop de marchands de rêve se sont mis, depuis peu, à le faire. Ce qui compte, c’est de comprendre et d’assurer les conditions fondamentales qui en permettent l’exercice.

C’est, au premier chef, un État capable de faire respecter la cohésion de la Nation et de garantir à chaque citoyen la sécurité de sa personne et de ses biens. Le peuple français s’est donné, en adoptant la Constitution de la VeRépublique, des institutions démocratiques et modernes. Leur défense intransigeante reste une donnée permanente de notre action.

C’est, en second lieu, une justice sereine, dégagée des passions, rendue plus humaine et plus proche pour ceux qui ont recours à elle, sévère envers ceux qui s’opposent aux lois de la République.

C’est enfin le renforcement, parmi le plus grand nombre, du sentiment de la sécurité et de l’équilibre. Les droits économiques, sociaux et culturels du citoyen doivent être développés. Le droit au travail, notamment, doit être garanti. Il faut aussi diffuser la propriété ; non seulement la propriété traditionnelle — celle de la maison, du champ, du magasin ou de l’atelier — mais aussi la propriété mobilière trop souvent réservée à un petit nombre de détenteurs du capital.

Dans cette perspective, l’épargne individuelle doit être protégée. Elle est nécessaire tant à l’économie qui y puise ses ressources qu’aux individus qui y trouvent une sécurité ; les Français en ont le goût naturel. Mais il y aurait tromperie intolérable si les avoirs péniblement accumulés se transformaient en peau de chagrin par le jeu d’un prélèvement occulte et permanent. Il faut mettre en œuvre les solutions pour l’empêcher.

Mais la priorité demeure la lutte contre l’inflation qui est la cause profonde du mal. La France traverse actuellement une crise économique. Le Premier ministre a entrepris avec compétence et ténacité de la combattre. Ce combat nous concerne tous. Nous ne le gagnerons qu’avec l’accord profond d’un pays confiant et rassemblé. Certains, par intérêt ou par malice, voudraient nous voir contribuer à l’abaissement de l’État. Eh bien, non ! Nous sommes trop soucieux de l’intérêt général, trop fidèle aux enseignements que nous ont transmis le général de Gaulle et Georges Pompidou pour nous prêter à de telles manœuvres. D’ailleurs, si l’on excepte les réactions démagogiques d’une opposition irresponsable, quel Français peut sérieusement croire que l’on peut à la fois lutter contre l’inflation et le chômage et refuser à l’État les moyens du redressement ?

Développer les responsabilités

Tel est le deuxième objectif majeur que nous nous assignons.

Si nous laissons, en effet, aller le cours des choses, il y a grand risque que les individus soient de plus en plus paralysés dans le réseau de contraintes en tous genres qui les enserre du berceau à la tombe. Nous avons au contraire le projet d’une société où chacun soit davantage responsable de ses actes. Pour y parvenir, il faut développer le goût d’entreprendre, de sorte que celui qui veut créer ou développer une unité économique à l’échelle humaine ne se heurte pas à une multitude d’obstacles accumulés par un corps social bloqué et timoré.

Il faut reconnaître au chef d’entreprise la place qui lui revient en tant que créateur d’emplois et de richesses et cesser de le rejeter au premier échec, ou, à l’inverse, lorsque sa réussite est trop éclatante. Le même changement d’attitude est souhaitable vis-à-vis des professions indépendantes.

Prisonniers d’une vision superficielle de l’évolution économique et sociale, certains pensent que le commerçant ou l’artisan isolé doit laisser la place à des organisations plus structurées. Je suis, pour ma part, convaincu qu’artisans et commerçants doivent continuer à jouer une double fonction de progrès : une fonction économique d’abord, parce qu’ils sont les seuls à pouvoir rendre certains services spécialisés ou proches ; une fonction sociale ensuite, parce qu’autour d’eux se tissent, dans le quartier ou le village, des relations quotidiennes d’amitié ou de simple voisinage.

C’est dans le même esprit que doit être poursuivie la modernisation de notre agriculture si nécessaire tant à l’équilibre de notre société qu’à sa puissance économique.

L’exercice de la responsabilité personnelle n’est évidemment pas le monopole des travailleurs indépendants. Le développement de la participation et de la responsabilité doit aussi assurer la nécessaire réforme de l’entreprise. Tous les travailleurs, quel que soit leur place ou leur niveau, doivent pouvoir participer à l’organisation de leur travail et au partage des fruits de leurs efforts. Ils ont droit à une formation professionnelle qui leur donne la responsabilité de choisir et de s’élever. La fonction de l’encadrement, essentielle à l’impulsion et à la bonne marche de l’entreprise, doit être reconnue et renforcée.

D’une structure hiérarchique où les travailleurs sont encore trop souvent contraints à une obéissance passive, nous avons en effet l’ambition de passer à une organisation fonctionnelle où chacun prend la part de responsabilité qui lui incombe. Nous appelons cela la participation. C’est pour nous la dignité des hommes et des femmes de France qui est en cause.

Notre troisième ambition est d’ABOLIR LES PRIVILÈGES, c’est-à-dire les inégalités qui ne trouvent pas leur origine dans le mérite ou le travail. La société où nous vivons est encore marquée par des comportements ou des situations qui sont des séquelles de l’Histoire. Notre double exigence de liberté et de responsabilité nous les rend intolérables.

Il y a d’abord les privilèges de l’argent. Il est juste que la valeur individuelle, l’ardeur au travail, la conscience professionnelle soient rémunérées et comme ces vertus varient selon les individus, il est juste que les rémunérations soient différentes. Mais il n’est pas juste que, par une sorte de grâce d’état ou de naissance, certains continuent à jouir de privilèges immérités. Il est insupportable que d’autres puissent s’enrichir par la spéculation ou la fraude. Il est temps de procéder à une refonte complète de notre système fiscal qui doit être radicalement simplifié. Il faut trouver un équilibre plus satisfaisant entre la part qui doit être prélevée sur la dépense, celle qui doit l’être sur le revenu et celle qui doit l’être sur la fortune.

Mais il y a d’autres privilèges que ceux de l’argent. Il y a les privilèges du pouvoir. Dans un pays marqué par plusieurs siècles de pouvoir central absolu, c’est bien sûr l’administration qui peut être tentée de s’octroyer de tels privilèges. Il n’est pas douteux aujourd’hui que l’État en France n’a pas toujours su éviter les pièges de la bureaucratie. Et les Français en sont venus au point où parfois ils comprennent mal leur administration. Certes, ils l’appellent souvent pour combler une injustice, accorder un avantage ; mais ils la récusent bientôt en la jugeant envahissante et importune. C’est qu’après avoir su faire converger les efforts pour doter le pays de moyens de production et d’équipements puissants, après avoir assuré une protection sociale sans précédent, elle s’est, malgré la qualité et le dévouement de ses fonctionnaires, engluée dans le détail. Les textes ont été multipliés si bien que les lois, décrets, arrêtés, circulaires, constituent aujourd’hui un maquis quasi impénétrable non seulement à cause de leur abondance, mais aussi du fait de leur incessant changement. Dès lors, notre système juridico-administratif ne continue à fonctionner que parce qu’un grand nombre de textes ne sont pas en fait appliqués ou que l’on peut y déroger avec tous les risques d’arbitraire que cela comporte. Un effort puissant de simplification est donc nécessaire pour que l’administration retrouve sa véritable vocation qui n’est pas de gérer le système bureaucratique mais de servir le citoyen, qui n’est pas d’empêcher d’agir mais de faciliter la vie de tous.

Il s’agit, au sens strict du mot, d’une révolution : il faut rendre leur État aux Français.

Il y a les privilèges du savoir. La connaissance et la compétence déterminent de plus en plus la place de l’individu dans la société. Mais il ne faut pas que le savoir soit l’apanage d’élites restreintes issues de milieux sociaux privilégiés. Il faut poursuivre avec ténacité l’œuvre de démocratisation de l’enseignement que nous avons entreprise, promouvoir l’égalité des chances, donner davantage à chacun la possibilité, tout au long de son existence, de perfectionner sa formation initiale et de participer aussi à la grande aventure de la science, de l’art et de la création.

Telles sont les conditions du progrès social et de la vraie justice. Telles sont aussi les voies de l’accomplissement personnel, tant il est vrai qu’au-delà du savoir, c’est la culture partagée et vécue qui rend à l’existence sa noblesse et sa saveur.

Il faut ouvrir à tous la culture pour vivre. Il y a presque deux siècles maintenant, dans un mouvement d’enthousiasme et de générosité dont il a le secret, le peuple de France a proclamé aux yeux de l’univers l’abolition des privilèges. L’évolution de notre société et de notre sensibilité rend maintenant plus intolérables ceux qui subsistent encore ou ceux qui se sont recréés. Je vous invite à redonner toute leur signification, toute leur force, toute leur vie, aux beaux et grands principes de notre République : l’égalité et la fraternité.

Il nous appartient enfin de promouvoir la DÉMOCRATIE DU QUOTIDIEN. Plus libre, plus responsable, plus maître de lui-même, le citoyen d’aujourd’hui n’accepte pas de se dessaisir de toutes ses prérogatives aux mains de ceux qui le gouvernent. Il veut aussi, entre deux scrutins, continuer à prendre la parole et faire connaître son point de vue sur les décisions ou les actes qui façonnent sa vie quotidienne. Les Français ont droit à un environnement digne d’eux, c’est-à-dire à une maison, à un quartier, une ville, une nature qui soit à l’échelle humaine. L’homme doit redevenir la mesure de toutes choses

Il a fallu, bien sûr, dans les deux décennies qui viennent de s’écouler, consentir un effort important d’équipement. Mais nous avons parfois le sentiment d’avoir payé un prix très lourd. Le prix de villes qui se vident peu à peu de leurs habitants traditionnels et qui lentement écartent d’elles les humbles et les isolés. Le prix de banlieues souvent maussades, entassant une population transplantée et déracinée, le prix de côtes détériorées, de rivières abîmées, celui du bruit et de toutes les formes de violence.

Oui, il est temps, sans vaine nostalgie du passé, de recréer un paysage pour les Français, tels qu’ils sont, tels qu’ils se veulent.

Inventer la démocratie du quotidien, c’est éliminer toute forme de ségrégation, notamment dans le logement ; c’est lutter pour qu’un urbanisme concerté triomphe de l’urbanisme imposé, c’est mettre fin au paradoxe que constitue un habitat collectif sans véritable vie collective. C’est aussi diffuser une information objective sur l’environnement et se donner les moyens de contrôler le progrès technologique et de sauvegarder le milieu naturel. Le combat pour l’écologie, loin d’être un rêve fumeux, est à la fois l’aboutissement et la chance nouvelle de notre développement. À travers l’aspiration à la qualité de la vie, nous assistons, plus profondément, à un effort des nations pour retrouver leur génie propre et pour décaper la pellicule grise sous laquelle les fumées d’usine ont dissimulé leur visage. La qualité de la vie est le domaine privilégié de la différence, parce qu’elle est l’expression renaissante de la culture.

Pour permettre cette renaissance, le meilleur moyen est encore de rendre la parole aux Français. Aussi devons-nous redonner force aux collectivités intermédiaires. Nos communes, notamment, constituent un capital inestimable : des équipes rompues à l’action concrète sur le terrain, une administration au plus près du citoyen, la certitude du contrôle démocratique par le jeu du suffrage.

Ce que nous proposons, c’est de renforcer l’autonomie des communes, en les dotant de finances saines, en supprimant les interventions abusives de l’État et en transférant toutes les attributions qui, intéressant la vie quotidienne des Français, sont mieux exercées par des collectivités proches que par un pouvoir lointain. Ainsi confortées et sûres d’elles-mêmes, ces collectivités pourront s’ouvrir davantage aux citoyens, reconnaître leur droit d’initiative, faire confiance aux associations qui auront prouvé leur dévouement au bien public. Elles pourront donner directement la parole à la population en l’interrogeant sur les problèmes qui concernent la vie et le développement de la cité.

En fin de compte, notre plus haute ambition en ce domaine, le sens profond de la démocratie au quotidien, c’est de retrouver la joie de vivre ensemble, la générosité et la chaleur dans les relations de travail ou de voisinage. Les jeunes nous ont montré la voie au cours des années récentes. Peut-être l’ont-ils fait parfois avec quelques maladresses ; mais ils nous ont prouvé combien leur exigence de fraternité pouvait être féconde pour peu que nous sachions proposer de justes causes aux énergies que certains tentent de dévoyer.

La vie quotidienne, c’est aussi pour le plus grand nombre d’entre nous, la vie en famille. Bien que les faux prophètes aient prédit sa disparition, la famille est plus que jamais le lieu privilégié du bonheur. C’est en son sein que s’instaure le dialogue le plus fructueux entre les générations, que s’acquiert le sens de la loyauté et de la tolérance. C’est sur elle que se construit la force de la Nation, qui puise dans le nombre de ses enfants les moyens d’exprimer sa solidarité envers ceux qui ont besoin d’elle.

L’État doit garantir à la famille la santé matérielle, ce qui signifie que des mesures juridiques, économiques et sociales doivent parachever et simplifier notre législation, afin d’assurer un juste équilibre entre ceux qui assument des charges familiales et ceux qui n’en assument pas.

Voilà nos objectifs. Voilà notre combat. À nous tous de puiser en nous-mêmes la force de réussir. Ce sera la force de la France rassemblée.

Rassemblement dans l’action politique

La tâche qui nous attend maintenant, c’est de construire le Rassemblement. « Comment vont-ils donc faire ? », s’interrogent certains, sceptiques ou faussement inquiets.

Je le proclame ici bien nettement : nous nous rassemblons pour la démocratie et contre tout ce qui la menace. Nous nous rassemblons dans la majorité. Nous nous rassemblons pour agir et proposer, et non pour dénigrer.

Rassemblement pour la démocratie d’abord

L’une des vertus fondamentales du gaullisme a toujours été de savoir refuser, quand il le fallait. Eh bien ! Nous dirons non à tout ce qui peut nuire à la démocratie ! Nous n’accepterons pas que tombe sur notre pays la nuit de la dictature, et ceci d’où qu’elle vienne : nous repoussons avec la même détermination les idéologies perverses du fascisme et du collectivisme. Combien sont vaines et ridicules les insinuations de ceux qui veulent nous présenter sous le visage de l’autoritarisme !

Nous avons, nous, en matière de démocratie, notre tradition et nos références. Je vois cheminer la calomnie. J’entends les malveillants colporter le mensonge pour susciter la peur ! Mais qu’importe ! Laissons les bêtes de l’ombre à leurs glapissements ! Poursuivons notre route.

Le meilleur moyen de défendre la démocratie, c’est de la rendre plus efficace et plus vivante. Pour cela, nous devons faire en sorte que tous les citoyens participent davantage au fonctionnement des institutions de la République. L’une des missions essentielles du Rassemblement sera de permettre cette participation : nous allons l’organiser pour qu’il soit un lieu de réflexion, de consultation, de suggestion et, si besoin est, de critique. Il ne faut pas laisser à une poignée de professionnels de l’activisme politique ni aux instituts de sondage le monopole d’exprimer, à leur façon, ce que pensent et veulent les Françaises et les Français.

C’est à vous de le dire. L’information réciproque et la communication entre les citoyens et le pouvoir aboutissent évidemment au Parlement, pièce essentielle de notre vie politique et civique. Je souhaite que les élus qui se réclameront de nous assument pleinement, par leur assiduité et leur capacité, la double fonction parlementaire :

D’abord, contribuer, par leurs initiatives, à l’élaboration de la loi.

Ensuite, contrôler efficacement l’action gouvernementale.

C’est à cette condition que sera maintenu un réel équilibre des pouvoirs, rempart et garant de la liberté et de la démocratie, et que s’établira l’indispensable accord entre la Nation et ses représentants.

Rassemblement pour la démocratie, mais aussi rassemblement dans la majorité !

Il ne doit y avoir aucun doute sur ce point. Actif et vigilant, le Rassemblement pour la République se situera résolument dans la majorité. J’ignore s’il sera toute la majorité, mais il sera tout entier dans la majorité.

Qui, d’ailleurs, pourrait croire que nous voudrions mettre en cause les institutions que le peuple français s’est données à l’appel du général de Gaulle ? Ces institutions reposent sur la primauté du chef de l’État qui doit définir les grandes orientations. Dans ce cadre, le gouvernement doit conduire la politique de la Nation avec l’appui d’une majorité parlementaire garante de l’efficacité du pouvoir législatif.

Voilà l’essentiel. Sur cela, nous ne saurions transiger.

La vraie menace contre nos institutions, elle est dans le programme socialo-communiste qui porte en germe la destruction de notre régime. Ne nous y trompons pas ! C’est à cela que la faiblesse ou la division de la majorité ouvrirait la voie. Si, au contraire, nous nous rassemblons, comme nous exprimons aujourd’hui la volonté de le faire, alors l’espérance revient grâce à nous et autour de nous. L’important, au bout du compte, c’est de nous organiser pour agir, ce qui veut dire pour proposer et progresser ensemble.

Certaines bonnes âmes, prenant sans doute leurs désirs pour des réalités, prétendent que nous allons nous essouffler, que le temps sera long jusqu’aux échéances fixées. Eh bien ! Je les rassure. Une aussi grande espérance ne retombe pas aisément.

Nous avons aujourd’hui donné naissance à un immense mouvement. Notre tâche désormais est de l’organiser pour atteindre le premier objectif que nous lui assignons : remporter, pour la démocratie et dans la majorité, les prochaines élections législatives. À cet égard, je tiens à préciser que c’est aux formations politiques et à elles seules, dans le cadre d’une nécessaire concertation, qu’il appartient de choisir leurs candidats et de donner leurs investitures

Au cours du premier trimestre 1977, et avant les élections municipales, je vous propose de mettre en place au niveau national, mais surtout aux niveaux local, départemental, régional, les structures nécessaires à la vie et à l’action de notre Rassemblement.

Il appartient à chacun d’entre nous de dire à tous ceux qui hésitent ou qui cherchent, sur quelles valeurs fondamentales nous nous sommes réunis, et de leur proposer de nous rejoindre. Moi-même, en me rendant parmi vous, à travers la France, je vous aiderai dans cette tâche.

Grâce à la réflexion engagée en commun au sein du Rassemblement, nos élus pourront, lorsque s’ouvriront les sessions parlementaires du printemps et de l’automne 1977, élaborer des textes législatifs qui, conformément aux objectifs de notre manifeste, traduisent notre volonté de progrès. Et qu’on ne vienne pas nous dire que nous sommes contre les réformes ! Depuis vingt ans, qui plus que nous a changé le visage de la société française ? L’action de réforme doit être poursuivie, avec réalisme, après une réflexion et une concertation approfondies, mais sans hésiter ni tergiverser.

Simultanément, l’année 1977 doit être une période d’action préparatoire pour les élections législatives. Les élections ne s’improvisent pas. Celles qui viennent moins qu’aucune autre. Pour les gagner, il faut un immense effort d’information et de mobilisation. Il faut susciter et entretenir un grand élan d’enthousiasme et d’espoir, non pas artificiellement créé par des états-majors, des dirigeants, des formations politiques, mais issu des profondeurs du peuple français. Nous devons tous nous sentir mobilisés au service de la démocratie et de la République, nous devons chaque jour accroître les rangs de ceux qui combattent avec nous.

L’heure n’est plus à l’attentisme ou au doute. Elle est à l’engagement. Ainsi, nous gagnerons, et notre Rassemblement, uni par une foi commune, renforcé par la victoire, pourra poursuivre l’œuvre de la VeRépublique.

Voici que s’achève maintenant cette journée du 5 décembre. Voici que se termine cette grande réunion où se sont rassemblés dans l’enthousiasme et l’espoir des milliers d’hommes et de femmes venus de toutes les provinces de notre pays. Nous savons ce qui nous réunit : mais cela ne suffit pas. Nous voyons avec émotion l’immense succès de notre appel : mais cela ne suffit pas. Au-delà de ce jour, par-delà cette enceinte, c’est vers tous les Français que je me tourne, vers tous ceux qui pressentent que notre société est en péril, mais qui n’osent encore élever la voix pour la défendre, vers tous ceux dont les yeux sont ouverts, mais dont les lèvres restent closes.

Oubliez les passions qui vous divisent, mais n’oubliez pas la ferveur. On ne prépare pas l’avenir dans le désenchantement. On ne défend pas la liberté dans le renoncement.

Le rassemblement que je vous propose exige de vous le contraire du consentement aveugle. Il est un mouvement de citoyens, c’est-à-dire d’hommes libres, qui refusent la fatalité de toutes les dictatures, du fascisme comme du collectivisme, d’hommes libres qui veulent façonner leur histoire de leurs mains.

Vous qui êtes intransigeants sur l’indépendance de la Nation,

Vous que l’esprit de justice exalte et que l’injustice révolte,

Vous qui ne tolérez ni l’amertume, ni le mépris, ni l’humiliation,

Vous qui connaissez le prix de l’effort, de la droiture, de la rigueur,

Vous qui savez que la responsabilité autant que le savoir fonde la dignité de l’homme,

Vous qui voulez être des hommes, mais des hommes solidaires,

Vous qui sentez que notre cause, c’est celle de la liberté,

À vous tous, je dis : n’attendez pas !

N’attendez pas pour défendre les droits civiques durement conquis et affermis par la République ; ils ne sont ni un don de la nature, ni un privilège du destin.

N’attendez pas pour servir une ambition nationale généreuse et humaine ; rejoignez-nous !

Notre peuple, dont c’est la grandeur d’être rebelle à la contrainte, a quelquefois besoin qu’on l’exhorte. Alors, il se rappelle son passé et étonne le monde. Le voici soudain réconcilié avec lui-même, réuni dans le même combat, consacrant toutes ses forces à défendre sa culture et sa société. Le voici rassemblé.

Citoyens et Citoyennes de mon pays, vous êtes les fils et les filles de ces hommes qui ont lutté dans notre longue histoire pour nous donner le droit d’être libres.

L’appel que je lance à mon tour n’est que l’écho de l’éternel appel des nations qui ne veulent pas mourir. C’est au Peuple de France que je m’adresse, Peuple qui sait comprendre, Peuple qui sait donner, Peuple qui sait dire non à ce qui l’avilit, Peuple une fois encore debout et rassemblé.

Vive la République,

Vive la France !

BILAN DU GOUVERNEMENTDE JACQUES CHIRAC1986–1988établi au printemps 1988

PRINCIPALES MESURES

1 — INSTITUTIONS

Rétablissement du scrutin majoritaire.

Relations confiantes entre Gouvernement et majorité parlementaire : sur aucun texte, pas une voix n’a manqué.

2 — JUSTICE

Réforme de l’instruction, permettant une meilleure protection des libertés individuelles.

Amélioration de la condition des magistrats.

Lancement de la construction de 20000 places de prison depuis mars 1986.

3 — SÉCURITÉ

Recul de la criminalité et de la délinquance : — 12 % en deux ans.

Démantèlement de plusieurs réseaux terroristes (notamment Action directe).

Otages : sept sur dix sont rentrés en France.

4 — DÉCENTRALISATION

Forte croissance des dotations de l’État aux collectivités locales.

Amélioration des textes, notamment sur la fonction publique territoriale.

1200 MF versés par l’État aux régions pour la rénovation des lycées.

5 — ÉCONOMIE

Liberté des prix, des changes, du crédit.

Droit moderne de la concurrence.

Déficit du budget de l’État réduit de 25 %.

70 milliards de francs de baisse d’impôts.

Privatisation de trente entreprises industrielles ou bancaires.

6 millions d’actionnaires, soit quatre fois plus qu’avant 1986.

6 — INDUSTRIE

Retour à l’équilibre des entreprises publiques naguère fortement déficitaires (exemples : Renault, sidérurgie, CDF).

Record battu en matière de création d’entreprises : 540000 en 1986–1987.

Plan d’action en faveur des PME-PMI (allègement des droits sur les mutations de fonds de commerce).

7 — AGRICULTURE

Réactivation des conférences annuelles agricoles et de la concertation avec les organisations professionnelles.

Allègement des coûts de production (frais financiers, cotisations sociales, charges fiscales…).

Succès à Bruxelles : le financement de la politique agricole commune est assuré, à un niveau suffisant, pour cinq ans.

Solidarité envers les zones défavorisées (montagne).

Politique d’aménagement rural.

Mutualisation du Crédit Agricole.

8 — ÉQUIPEMENTS — TECHNOLOGIES

Accélération spectaculaire du plan autoroutier (+5000 km) et du réseau TGV (interconnexion).

Relance réussie du bâtiment (seuil des 300000 logements à nouveau franchi) et des travaux publics.

Conquête de l’espace : Ariane5, Hermès, Colombus.

9 — AFFAIRES SOCIALES ET EMPLOI

Recul du chômage, principalement chez les jeunes

Sauvetage de la Sécurité sociale : équilibre assuré fin 1987 ; paiement des prestations garanti pour l’avenir.

Solidarité envers les nouveaux pauvres : création des compléments locaux de ressources (une activité + un revenu + une protection sociale).

10 — FAMILLE

Redressement du pouvoir d’achat des allocations familiales.

Création du statut de la mère de famille et de l’allocation parentale d’éducation.

Amélioration du régime fiscal (décote fiscale pour les familles modestes ; meilleure déductibilité des frais de garde ; réforme du quotient familial).

11 — ÉDUCATION — FORMATION — RECHERCHE

Plan pour la réussite scolaire.

Meilleure gestion de l’Éducation nationale (déconcentration).

Rattrapage du retard accumulé dans les subventions à l’enseignement privé.

Création du crédit d’impôt-formation (25 %).

Amélioration du crédit d’impôt-recherche.

12 — CULTURE ET COMMUNICATION

Loi de programme sur le patrimoine.

Loi de programme sur les enseignements artistiques.

Loi sur le mécénat.

Pluralisme audiovisuel.

13 — RAPATRIÉS

Remise totale des dettes d’installation.

Amélioration du régime des retraites.

Achèvement de l’indemnisation.

14 — OUTRE-MER

Retour à la paix civile

Référendum en Nouvelle-Calédonie.

Loi de programme pour les DOM avec croissance forte des engagements publics et défiscalisation des investissements.

Parité sociale globale engagée.

15 — EUROPE

Renforcement de la coopération franco-allemande.

Contribution décisive de la France à la réforme du système monétaire européen.

Participation active à l’accord sur le financement de la Communauté pour les années 1988–1992.

16 — DÉFENSE

Loi de programmation militaire assurant la modernisation de notre défense.

Maintien du consensus national autour de la dissuasion nucléaire, meilleur ferment de notre esprit de défense.

Progrès de la coopération franco-allemande.

Succès des propositions françaises devant l’Union de l’Europe Occidentale (charte de la sécurité européenne).

17 — AIDE AU DÉVELOPPEMENT

Initiatives françaises pour l’allègement de la dette.

Plan alimentaire proposé à nos partenaires et aux instances internationales.

Augmentation de 20 % de notre aide publique au développement (APD).

18 — POLITIQUE ÉTRANGÈRE

Action permanente et efficace en faveur des droits de l’homme.

Renforcement de notre influence en Afrique.

Redressement de l’image internationale de la France.

I. UNE FRANCE PLUS FORTE ET PLUS LIBRE

1 — Quand l’État français est mieux géré, l’économie tout entière et chaque Français en tirent bénéfice

 Un État mieux géré…

L’alourdissement du déficit budgétaire, multiplié par cinq de 1981 à 1985, avait entraîné un accroissement de la charge de la dette qui menaçait nos finances publiques. Il fallait sortir de l’enchaînement dette-déficit. Il fallait en finir avec le laxisme dans la gestion de l’État.

Le Gouvernement a fait un effort sans précédent de maîtrise des dépenses publiques, qui progressent moins vite désormais que les prix. Il s’agit là d’une situation sans équivalent depuis trente ans.

C’est ainsi que 115 milliards de francs d’économies ont été réalisés en trois ans. Ces économies ont pu être faites grâce à la réduction du train de vie de l’État, mais également par la suppression de dépenses improductives ou la remise en cause de missions inutiles.

On peut ainsi citer en exemple la diminution des subventions accordées par l’État aux entreprises. La logique des interventions publiques a été inversée. Avant mars 1986 : « plus de subventions, plus de charges, moins de compétitivité ». Désormais : « moins de subventions, moins de charges, plus de compétitivité ».

Cette meilleure gestion n’a pas concerné que l’État, mais également les services publics et les entreprises publiques.

La Poste et les Télécommunications offrent un bon exemple de cette meilleure gestion, au bénéfice tant des clients que des agents. La Poste a pu, en deux ans, retrouver le chemin de l’équilibre, puis, en 1987, des bénéfices d’exploitation et améliorer la qualité du service rendu grâce à la modernisation (informatisation des guichets) et à l’innovation (prestations nouvelles, délais garantis). Les Télécommunications, pour leur part, ont procédé à la modernisation des équipements (notre réseau téléphonique est le plus numérisé et l’un des plus performants au monde) et ont mis en œuvre une véritable gestion d’entreprise.

Le redressement est enfin celui des entreprises publiques. Les résultats sont tout à fait probants. Air France ne reçoit plus, depuis 1987, aucune subvention de l’État. La SNCF atteindra dès l’an prochain son équilibre brut d’exploitation. Plus spectaculaire encore, les quatre entreprises publiques du secteur concurrentiel, dont la situation était catastrophique en 1986, ont vu leur problème réglé. La construction navale — qui coûtait aux contribuables 300000 francs par an et par salarié — a fait l’objet d’un plan qui permet la reconversion des hommes et des sites, en particulier grâce à la création des zones d’entreprises de Dunkerque, La Seyne et La Ciotat. Quant à Renault, Usinor-Sacilor et CDF-Chimie, elles avaient accumulé 108 milliards de pertes de 1981 à 1986 (c’est-à-dire 5000 francs par foyer fiscal). Elles ont dégagé ensemble 3 milliards de bénéfices en 1987. Dès cette année, elles ne coûteront plus rien aux contribuables.

… au bénéfice des entreprises et de chaque Français

C’est parce que l’État a su mieux se gérer depuis 1986 que nous avons pu poursuivre une politique de réduction des déficits et d’allègement des charges qui a profité à toute l’économie comme à chacun des Français :

— En trois ans, le déficit du budget aura baissé de 25 %. Chaque année, il aura été plus faible que la prévision faite en début d’exercice.

— Nous avons réalisé parallèlement 70 milliards d’allègements fiscaux en trois ans, effort, là encore, sans précédent :

• 33 milliards ont permis de réduire les charges des entreprises pour améliorer leur compétitivité (taux de l’impôt sur les sociétés ramené de 50 à 42 %, allègement de 16 % des bases de la taxe professionnelle, suppression de la taxe sur les frais généraux, récupération de la TVA sur les télécommunications sans majoration de tarif, ce qui représente une baisse de 15 % de la facture de téléphone des entreprises).

• Pour les ménages, 28 milliards d’allègements fiscaux ont été réalisés. Pour le seul impôt sur le revenu, la baisse de la pression fiscale est de 6 % au moins pour tous les contribuables. Deux millions de familles modestes se sont vues exonérer de tout impôt sur le revenu, deux autres millions ont vu leur impôt réduit de plus d’un tiers. Il s’agit donc à la fois d’une réduction massive de l’impôt et d’une répartition plus juste. Parallèlement, et toujours dans le sens de la plus grande justice, nous avons institué la charte des contribuables qui permet de concilier les exigences de la lutte contre la fraude et une meilleure protection des libertés individuelles.

• La baisse de la TVA, qui représente un effort de 9 milliards de francs, a touché en priorité des produits de grande consommation : voitures, disques, médicaments, cliniques…

• Les prix des communications téléphoniques ont baissé de 6 % au niveau local et de 20 % au niveau interurbain.

Tout cela représente une action concrète de réduction de l’impôt, une action de justice. Chacun a pu en voir les conséquences aussi bien sur sa feuille d’impôt que dans ses achats.

2. Le pari de la liberté d’entreprendre a été gagné

Le Gouvernement a libéré l’économie française de contraintes archaïques et a diffusé concrètement la propriété au plus grand nombre de Français :

Libérer les prix sans inflation : tous les prix, pour toutes les entreprises, sont aujourd’hui libres. Les ordonnances de 1945 sur le contrôle des prix sont abrogées. L’inflation n’a pas dépassé 3,2 % cette année et a connu, hors produits énergétiques, son taux le plus faible depuis vingt ans. La différence de hausse des prix avec l’Allemagne est revenue à 2 %, niveau le plus bas depuis 1973.

Libérer les changes sans difficultés monétaires : les entreprises françaises sont aujourd’hui à armes égales sur ce plan avec leurs concurrentes. En 1987, le franc s’est comporté solidement sur les marchés monétaires et en particulier la parité franc-mark sort inchangée et consolidée de la crise financière internationale qui a débuté en octobre dernier.

Libérer l’environnement des entreprises : l’accès au crédit a été facilité ; l’encadrement du crédit est supprimé depuis le 1er janvier 1987. Le droit de la concurrence a été modifié pour être plus juste et moins dépendant de l’État. Un programme d’orientation de l’artisanat a été défini en 1986 et les règles relatives à la création et à la transmission des entreprises, notamment des PME-PMI, ont été allégées par la loi du 31 décembre 1987.

Créer un droit moderne de la concurrence et engager un effort de déréglementation, avec prudence mais efficacité. C’est ainsi que la liberté et la concurrence sont désormais la règle pour la plupart des services nouveaux des télécommunications (câblage, radiotéléphone ou radiomessagerie). Dans le domaine aérien, la concurrence a été ouverte en direction de la côte ouest des États-Unis, du Pacifique ou des DOM. Sur les DOM, le trafic a augmenté de 30 %, les prix les plus bas ont baissé de 30 % et 600 emplois ont été créés.

Diffuser la propriété de l’économie et des entreprises : les ordonnances sur la participation et l’intéressement permettent de renouveler les relations sociales dans l’entreprise. Plus de 50 % des salariés des entreprises privatisées sont devenus actionnaires de leur société et sont représentés en tant que tels dans leur conseil d’administration.

La moitié environ du programme quinquennal de privatisation a été menée à bien. Trente entreprises publiques, regroupant environ 500000 salariés, sont redevenues privées. Elles ont retrouvé liberté de gestion et de décision en même temps que crédibilité internationale. Plus de six millions d’actionnaires ont participé aux opérations de privatisation, ce qui représente un quadruplement du nombre des actionnaires en France. Deux tiers d’entre eux ont conservé leurs titres, en dépit des difficultés du marché, proportion qui témoigne d’une fidélité largement supérieure à celle constatée à l’étranger. La privatisation réussie de Matra fin janvier 1988 a témoigné de la continuité du mouvement entrepris et de la confiance que lui accordent les épargnants.

3. La reconquête de la compétitivité est bien engagée

Toutes les décisions économiques du Gouvernement ont tendu vers le redressement de la situation des entreprises : qu’il s’agisse de la baisse de l’impôt sur les sociétés, de la réduction des charges, de la liberté des changes ou du crédit, le maximum a été fait pour améliorer leur compétitivité. Aujourd’hui, le redressement est en bonne voie : le niveau de rentabilité et de fonds propres des entreprises est le meilleur que nous ayons enregistré depuis le début des années 1970.

Cette amélioration de compétitivité a des conséquences très concrètes. C’est ainsi que nos grandes entreprises, plus libres de leurs décisions, ont participé activement aux grandes restructurations de l’industrie mondiale avec la CGE, Rhône-Poulenc, Bull, Thomson. Aujourd’hui, l’industrie française prend des positions internationales et rachète des entreprises américaines.

Un nouvel élan a été donné à la création d’entreprises grâce à l’opération « Chances » du ministère de l’Industrie et à son réseau d’accueil. C’est ainsi que 540000 créations ont été enregistrées en 1986-87, soit 17 % de plus qu’en 1984-85.

L’amélioration de la compétitivité des PME passe en premier lieu par une meilleure diffusion à leur profit de l’effort de recherche et d’innovation technologique. Seule une politique active au niveau local peut permettre d’atteindre cet objectif. C’est tout l’enjeu de la création des pôles de compétitivité, développée depuis un an.

La compétitivité pour demain, c’est enfin la participation aux grands programmes technologiques européens. Les industriels français sont à la pointe de cette grande aventure, notamment en matière spatiale avec Ariane5, Hermès, Colombus.

En deux ans, nos entreprises ont ainsi pu combler une partie de leur handicap de compétitivité. Ces progrès doivent permettre de rétablir la situation de notre commerce extérieur. Nos résultats dans ce domaine ne sont certes pas encore totalement satisfaisants. L’action de reconstruction de notre industrie, entreprise depuis deux ans, devra être poursuivie pour effacer une décennie de retard. Des signes rassurants et positifs sont néanmoins réapparus depuis un an. En effet, même si l’année 1987 se termine par un déficit, d’ailleurs limité à 0,6 % du PIB, sous le coup d’une croissance sensible des importations résultant de la reprise de l’investissement, on observe à la fois un retournement à la hausse de nos exportations industrielles, +10 % en un an contre —4 % dans les dix-huit mois précédents, et l’amélioration de nos parts de marché en Europe passées de 13,9 à 14,6 % entre 1986 et 1987. La reconquête de notre compétitivité est bien engagée.

4. Au total, la France est aujourd’hui plus forte et plus libre

C’est ainsi que la France est aujourd’hui objectivement plus forte qu’au début de 1986. Au-delà de tous les résultats qui viennent d’être évoqués, deux indicateurs synthétisent bien les progrès accomplis depuis deux ans et le retour à la confiance pour l’avenir :

— Là où l’investissement productif avait pris un retard de quinze points par rapport à nos grands partenaires de 1981 à 1985, il a augmenté de 10 % en 1986 et 1987, permettant de combler la moitié de ce handicap.

— L’économie française dans son ensemble a cessé, depuis deux ans, de détruire des emplois. En deux ans, un premier pas, essentiel, a ainsi été accompli en vue de résorber le chômage, drame quotidien pour plusieurs millions de nos concitoyens.

Il faut être réaliste sur la crise financière de l’automne dernier. Elle ne trouve pas son origine en France et pourtant la France en subit les conséquences de plein fouet. Tout indique qu’en 1988, celles-ci, pour sensibles qu’elles puissent être, resteront d’une ampleur relativement limitée.

Qu’en aurait-il été si la France avait été plus faible au moment d’affronter cette crise ; des déficits plus lourds, des charges plus lourdes, une inflation plus élevée, des emplois moins nombreux, une absence de liberté dans la décision des entreprises ? À n’en pas douter, nos craintes pour l’avenir seraient plus grandes.

1986 a ainsi clairement constitué une rupture sur le plan économique. Cette rupture a été salutaire et notre économie a marqué des points.

Seule la politique de libération de l’économie, menée par l’ensemble du Gouvernement, dans tous les domaines de son action, avec détermination mais réalisme, a permis d’obtenir ces résultats. Ils sont la démonstration que la liberté, organisée et maîtrisée, ne signifie pas laxisme mais progrès et efficacité.

II. UNE FRANCE PLUS SÛRE ET PLUS SOLIDAIRE

1. La justice a été dotée de moyens nouveaux, afin de mieux garantir son indépendance et son efficacité

Parce qu’il est rassemblé sur l’essentiel et qu’il ne prétend pas s’occuper de tout, l’État peut consacrer aux missions qui, par nature, sont les siennes, les moyens nécessaires. De nombreux exemples pourraient être donnés en la matière, mais le plus éclairant est sans conteste l’effort entrepris dans le domaine de la justice pour assurer l’indépendance de l’autorité judiciaire et conforter les raisons qu’ont les Français d’avoir confiance en elle.

Le Gouvernement s’est fixé plusieurs objectifs :

Moderniser l’institution par la mise en œuvre de méthodes modernes de gestion. Un effort budgétaire important a permis de commencer à revaloriser la condition des magistrats et d’accélérer l’accroissement de leurs effectifs. C’est la qualité de la justice qui s’en trouve rehaussée : on assiste, dans l’ensemble des juridictions, à une réduction sensible des délais de traitement des dossiers.

Lutter contre l’insécurité en invitant les magistrats du Parquet à la fermeté. Une bonne entente a été rétablie avec les forces de police. Un ensemble de lois a amplifié les moyens de lutte contre les différentes formes de violence et d’insécurité : contrôles d’identité, mesures contre le terrorisme, la criminalité et la délinquance, le recel, l’alcoolisme au volant, la fraude informatique.

Engager la réforme pénitentiaire en ouvrant partiellement à l’initiative privée la construction et la gestion de prisons pour éliminer la pénurie : quelque 20000 places ont été lancées depuis mars 1986 contre 14500 réalisées auparavant.

Ainsi, non seulement le cours de la justice ne se réglera plus sur le nombre de places dans les prisons, mais l’accent pourra être mis sur la réhabilitation et l’insertion sociale. Les détenus seront traités avec la dignité à laquelle tout homme a droit.

Lutter contre la drogue avec une loi qui réprime très durement le trafic ; la loi de 1970 relative à l’injonction thérapeutique a été effectivement appliquée ; des centres de soins appropriés ont été créés.

Renforcer les libertés individuelles par la réforme de l’instruction : la détention provisoire ne pourra être décidée à l’avenir que par un collège de trois juges.

Enfin, les lois contre le racisme ont été renforcées.

S’agissant du Code de la nationalité, le projet de loi élaboré par le Gouvernement a été largement conforté dans son esprit par les travaux de la Commission des sages mise en place par le Premier ministre.

2. L’État a rempli son premier devoir : assurer la sécurité des personnes et des biens

La sécurité était devenue pour les Français une préoccupation constante. En la matière, l’efficacité implique des moyens : nous nous les sommes donnés. Des textes de loi — contre la criminalité et la délinquance, pour une meilleure application des peines, sur les contrôles d’identité, pour n’en citer que quelques-uns — ont été votés par le Parlement, afin de compléter le dispositif juridique dont nous disposions. De même, grâce à un effort budgétaire sans précédent, la police a été dotée des moyens indispensables à l’accomplissement de sa tâche. Nous avons fait confiance aux forces de l’ordre ; les serviteurs de l’État se sont sentis à nouveau motivés et mobilisés. C’est la principale raison des succès que nous avons enregistrés depuis des mois. La criminalité a régressé de 8 % en 1986, tendance très positive qui se poursuit en 1987, avec une nouvelle diminution de près de 5 %.

En ce qui concerne le terrorisme, les mesures qui ont été prises étaient à la hauteur des dangers. Là encore, la loi contre le terrorisme a donné aux forces de l’ordre la possibilité d’être efficaces. Le résultat en est connu : les principaux mouvements terroristes ont été démantelés ou ont subi des coups très durs. Qu’il s’agisse d’Action directe, des mouvements nationalistes corse ou basque, leurs auteurs répondent d’ores et déjà de leurs actes devant la justice.

3. Pour la première fois depuis 1973, des résultats sont obtenus en matière d’emplois

L’aggravation du chômage conduisait à des situations dramatiques et au découragement, notamment des jeunes.

Pour lutter contre ce fléau, le Gouvernement s’est efforcé de restaurer la compétitivité des entreprises afin de leur permettre de créer des emplois ; mais il y faudra du temps. Simultanément, le Gouvernement a assoupli les conditions d’embauche et permis d’aménager le temps de travail. Il a modernisé et complété les dispositifs d’insertion des chômeurs avec les formations en alternance tant pour les jeunes que pour les adultes (avec la création en 1987 des contrats et de stages de réinsertion en alternance). Surtout, il a affecté à cette tâche des moyens financiers considérables : dès le printemps 1986, un plan pour l’emploi des jeunes a été lancé, son succès a permis de concentrer en 1987 l’effort financier sur les chômeurs de longue durée.

Le Gouvernement a ensuite cherché à prévenir le chômage en développant la formation. À cette fin, les stages de formation professionnelle offerts aux jeunes ont été développés dans le budget de 1987 et dans celui de 1988. Les dispositifs d’insertion alliant la formation professionnelle et l’activité dans l’entreprise ont été développés. Des conventions de conversion ont été créées afin de faciliter le reclassement des salariés privés d’emploi. Le crédit d’impôt-formation en vigueur depuis janvier 1988 va encourager l’investissement des entreprises dans la formation.

Le Gouvernement a cherché à faciliter le retour à l’emploi des chômeurs. Dans cet esprit, nous avons accru la possibilité qu’ont les chômeurs de travailler de manière occasionnelle sans perdre leurs indemnités. Le Gouvernement a exonéré d’impôts et de charges les emplois de proximité, au bénéfice des familles et des personnes âgées ou handicapées. Nous avons donné un statut à des « associations intermédiaires » dont le but est de fournir du travail aux chômeurs.

Toutes ces actions ont porté leurs fruits :

500000 emplois ont été supprimés entre 1981 et 1986, mais aucun entre 1986 et 1987 ;

700000 chômeurs de plus sont apparus de 1981 à1986, mais l’aggravation a été stoppée depuis mars 1987, avec 115000 chômeurs de moins ;

1600000 jeunes ont trouvé du travail grâce au plan d’urgence de mai 1986 et 3 milliards de francs ont été dégagés pour la formation des demandeurs d’emploi, notamment des chômeurs de longue durée.

4. Les acquis de la Sécurité sociale ont été sauvegardés et confortés

Les comptes de la Sécurité sociale du début de 1986 étaient artificiellement présentés. Le régime perdait environ 20 milliards de francs chaque année. Ne rien faire eût signifié accepter l’éclatement de la Sécurité sociale à laquelle les Français sont très légitimement attachés.

Nous avons refusé cette perspective inacceptable. Nous avons assuré sans rupture le paiement des pensions de retraite dont le pouvoir d’achat a été amélioré pour rattraper la perte des années précédentes. L’engagement pris envers les familles de maintenir le pouvoir d’achat des allocations familiales a été tenu. Nous avons lutté contre les abus qui vont à l’encontre même des principes qui fondent notre Sécurité sociale : plan de rationalisation des dépenses d’assurance maladie, engagement d’une concertation approfondie avec les médecins, les professions de santé et les assurés en vue de responsabiliser chacun. Le Gouvernement s’est inspiré de deux principes : plus de solidarité et plus de responsabilité.

Plus de solidarité : des recettes nouvelles ont été apportées à la Sécurité sociale. Un effort exceptionnel a été demandé à tous en n’excluant aucune catégorie de Français ni aucune forme de revenus. Là où des économies étaient nécessaires, les adaptations nécessaires ont été prévues pour que les plus démunis ou les plus âgés ne soient pas pénalisés.

Plus de responsabilité : la Sécurité sociale ne sera préservée qu’avec l’effort de tous. Les résultats sont incontestables : trois branches sur quatre sont équilibrées en 1987 (famille, maladie, accident du travail) ; la situation de la branche « accidents du travail » autorise même une baisse des cotisations, effective au 1er janvier 1988.

Avec les États généraux qui se sont déroulés dans tout le pays d’avril à novembre 1987, le Gouvernement a entendu ouvrir un débat national : pour la première fois, la parole a été donnée aux Français sur un sujet qui les intéresse tous individuellement et collectivement.

Grâce aux premières mesures arrêtées tout au long de l’année 1987, le financement de toutes les prestations est garanti pour 1988.

Il est vrai qu’au-delà, des problèmes subsistent, principalement pour les régimes de retraite.

Parce que l’avenir de la protection sociale et, par là même, le devenir de notre société sont en cause, le Gouvernement a souhaité recueillir l’avis du Conseil économique et social sur un sujet où l’on ne peut ni improviser, ni imposer.

Une chose est sûre : nous avons préservé la Sécurité sociale malgré toutes les difficultés rencontrées depuis 1986. Nous ferons tout pour qu’il en aille de même demain.

5. Une politique active de solidarité nationale a été développée

Malgré les contraintes financières, le Gouvernement a agi pour renforcer la solidarité nationale.

Il a fait de la politique familiale une priorité et s’est fixé pour objectif d’assurer à toutes les familles le choix et la possibilité d’accueillir tous les enfants qu’elles souhaitent. Les mesures nécessaires ont été prises pour faciliter la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale et pour permettre le libre choix des mères de famille entre l’activité professionnelle et l’éducation de leurs enfants.

Pour ce faire, l’allocation parentale d’éducation a été réformée de façon à en faire un vrai revenu, sur la voie du salaire maternel. Les conditions de garde des enfants à domicile ont été facilitées par des exonérations de charges sociales, tout en aidant les collectivités locales à accroître et à diversifier les équipements de garde des enfants. Le statut social des mères de famille a été institué afin qu’elles puissent bénéficier de plus larges droits sociaux. Par des mesures fiscales sans précédent, une aide a été apportée aux familles les plus nombreuses ainsi qu’aux familles les plus modestes.

L’emploi des handicapés dans les entreprises et les administrations a été développé par une loi nouvelle. Notre société a le devoir de tout faire pour leur insertion dans la vie sociale, économique et professionnelle.

Le maintien à domicile des personnes âgées a été facilité par le développement de soins à domicile et une incitation fiscale à l’emploi des aides à domicile.

Nous avons lutté contre la pauvreté et la précarité non point en recourant à des mécanismes d’assistance qui portent atteinte à la dignité de la personne, mais en recherchant une véritable insertion sociale. Tout en répondant aux besoins d’urgence, nous avons engagé une action en profondeur pour faciliter l’accès au logement et faire en sorte que tous ceux qui ont des droits puissent mieux les connaître et mieux en user, en particulier dans le domaine de la santé.

Pour aider les plus démunis, nous avons mis en œuvre des dispositifs nouveaux (les compléments locaux de ressources). Ce n’est qu’en associant des ressources, un emploi et une protection sociale que l’on répond en effet véritablement aux exigences de solidarité.

Nous avons maîtrisé les flux migratoires en renforçant les contrôles aux frontières et les sanctions contre l’immigration clandestine. Simultanément, nous avons conduit une politique active d’accueil pour tous ceux qui séjournent régulièrement en France, conformément aux lois et aux traditions de notre pays.

Nous avons enfin lutté énergiquement contre les fléaux que sont l’alcoolisme, la toxicomanie, le SIDA… dans le respect absolu des libertés individuelles et de la dignité de l’homme.

6. La situation des rapatriés a été définitivement réglée.

Un plan très important d’indemnisation et de rétablissement des rapatriés dans leurs droits a été approuvé. Nous l’avons fait dans un souci de justice et de réconciliation nationale. La loi du 16 juillet 1987 a enfin apporté une solution au problème de l’indemnisation des rapatriés : 30milliards de francs y seront consacrés sur une durée au plus égale à treize ans. Grâce au concours actif des associations, les dossiers des rapatriés les plus âgés et les dossiers les plus simples ont été ou sont en voie d’être réglés. Quant à l’endettement contracté par les rapatriés, le Gouvernement a intégralement effacé la dette liée à la réinstallation ; il a en outre mis en œuvre un système de consolidation des dettes non susceptibles d’être effacées. Fin 1987, 12000 dossiers de retraite des rapatriés seront définitivement réglés. Un effort particulier a été engagé pour les Français musulmans.

Dans le même esprit, le Gouvernement a assuré le rattrapage des pensions des anciens combattants et, comme il l’a promis, a ramené en France les corps des soldats tombés en Indochine.

III. UNE FRANCE PLUS DÉMOCRATIQUE ET PLUS CULTIVÉE

1. La France est à la pointe du combat pour les droits de l’homme

L’institution d’un secrétariat d’État aux Droits de l’Homme était plus qu’un symbole ; c’était la marque de la volonté d’être plus présent dans le combat pour les droits de l’homme : création d’une commission nationale des Droits de l’Homme ; renouveau de l’éducation civique dans les programmes scolaires ; loi sur l’exercice de l’autorité parentale conjointe ; développement des moyens de l’aide humanitaire avec la Fondation pour le mécénat humanitaire ; signature de la convention européenne contre la torture et les traitements inhumains.

Le Gouvernement n’a cessé d’agir, partout dans le monde, pour la défense des opprimés, grâce aux interventions de la France dans les instances internationales, ou par l’aide aux organisations humanitaires. Il a dénoncé les atteintes aux droits de l’homme, où qu’elles soient et d’où qu’elles proviennent, sans ostentation, mais avec efficacité.

2. La confiance a été rétablie outre-mer

Le Gouvernement s’est attaché à restaurer la confiance en la République de tous ceux qui, par-delà les océans, constituent la France d’outre-mer. Dans les priorités nationales, les DOM-TOM ont retrouvé la place qu’ils n’auraient jamais dû perdre. Dans le même temps, le respect des lois et la sécurité civile ont été partout garantis (démantèlement de l’ARC en Guadeloupe, restauration des conditions normales d’exercice de la démocratie en Nouvelle-Calédonie).

La loi programme du 31 décembre 1986 témoigne de la fraternité de la métropole avec l’outre-mer. La mise en œuvre de la parité sociale globale sera intégralement réalisée en cinq ans. Parallèlement ont été libéralisés les transports aériens, encouragée la mobilité géographique et professionnelle, développées les télécommunications et élargie la couverture audiovisuelle des collectivités d’outre-mer. Enfin, un effort sans précédent a été fait pour aider au développement économique : défiscalisation dès 1986 et pour dix ans des investissements, remise en juillet 1987 d’un mémorandum sur l’outre-mer auprès de la CEE, triplement depuis 1986 des crédits consacrés aux équipements sanitaires et sociaux et priorité donnée au développement de la formation professionnelle et universitaire (IUT de Guyane, université française du Pacifique,…).

3. La démocratie au quotidien a été renforcée

Le scrutin uninominal à deux tours a été rétabli afin de rapprocher le citoyen de son député et afin de revenir à la logique des institutions de la VeRépublique. Seul ce mode de scrutin permet d’assurer au pays une majorité stable pour gouverner.

Le Gouvernement a travaillé en étroite collaboration avec le Parlement, en étant attentif aux nombreuses propositions de lois déposées à l’Assemblée nationale et au Sénat. La confiance du Parlement a été demandée et, tout récemment encore, la majorité la lui a renouvelée.

Les textes et les mécanismes de la décentralisation ont été améliorés pour la rendre plus efficace et responsable. Les statuts des agents locaux ont été publiés.

La réforme de l’ENA a été engagée et une importante politique d’innovation et de qualité dans l’administration a été entreprise.

La libération des initiatives individuelles ou collectives a été grandement encouragée par le développement du mécénat : création d’un Conseil supérieur du mécénat culturel, loi du 23 juillet 1987, ouvrant un statut juridique et fiscal aux initiatives des particuliers et des entreprises dans les domaines culturel, scientifique ou humanitaire.

4. Un accès plus libre à la culture et à la communication

L’accès plus libre à la culture a été facilité par la réduction des impôts sur les biens ou activités culturels (suppression de la redevance sur les magnétoscopes, baisse de la TVA sur les disques, les cassettes et les récitals).

Un rééquilibrage des dépenses de l’État au profit de la vie culturelle dans les régions a été engagé, notamment dans les crédits consacrés aux musées, aux archives, aux bibliothèques…

L’investissement culturel sur le long terme a été privilégié : loi de programmation du 5 janvier 1988 sur le patrimoine monumental qui prévoit d’ici 1992 une augmentation de 50 % des crédits affectés aux monuments historiques ; loi du 6 janvier 1988 pour donner un nouvel élan aux enseignements artistiques et garantir à tous un accès aux disciplines de la sensibilité ; création d’une Fondation européenne des métiers de l’image et du son…

Un plan très ambitieux de soutien à la création contemporaine a été mis en œuvre pour la danse. Des moyens importants ont été consacrés à relancer la commande publique dans le domaine des arts plastiques et soutenir l’aide publique aux productions cinématographiques ou audiovisuelles.

En matière de communication, les quatre objectifs que s’était fixés le Gouvernement en entreprenant par la loi du 30 septembre 1986 la réforme de l’audiovisuel ont été atteints :

Le désengagement de l’État s’est traduit par la mise en place de la CNCL et par l’association au secteur de l’audiovisuel de centaines de milliers d’actionnaires privés.

Un véritable équilibre a été instauré entre un secteur public audiovisuel fort, en audience et en moyens financiers (budget en hausse de 9 %), et un secteur privé rassemblant les plus grands groupes français et européens.

La relance de la création audiovisuelle française a été opérée par l’harmonisation du développement du cinéma et de la télévision, par d’importants moyens consacrés à la création, le développement des programmes de la Sept, la création d’une société de capital-risque destinée à investir dans les sociétés privées de production, et une dotation exceptionnelle au compte de soutien des industries de programmes.

L’audiovisuel a enfin été conçu comme un outil de la construction européenne et de la francophonie : vocation européenne de la Sept, création avec neuf pays de la CEE, la Suisse et la Suède, d’un fonds de soutien multilatéral aux industries de programmes et à la distribution, renforcement de notre présence audiovisuelle dans les DOM-TOM, extension de TV5, développement de RFO-AITV, montée en puissance de RFI, extension des activités internationales de la SOFIRAD.

Ces résultats ont été obtenus sans porter préjudice à la presse écrite, dont l’équilibre économique a été préservé par le renforcement d’un régime fiscal adapté et par la réglementation de la publicité télévisée.

La création d’un Observatoire de la publicité permettra à l’avenir d’évaluer l’impact du développement des nouveaux médias sur le marché publicitaire.

Enfin, les lois des 1er août et 27 novembre 1986 et l’adoption d’un ensemble de mesures fiscales (TVA uniformisée à 2,10 %, assujettissement à la TVA des communications téléphoniques, pérennisation et extension à la télématique des provisions constituées en franchise d’impôt) et sociales, ont conforté l’environnement juridique et économique de la presse.

Ce développement de l’accès à la culture et à la communication fait de la France un pays plus moderne, plus apte à entrer dans la civilisation du XXIe siècle.

IV. UNE FRANCE PLUS MODERNE ET MIEUX FORMÉE

1. L’équipement de la France avance à grands pas

Priorité a été donnée pendant ces deux ans aux investissements qui préparent l’avenir. Les Français en verront la traduction concrète dans les années à venir. Déjà les premiers résultats sont là en termes d’emplois, d’équité, de qualité de vie.

— Davantage d’emplois

Le secteur du bâtiment était un secteur sinistré. 300000 emplois perdus, en cinq ans, entre 1981 et 1986. Les mesures prises et le retour de la confiance ont entraîné le redémarrage des investissements. 50000 emplois disparaissaient chaque année ; 10000 ont été créés cette année.

— Davantage d’équité

Le nouvel élan donné à la politique d’aménagement du territoire permet une meilleure équité entre régions. Les autoroutes Clermont-Ferrand-Béziers et Bordeaux-Lyon apporteront une nouvelle chance au Massif central, cœur de l’Europe.

200000 accédants à la propriété en difficultés, par la suite de la flambée des taux des emprunts contractés entre 1982 et 1984, ont vu leurs prêts renégociés.

La seule vraie protection du locataire, c’est l’abondance et donc le choix des logements. La reprise de la construction locative, encore insuffisante dans les grandes agglomérations, permettra cependant d’évoluer vers une détente du marché du logement.

— Davantage de qualité de vie

La politique de sécurité routière, qui sauve des vies humaines (information, prévention, mais aussi sanctions), a permis en 1987 une baisse de 10 % du nombre de tués. Le trafic s’est accru en même temps de 4 %. Pour la première fois depuis vingt-cinq ans, il y a eu moins de 10000 morts sur la route, chiffre encore, hélas ! dramatiquement élevé.

Le nouveau programme autoroutier et l’interconnexion du TGV vont changer le visage de la France, rapprocher les hommes (quatre heures de Nantes à Bruxelles sans changer de gare), ouvrir directement les régions sur l’Europe (abandon du système radial concentré sur Paris), désengorger la région parisienne en diminuant les encombrements et améliorer la vie des Français. Ce dispositif ambitieux et déjà mis en œuvre (300 km d’autoroutes sont mis en chantier en 1988 contre 100 avant 1986) permettra à la France de jouer son rôle de plaque tournante au cœur d’une Europe de 320millions d’habitants.

Pour beaucoup de familles, l’accession à la propriété est une parcelle d’autonomie et de liberté en plus. Cette accession est devenue plus facile. La baisse des taux d’intérêt et les déductions fiscales diminuent le remboursement des annuités de 15 % environ.

Pour la première fois depuis longtemps le nombre de logements construits est en hausse : la barre des 300000 par an a été franchie.

Des faiblesses persistent : offre foncière insuffisante dans les grandes villes, manque de solvabilité des ménages et déséquilibres d’activités entre les zones rurales. Seule la poursuite d’un effort exceptionnel permettra de répondre en ce domaine aux attentes des Français.

Le choix de la Savoie pour organiser les Jeux olympiques d’hiver de 1992 a été l’occasion pour le Gouvernement de décisions ambitieuses pour cette région, tant en matière d’infrastructures que d’équipements sportifs et touristiques qui rejailliront sur tout le pays.

La France a fait un effort d’aménagement et d’équipement de son territoire sans précédent en deux ans. Elle est ainsi en bonne place pour être le carrefour du grand marché unique européen, au profit de toutes ses régions et de toutes ses activités.

2. La place éminente de notre agriculture, chez nous et en Europe, a été garantie

L’agriculture, dans un passé récent, avait été trop négligée. Un véritable dialogue avec les organisations représentatives a été rétabli, notamment en réunissant la Conférence annuelle agricole et en relançant les interprofessions.

Le Gouvernement a redonné à notre pays son autorité dans le débat agricole international (en particulier lors de la conférence de Punta del Este) et communautaire (en obtenant notamment le démantèlement des montants compensatoires monétaires).

Il a redressé le revenu agricole en menant une politique d’abaissement des coûts de production (diminution des charges financières ; maîtrise des cotisations sociales ; allègements fiscaux substantiels ; encadrement de la taxe foncière sur les propriétés non bâties).

Il a agi pour la solidarité nationale chaque fois que c’était nécessaire : en cas de catastrophes naturelles ; au profit des zones défavorisées, principalement de montagne ; envers les producteurs laitiers frappés par les quotas institués avant 1986.

Il a préparé l’avenir de l’agriculture et du secteur agro-alimentaire en élaborant le projet de loi de modernisation, en améliorant le statut de l’agricultrice et les conditions d’installation des jeunes, en engageant la mutualisation du Crédit Agricole, en définissant les principes d’une politique de l’aménagement de l’espace rural ambitieuse.

Grâce à sa fermeté, il a enfin obtenu à Bruxelles que les moyens de financement de la politique agricole commune soient garantis à un niveau suffisant et pour cinq ans.

Au total, jamais depuis 1980 aucun gouvernement n’avait fait autant pour l’agriculture française.

3. La sauvegarde de l’environnement a bénéficié de moyens et d’initiatives renouvelés

Quand les pollutions ont menacé notre territoire, les mesures qui s’imposaient ont été prises : lutte efficace contre les incendies de forêts et adoption d’une loi importante sur l’organisation de la sécurité civile et la prévention des risques majeurs. Une politique de l’eau, de protection des sites et de la nature a été mise en œuvre. Plus généralement, c’est toute une politique de la qualité de la vie qui a été élaborée.

4. L’amélioration de la formation des hommes a été remise au premier rang de nos priorités

La reconquête de la compétitivité et la modernisation de l’économie supposent une meilleure formation des hommes. Mais la formation est avant tout une exigence morale : seul le progrès des connaissances et de la culture permet à la dignité et à la liberté individuelle de s’épanouir.

— L’école

La politique du Gouvernement s’est fondée, en ce domaine, sur trois principes :

 La liberté

C’est donc un devoir, pour l’État, d’assurer aux divers ordres d’enseignement des conditions égales de fonctionnement.

Un effort considérable de rattrapage a été effectué au profit de l’enseignement privé, lourdement pénalisé pendant la période 1981–1986, et cela au mépris de la loi. C’est ainsi qu’il a été décidé de remettre le forfait d’externat à niveau en trois ans. Le plan informatique pour tous est d’ores et déjà étendu à l’enseignement privé.

 La responsabilité

Une machine aussi lourde que l’administration de l’Éducation nationale ne peut tourner efficacement que si les décisions sont prises au plus près du terrain. C’est pourquoi une ambitieuse politique de déconcentration a été mise en œuvre. Soixante mesures ont été prises entre juillet 1986 et janvier 1988 au profit des autorités académiques. C’est une opération sans précédent.

Dans le même esprit, et grâce en particulier au nouveau statut des maîtres-directeurs, les établissements ont été dotés de responsables aptes à prendre les décisions qui s’imposent et à être les interlocuteurs des parents, des élus et des divers responsables locaux.

 La qualité

Sans exagérer les carences de l’Éducation nationale, il faut cependant reconnaître que des progrès importants doivent être réalisés pour lutter contre l’échec scolaire et donner à nos enfants un enseignement de haute qualité.

Des moyens supplémentaires ont été dégagés pour cela : 5400 emplois d’enseignants ont été créés pour 1987 et 1988 ; le budget de l’Éducation nationale connaît en 1988 une progression très supérieure à celle de la moyenne des dépenses de l’État.

Au total, les rentrées scolaires de 1986 et 1987 se sont bien déroulées.

Le plan pour la réussite scolaire qui bénéficie de crédits spécifiques vise à amener chaque jeune au niveau le plus haut possible de connaissances en fonction de ses aptitudes et de ses goûts. Il a permis de rechercher des solutions personnalisées : cours supplémentaires à effectifs réduits pour la lecture ; étalement sur trois ans du programme de deux années scolaires ; enseignement assisté par ordinateur.

L’école est le lieu de préparation de la vie sociale. Le ministre de l’Éducation nationale a mené depuis 1986 une série d’actions de lutte contre la toxicomanie, l’alcoolisme, le tabagisme, la consommation excessive de médicaments, les maladies sexuellement transmissibles et le SIDA.

— L’enseignement supérieur

Les capacités d’accueil ont été notablement augmentées : neuf départements d’IUT ont été créés ainsi que six premiers cycles délocalisés en Île-de-France.

L’utilisation de l’informatique a permis un meilleur déroulement des formalités d’inscription en université.

La loi de finances pour 1988 permet d’amplifier cet effort : les crédits progressent globalement de 5,6 % et les dépenses en capital de 15 %. Un effort particulier est fait pour les bibliothèques universitaires.

Le troisième cycle des études médicales a été aménagé, la signification des concours et des études de l’internat a été rétablie.

Pour l’avenir, une réflexion approfondie a été conduite par la commission « Demain l’Université ». Sur ces bases, quatre orientations fondamentales ont été retenues :

• organiser les études universitaires en faisant porter l’effort sur les premières années ;

• définir un cadre statutaire souple adapté aux missions de l’université ;

• améliorer la condition des enseignants et des étudiants ;

développer le rayonnement et le prestige des universités.

— La formation professionnelle

La priorité donnée par le Gouvernement à la recherche s’est traduite tant au niveau des structures que des actions (croissance de 10,6 % de l’effort budgétaire de recherchedéveloppement) :

• La recherche publique (tout particulièrement le CNRS et l’INSERM) a vu ses moyens confirmés. La reprise des recrutements de chercheurs et la création de 150 emplois de chercheurs nouveaux sont particulièrement significatives.

• Le Fonds de la Recherche et de la Technologie a vu sa dotation augmenter de près de 25 % (1987 : 750 millions ; 1988 : 930 millions). Onze programmes nationaux (dont le programme SIDA) comportant trente-trois actions prioritaires de recherche ont été définis.

• L’augmentation du crédit d’impôt-recherche au profit notamment des PME-PMI (1100 millions en 1987 ; 1600 millions en 1988) confirme la volonté du Gouvernement de privilégier la recherche et le développement.

• Les grands équipements ont fait l’objet de décisions essentielles : contribution de la France aux programmes spatiaux, décision de la construction du très grand télescope, montage définitif du financement du synchrotron de Grenoble et, enfin, contribution décisive à l’établissement et à l’adoption du programme-cadre de la CEE pour la période 1987–1991. De nombreux programmes EUREKA ont été engagés avec une forte participation (aux environs de 50 %) des entreprises françaises.

* * *

Une France plus attentive à protéger son patrimoine naturel ; une France mieux équipée ; une France dotée d’une agriculture plus moderne ; par-dessus tout, une France qui investit dans la formation des hommes et dans la recherche, autant d’actions et de décisions qui nous permettent d’aborder l’avenir dans de bonnes conditions.

V. UNE FRANCE PLUS INDÉPENDANTE ET PLUS AMBITIEUSE

1. La politique de défense a connu un véritable regain

La loi de programmation militaire, votée au printemps 1987 à la quasi-unanimité par le Parlement, permet de reprendre, pour les cinq années à venir, l’effort de défense qui s’était relâché de 1982 à 1986.

Les engagements financiers sans précédent qu’elle comporte — marqués par une progression annuelle de 6 % en francs constants des crédits d’équipement des armées — sont à la mesure des enjeux. Les budgets 1987 et 1988 les respectent au franc près.

Seront ainsi lancées, dans le domaine nucléaire, la modernisation de notre Force Océanique Stratégique (sous-marins de nouvelle génération dotés de missiles M5) et une nouvelle composante stratégique terrestre (missiles S4).

La modernisation des forces classiques sera assurée avec le lancement du porte-avions Charles de Gaulle, du char Leclerc et de l’avion de combat Rafale, sans que soit négligée la dimension spatiale de notre sécurité.

La France a affirmé sa détermination d’assumer toutes ses responsabilités en Europe.

À son initiative, les pays de l’Union de l’Europe occidentale ont adopté une charte commune des principes de la sécurité de l’Europe occidentale.

La coopération avec les partenaires européens, et notamment l’Allemagne, a été renforcée dans la ligne de l’effort engagé par le général de Gaulle et le chancelier Adenauer, en vue d’un espace stratégique européen et d’une définition de conceptions communes.

La création prochaine du Conseil de défense franco-allemand et d’une brigade mixte en sont le symbole, comme le lancement de l’hélicoptère anti-chars franco-allemand et la participation de l’Italie et sans doute de l’Espagne au satellite militaire d’observation.

2. La coopération a pris un nouveau départ

Le Gouvernement a rétabli un dialogue confiant avec nos partenaires traditionnels d’Afrique, réorienté vers eux l’essentiel de notre programme d’aide, développé de nouvelles actions de partenariat pour mobiliser les entreprises, sans oublier une vigilance de chaque instant sur les problèmes de sécurité (Tchad).

En deux ans, l’aide publique au développement s’est accrue de 20 %. L’assistance technique a retrouvé les moyens qu’elle avait perdus.

Des initiatives concrètes ont été prises pour aménager la dette des pays en développement : participation à l’augmentation de capital de la Banque mondiale, triplement de la facilité d’ajustement structurel du FMI, adoption par la CEE d’un programme d’aide à l’ajustement des États africains, action du Club de Paris.

3. La francophonie a marqué des points

La francophonie traduit une expression renouvelée de l’identité nationale et une nouvelle forme de solidarité internationale. L’ouverture d’espaces culturels et scientifiques d’expression francophone a donc été favorisée : Fondation internationale des espaces francophones dans la région Midi-Pyrénées, espace francophone à la Villette…

De nombreuses manifestations populaires ont été organisées : semaine de la chanson française, festival du film francophone… En outre, une journée pédagogique consacrée à la francophonie aura lieu dans tous les établissements scolaires. Enfin, l’accueil des associations francophones a été amélioré. Le suivi des sommets francophones constitue une priorité et les liens de la francophonie avec les actions de coopération culturelle et technique ont été renforcés.

4. La France a un grand dessein pour l’Europe

L’Europe est un projet d’ensemble. Il porte tant sur l’économie que sur la défense, la culture ou les droits de l’homme.

Nous avons préparé l’Europe économique dans le cadre du grand marché de 1992, défi considérable et grande chance pour notre pays.

Nous avons œuvré pour une Europe qui s’affirme sur le plan de la défense, notamment dans le cadre de l’Union de l’Europe Occidentale et par un renforcement de la coopération avec nos plus proches voisins.

La France entend également faire de la Communauté non pas seulement l’Europe des marchandises, mais avant tout celle des hommes.

En témoignent :

l’adoption du programme « Erasmus » : 40000 étudiants pourront effectuer dans les trois ans à venir une année d’études dans un autre État membre de la Communauté ;

l’accord de la France :

au projet « Jeunesse pour l’Europe » : 80000 jeunes Européens, en apprentissage, entrés précocement dans la vie active, ou à la recherche d’un emploi, pourront effectuer un stage dans un autre pays de la Communauté ;

à la directive qui doit permettre aux jeunes, aux retraités et aux conjoints, de s’établir librement dans le pays européen de leur choix.

Nous avons préparé l’Europe de la culture en faisant des propositions concrètes à nos partenaires pour l’accroissement de l’enseignement des langues, le développement des échanges de jeunes, pour l’intensification des relations entre les universités. C’est l’objet du « Livre bleu pour une Europe de l’Éducation et de la Culture » déposé en mars 1987.

Cette Europe doit dépasser les frontières de la Communauté Européenne, s’étendre au Conseil de l’Europe et même, au-delà, vers les pays de l’« autre Europe ». Nous avons affirmé qu’entre les deux Europes, il ne devait pas y avoir de barrière aux échanges entre les personnes.

5. La France affirme sa vocation universelle

L’adhésion de la majorité des Français aux grands principes définis par le général de Gaulle donne à notre pays les fondements de son autorité morale dans le monde.

Nous avons affirmé l’indépendance de la France en redressant son économie, en affermissant sa monnaie, en modernisant ses capacités de défense.

Nous avons développé notre présence dans le monde : nous l’avons montré en Afrique en soutenant le gouvernement légal du Tchad auquel nous lie un accord de défense, en participant au maintien de la liberté de navigation dans le golfe Persique, en affirmant notre présence dans le Pacifique. Nous avons refusé le partage du monde en deux blocs.

La Fondation Chirac

La fondation Chirac rassemble des femmes et des hommes de tous les continents décidés à agir au service de la paix, du dialogue des cultures et de la protection de la planète.

La Fondation encourage des actions pionnières et concrètes pour favoriser la paix et le développement durable, notamment à travers l’accès de tous à l’eau et à l’assainissement, ainsi qu’aux médicaments de qualité.

En un an, la Fondation a déjà :

— consolidé le premier laboratoire de contrôle des médicaments en Afrique de l’Ouest,

— lancé une mobilisation mondiale contre les faux médicaments,

— fait certifier pour l’exploitation durable plus de un million d’hectares de forêt tropicale dans le bassin du Congo,

— lancé une campagne avec la Banque africaine de développement pour l’accès à l’assainissement dans plusieurs régions rurales d’Afrique,

— préservé la mémoire de langues et de cultures menacées de disparition et ouvert un site Internet consacré aux langues rares.

Enfin, la Fondation remettra, chaque année, un prix pour la prévention des conflits distinguant deux personnalités ou deux institutions qui ont œuvré pour la paix.

Découvrez l’action de la fondation Chirac et les moyens de participer à son action sur son site http ://www.fondationchirac.eu.

Fondation Chirac

14, rue d’Anjou, 75008 PARIS

Tél. 01 47 42 87 60 / Fax 01 47 42 87 78

Cahier photos

Pendant la guerre, au Rayol.

Mon grand-père (le dernier à droit au deuxième rang), Louis Chirac, a toujours défendu les valeurs de respect et de tolérance. Grand républicain, attaché à laïcité, il restera pour moi un modèle.

Le jour de ma communion solennelle avec mes parents, François et Marie-Louise Chirac.

En vacance en Corrèze avec mon père, qui a su m'inculquer un profond respect du travail.

Chez les scouts (je suis le troisième en partant de la droite), on m'appelait « Bison égocentrique ».

Voyage aux États-Unis, en compagnie de mes amis de Sciences-Po : Françoise Ferré et Philippe Dondoux. À la découverte du nouveau monde.

En route pour le Grand Nord.

Retour a Sainte-Féréole, en Corrèze, devant la maison d'Eugénie Couly, amie de ma famille.

Mon mariage avec Bernadette, le 16 mars 1956, à Paris, en l'église Sainte-Clotilde.

Chez mes beaux-parents, au début des années soixante avec Bernadette et nos deux filles : Laurence et Claude.

Au domicile de mes parents à Paris, en compagnie de ma mère, de Laurence et de Bernadette.

En Algérie à la tête du 3e peloton du 6e RCA.

En Algérie à côté de mon supérieur, le capitaine Péchereau.

En 1959, à l'ENA : la promotion Vauban.

25 mai 1967 : j'ai l'honneur d'appartenir au nouveau gouvernement de Georges Pompidou et de servir le général de Gaule.

Avec Georges Pompidou et Édouard Balladur, au moments des accords de Grenelle, en mai 1968.

Le 27 mai 1968, nous travaillons avec les organisations syndicales à la conclusion des accords de Grenelle.

La 403 avec laquelle j'ai fait ma première campagne électorale en Corrèze.

Au cœur de la tourmente, le 20 mai 1968, je quitte l'Élysée à l'issue d'un entretien avec le général de Gaule. J'étais alors secrétaire d'État a l'Emploi.

À la table du Conseil des ministres, dans le salon Murat de l'Élysée. Ce sera le dernier Conseil présidé par Georges Pompidou.

Avec Georges Pompidou qui m'a tant appris par son sens de l'État, son humanité et sa passion exigeante de la France.

Alors ministre de l'Agriculture avec Valéry Giscard d'Estaing, ministre de l'Économie et des Finances, et le Premier ministre Pierre Messmer, le 4 septembre 1972, a l'issue d'un déjeuner avec le président Georges Pompidou.

Avec mon amie Simone Veil, ministre de la Santé, lors d'une conférence de presse à Matignon en 1974.

1977, en campagne pour l'élection à la Mairie de Paris.

A la tribune, devant les cadres nationaux du mouvement gaulliste en 1976

En discussion avec Jacques Chaban-Delmas durant le Congrès des maires de France en 1978, qui se tient à l'Hôtel de Ville de Paris.

Avec le président François Mitterrand

À l'occasion d'un sommet européen, lors de la première cohabitation, de 1986 à 1988.

Avec le pape Jean-Paul II.

J'accueille Deng Xiaoping à Paris, en mai 1975.

En 1981, je remets le grand prix de la poésie Alfred-de-Vigny au président sénégalais Léopold Sédar Senghor.

Saluant le champion sumo Takazawa à la japonaise, dans les salons de l'Hôtel de Ville, le 6 octobre 1986.

Le 26 septembre 1993, lors des Journées parlementaires du RPR à La Rochelle, avec le Premier ministre Édouard Balladur.

Le soir de la Victoire, le 7 mai 1995.